LES SÉNÉGALAIS INVITÉS À CULTIVER LA CONCORDE NATIONALE
Dakar, 3 août (APS) – Amadou Tidiane Wone, ancien ministre sénégalais de la Culture, et Abdallah Fahmi, théoricien du mouridisme, ont invité les Sénégalais à promouvoir, au-delà du consensus politique, une concorde nationale qui prenne en compte les valeurs spirituelles et la capacité de dépassement de soi.
Les deux conférenciers ont lancé cet appel quand ils s'employaient à dresser le profil et la démarche de Serigne Abdoul Aziz Sy (1904-1997) et Cheikh Ahmadou Bamba (1853-1927), lors d'un débat sur les érudits de l’islam et les valeurs qui fondent cette religion.
C'était samedi, second jour de la troisième édition du Festival des Nuits du zikr et des musiques spirituelles, à Dakar.
"Lors du Gamou de 1988, Abdoul Aziz Sy avait appelé à la concorde nationale, une notion qui convoque des valeurs spirituelles, une capacité de dépassement de soi et une capacité de concession à l’autre. Il faut que les esprits intelligents et engagés reprennent la balle de 1988 (Ndlr : l'appel lancé lors du Gamou) et la remettent au centre", a dit M. Wone.
Il a déploré le fait que les politiciens, "qui préfèrent le consensus à la ruse", en arrivent à "oublier les fondements de l’appel" de Serigne Abdoul Aziz Sy, alors Khalife général des tidianes.
Au lendemain de l’élection présidentielle de 1988, des violences ont secoué le pays après que l’opposition a contesté la réélection d’Abdou Diouf à la présidence de la République.
Le secrétaire général du Parti démocratique sénégalais (PDS), Abdoulaye Wade, et quelques compagnons, avaient été emprisonnés. La crise avait secoué le milieu scolaire et estudiantin, poussant l’Etat à décréter une année blanche.
En 1988, "notre pays traversait une zone de turbulences. Abdoul Aziz Sy avait lancé un appel politique. Il est allé voir les étudiants en grève de la faim, et les hommes politiques, pour appeler au calme et au dialogue", a rappelé Amadou Tidiane Wone.
Abdallah Fahmi, lui, a dit que les valeurs d’ouverture, de dialogue et de tolérance, qui fondaient la démarche de Serigne Abdoul Aziz Sy, sont "des facteurs exceptionnels à cultiver et à appréhender". Il estime que le Sénégal "peut servir d’exemple pour d’autres pays, où des gens n’ayant rien compris du message islamique, essaient de s’imposer par la violence".
Il a souligné que se priver du patrimoine légué par des guides comme Cheikh Ahmadou Bamba et Serigne Abdoul Aziz Sy "serait une erreur monumentale". Pour Fahmi, le mouridisme, qui s’inscrit dans la tradition prophétique, permet à celui qui l’étudie de "se corriger et de se parfaire soi-même".
"Il faut cultiver la concorde dans la société, pour permettre à chacun d’entre nous d’être en harmonie avec soi-même, pour aller vers Allah, sans être chargé du fardeau des autres", a-t-il recommandé aux Sénégalais.
"Il y a de quoi se poser des questions. Il faut prendre les devants. Il y a des gens qui essayent d’importer des modèles d’ailleurs, alors que le Sénégal a le meilleur de ce qu’a produit l’islam", a affirmé Abdallah Fahmi.
La troisième édition du Festival des Nuits du zikr et des musiques spirituelles était organisée en hommage au dramaturge Oumar Ndao, par Ashram Records, en partenariat avec la Ville de Dakar.
Elle s'est achevée dans la nuit de samedi à dimanche par un spectacle au cours duquel plusieurs artistes se sont produits. Il y avait également une exposition de photos et d’œuvres lithographiques.