MACKY SALL N’ÉTAIT PAS PRÊT POUR LA PRÉSIDENCE
YANCOBA DIATTARA, PREMIER ADJOINT AU MAIRE DE THIÈS ET MEMBRE DE LA DIRECTION DE REWMI
Dans la seconde partie des Marches du Quotidien, Yancoba Diattara estime que le Président Macky Sall est arrivé au pouvoir sans s’y être préparé et qu’il a pris deux ans pour essayer. Il reste d’avis que ce serait un recul grave que de supprimer la liste proportionnelle, aussi bien au niveau de la Ville, qu’au niveau du département du fait de calculs politiciens pour éliminer tel ou tel leader politique comme Khalifa Sall ou Idrissa Seck. Par ailleurs, le Premier adjoint au maire de Thiès rejette encore une fois de plus toutes les accusations de mauvaise gestion du foncier à Thiès et dresse un bilan positif de sa participation au mouvement étudiant.
Vous ne vous sentez pas menacé avec la candidature d’El Malick Seck ?
Non. Lui, c’est le plus alléchant peut être.
En tout cas, beaucoup de candidatures déclarées ; vous avez là quand même des…
C’est tout à fait normal, Thiès est tellement attrayante du fait de l’environnement, des projets, de l’image qui font que chacun veut devenir maire de Thiès.
Grâce à Rewmi ?
Naturellement grâce à Idrissa Seck et nous aussi qui avons mis en œuvre certains de ses grands projets qu’il avait laissés.
Et les chantiers de Thiès dix ans après, que peut-on retenir d’eux ?
De goût inachevé, d’espérance perdue, de désespoir du fait simplement d’un jeu politique ou bien d’un combat politique que, malheureusement, des tenants du pouvoir continuent encore de mener contre la ville de Thiès.
La mairie n’a pas les moyens de les achever ?
J’ai demandé l’autorisation. Si on m’autorise, je les achève tous.
Mais pour autant aussi, vous n’avez pas réglé les problèmes d’inondation à Thiès…
C’est à relativiser. Thiès ne connaît pas d’inondation comme certaines villes comme Dakar et Saint-Louis. L’année dernière ou l’année d’avant, j’avais invité le ministre Oumar Guèye (le ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement d’alors).
Quand il est venu, il m’a dit : ‘’Monsieur le maire, cela n’est pas une inondation. Moi qui viens de Dakar, de certaines villes-là, cela n’est pas une inondation !’’
Naturellement, les problèmes de stagnation d’eau sont récurrents et normaux du fait même de la configuration de Thiès qui est une cuvette, mais également de la remonte de la nappe dans certaines zones. Visitez la zone de Nguint aujourd’hui, Nguint horticole comme on l’appelle, le quartier est construit sur des bas fonds qui étaient abandonnés, du fait de la sécheresse à un moment donné.
Mais avec la régénération de la nappe, aujourd‘hui la nappe affleure et que les gens ont vu leurs maisons inondables pendant la saison des pluies. Aujourd’hui, ce qui est retenu avec le Mrazi (Ministère de la Restructuration et de l’Aménagement des zones inondées), c’est la construction de deux cents villas, sur la Zac. Ils ont trouvé une parcelle de cent, je suis prêt à leur donner cent supplémentaires pour faire le projet avant l’hivernage. Ils disent qu’ils ont le financement, j’attends de voir.
Et les accusations de gestion foncière dont font partie Ibrahima Bâ et autres, qu’est-ce que vous pouvez nous en dire ?
Vous savez, sur la gestion foncière vraiment, depuis cinq ans, c’est la même chanson, je dis la même chose. Depuis cinq ans, je donne la même réponse. Personne n’est en mesure de me contredire.
Le foncier au Sénégal, qui est très problématique, il faut le reconnaître, est une gestion partagée entre l’Etat et les municipalités.
Le rôle du maire est simple dans cela, et depuis cinq ans, aucun audit ou aucune inspection de l’Etat n’a contredit mes actes. Le rôle du maire dans la gestion foncière, c’est de recevoir les demandes de terrains et de les transmettre aux Domaines. Qui instruit les dossiers, et qui les présente en réunion de commission d’attribution présidée par le maire.
Le rôle du maire dans cela, ce n’est qu’un rôle de présidence d’une commission statutaire, plus ou moins instituée par l’article 25 de la loi 96-07 portant transfert de compétences aux municipalités, communautés rurales, départements et naturellement aux régions.
Depuis cinq ans, personne, aucune personne ne peut prouver que le maire de Thiès a attribué la plus petite parcelle. Tout s’est fait en commission. Et mon rôle dans cela, en tant que maire élu, mon rôle c’est de défendre des intérêts des populations. Parce que moi, ce que certains ne savent pas, c’est que je suis un fils de sérère. Ma mère est sérère et à Thiès, ce qui reste des terres appartient aux sérères.
Moi, je suis arrivé en 2009 en trouvant sur place deux lotissements prêts mais où la mairie était en tiraillements, en conflit ouvert avec les sérères nones de Thiès.
Naturellement en tant que fils d’une sérère et connaissant aussi les réalités, j’ai dit que je ne toucherais jamais de terre à Thiès sans avoir le compromis ou l’adhésion des populations. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai proposé à Idrissa Seck qu’on prenne un sérère comme président de la commission domaniale, cela nous protégerait. Et jusqu’à présent, cela nous a protégés. Par ce qu’ils ont leur réalité. (…) Il y avait des menaces, tout dans cette affaire.
Qu’est-ce qui bloque le projet de l’école des Turcs ?
Le projet de l’école des Turcs n’est pas bloqué. Pour moi, c’est peut-être l’Etat qui n’a pas voulu… Nous, on avait un projet de leur accorder 4 hectares vers Polytechnique, qui est un terrain du Domaine national. Je leur ai dit : ‘’Si vous voulez les 4 terrains qui appartiennent aux Thiessois, vous donnerez sous forme de compensation ce qu’il y a lieu de donner pour que l’on on puisse l’investir dans les domaines sociaux, pour les Thiessois en tout cas. Mais ça, c’est un domaine pour les Thiessois. Ou bien l’Etat leur donne sur les titres fonciers qu’il a vers polytechnique…
Ils peuvent acheter des terrains, alors ?
Non. En tout cas, il faut discuter. Donc, on peut leur dire : ‘’On a tel projet structurant, par exemple le marché au poisson, vous le financez. On a tel, tel, tel…’’. On assume et de manière transparente. Ils me disent : ‘’Oui, l’Etat nous a donné…’’. Je leur dis : ‘’Oui, l’Etat vous a donné, l’Etat n’a qu’à encore vous donner.
L’Etat a encore des titres fonciers à Thiès, il n’a qu’à vous en donner. Si vous allez à la Zac, il est clair que le ministère va vous vendre à 10 mille francs presque le mètre carré. Sur un hectare, vous allez donner cent millions par hectare’’. Donc, je dis : ‘’On discute’’. En fait, ce n’est pas un équipement collectif public, c’est un projet privé. Et si c’est un projet privé par rapport aux Thiessois, il faut que les Thiessois qui n’ont pas tous leurs enfants là-bas – parce que moi je connais les tarifs – puissent s’y retrouver.
Vous avez vos enfants là-bas ?
Oui, j’ai mes enfants là-bas. Parce que c’est assez lourd. Je sais ce que je dépense pour mes enfants. Je trinque pour respecter les engagements. Ils sont très bons. Moi, je l’ai dit clairement au directeur, que je n’ai rien à cacher. Le préfet nous a appelés à deux reprises pour des discussions. C’est pourquoi je dis que nous n’avons rien à cacher.
Aujourd’hui, c’est Déthié Fall qui dirige les structures du parti. Est-ce qu’il assume convenablement sa tâche à la lumière des départs qu’on a évoqués tantôt ?
Je pense que ce n’est pas lié. Déthié est un jeune cadre qui a accepté venir s’engager, se mouiller dans la politique comme nous du fait d’une amitié avec Idrissa Seck, avec moi-même depuis l’université. Je pense qu’il s’acquitte convenablement de ses tâches.
Donc, nous avons tous suivi la vente des cartes et la structuration également qui est en train de se faire. Je pense qu’il s’y met de manière appréciable.
Maintenant c’est à nous tous de l’accompagner. On peut l’aider, parce que ce sont des tâches assez difficiles. La politique, ce sont des tiraillements, des positionnements et un terrain très compliqué.
Depuis un certain temps, votre porte-parole El Hadj Abdourhamane Diouf brille par son silence. Qu’est-ce qui explique cet état de fait ?
Je pense qu’il est à l’étranger.
Comme le leader…
(Rires) Non, c’est qu’il a sa femme qui est là-bas. Je pense que c’est cela.
Mais pour quelqu’un qui est appelé à porter la parole de Rewmi, il y a souvent des problèmes d’intérêt national qui sont souvent soulevés…
La commission communication, qui était mise sur pied par Idrissa Seck, était très composite. Elle était composée d’Abdourahmane, de Thierno Bocoum, de Me Nafissatou Diop, moi-même, Thiongane et nous tous. On a la possibilité de nous relayer. Il ne faut pas lui tenir rigueur de cela, sa famille est à l’étranger. C’est assez compréhensible.
Est ce que le budget de 2014 est varié par rapport à celui de 2013 ?
Le budget 2014 est un budget de consolidation, nous avions optés pour consolider certains acquis, mais également à promue dette, aujourd’hui nous savons que les problématiques demeurent, comme les ordures.
Mais en attendant que l’appui de l’Etat arrive, nous avons également commandé un certain nombre de moyens logistiques comme les tracteurs et naturellement la réalisation un peu de nos bennes et dans le domaine de l’éclairage public. Il y a aussi la clôture de l’essence électrique et l’extension de réseau.
Pour ce qui est des investissements aussi dans d’autres secteurs, nous y sommes. Pour ce qui est des dettes, nous avions une ardoise quand même assez salée auprès de l’Agence de développement municipal, l’Adm.
L’Adm donc nous réclame cette année parmi de 256 millions donc au compte donc des 3 milliards 200. Et sur les 3 milliards 200, la mairie rembourse les 614 millions et les 2,6 milliards sont un don. Nous devons payer 11 millions par mois, c’est ça que nous allons essayer de respecter.
Les autres dettes, il y a le dernier versement du Pac qui est un programme d’appui aux communes qui devait servir à réaliser le marché central de Thiès. Donc nous avions une ardoise de 7 millions qui va être accrue certainement après l’approbation du budget. Pour le reste, c’est d’autres dettes récurrentes qu’on va essayer de payer.
Pour le budget 2014, on connaît les grandes tendances. Sinon pour les recettes nous avons pu trouve un compromis avec les commerçants du fait que des ambulants ne payaient pas.
Mais le plus grand handicap de la municipalité, c’est au niveau de nos impôts. Les gens - j’ai l’habitude de le dire - ne paient pas l’impôt, du fait simplement d’une négligence ou d’un manque de civisme. Nous n’avons jamais voulu, par des mesures de coercition, pousser les gens à payer. Parce que, nous avons voulu promouvoir le dialogue et la concertation.
Mais nous allons prendre des mesures, parce que par exemple sur le foncier, entre 2002 et 2008 il y a eu plus de 10 mille parcelles qui ont été distribuées à Thiès. Chaque année, c’était à peu près 4 et 5 millions payés par dune quarantaine de personnes et les gens attendent d’avoir des moyens pour venir payer.
Pour revenir à Idrissa Seck, quand est-ce qu’il sera de retour au Sénégal ?
Je ne sais pas trop. Tout le temps, il dit qu’il est en route, qu’il se prépare, nous l’attendons.
Vous savez que tout le monde le réclament
Oui. Dans notre parti et dans l’opinion. En tout cas, il en est conscient. Je pense qu’il se prépare, je pense que ce sera pour bientôt.
Thiès a connu la violence. Je pense aussi que c’était le cas avec l’Apr d’ailleurs. Est-ce que ce n’est pas dû à l’enjeu que votre personne constitue au niveau de la mairie. Parce que c’est entre vous Rewmistes, des gens qui sont ambitieux pour prendre la mairie. Est-ce que c’est normal qu’il y ait de la violence ?
Ce n’est pas normal qu’il y ait de la violence, mais c’est normal qu’ils aient des ambitions, c’est justifié. Peut-être des jeunes des hommes politiques comme moi, qui ont peut-être le même profil que moi, peuvent prétendre mais que ça se fasse dans les règles de l’art.
Je condamne fermement la violence, aussi bien dans notre parti ou ailleurs. Pour mois la politique, c’est de l’art ; c’est le dialogue, la concertation, l’ambition, une vision, un engagement citoyen politique auprès de ses camarades de parti. Donc la violence n’a pas sa place là-bas. C’est pourquoi, d’ailleurs, nous avons toujours dit qu’il faut prôner la démocratie et la compétition saine dans les partis politiques.
En tout cas, nous avons un parti qui s’était illustré par sa stabilité pour la paix, la stabilité a été notre cheval de bataille, aujourd’hui quelques perturbations sont en train de faire jour. Mais on pense qu’elles seront très vite maîtrisées.
Et aussi pour le dynamisme à Thiès quand même par rapport aux autres localités, je pense que Thiès n’a pas d’égal dans le parti, Thiès est le cœur du parti. D’ailleurs les gens me disent souvent : ‘’Tu te fais rare à Dakar’’. Mais on ne peut pas gérer le cœur du parti et se permettre de s’éloigner. On est tout le temps agressé, je reçois en permanence des assauts…
Vous vous sentez menacé ? Du parti, je vous dis. Je veux dire par rapport à cette violence-là…
Non du tout, moi je ne me sens pas menacé. Naturellement, les gens ne peuvent pas m’atteindre…
Vous êtes blindé ?
Ce n’est pas une question d’être blindé. Je ne peux pas avoir des responsabilités et ne pas prendre mes dispositions de ne pas faire face à toute forme de violence. Il y a surtout des femmes, la fois dernière, qui ont été atteintes et les personnes du troisième âge. C’est cela qu’il faut arrêter, bannir.
Pour ce qui est du parti je reçois des assauts je reçois des assauts de l’Apr, je veux dire simplement des adversaires, des assauts sur Thiès en permanence. Il faut que je sois là, présent. La ville est très animée, très dynamique. Ça bouge dans tous les sens à tout moment, il faut que le maire soit là.
Avez-vous été démarché par le parti au pouvoir ?
Oh (rires), pas démarché mais moi… Les gens connaissent un peu mes positions, mes principes et mes valeurs politiques. Souvent les gens comme Augustin me taquinent en disant : ‘’Qu’on en rêve mais on n’essaye même pas’’. Je leur dis : ‘’Vous savez ce qui vous attend’’. Ils le disent en me taquinant mais ils savent quand même mes valeurs politiques. Donc aujourd’hui, ils ne peuvent même pas prétendre le faire parce qu’eux mêmes le disent. Je ne l’ai jamais permis à qui ce soit…
Ils l’ont fait avec d’autres qui étaient des numéros 2, pourquoi ils ne le feraient pas avec vous ?
Ils ne peuvent pas le faire avec moi, parce que mon parcours politique et mes valeurs ne sont pas pareils avec ceux des autres. J’estime avoir montré aux gens une constance, ma loyauté et ma fidélité envers Idrissa Seck pour que personne ne puisse prétendre ou avoir le culot de venir me dire…. Et puis une démarche par rapport à quoi ?
La transhumance ?
Pourquoi ?
Pour aller vers les prairies «marron» ?
D’ailleurs, les prairies marrons sont en maturité, qu’elles deviennent pâles (rires)…
Les gens transhument, pourquoi ? L’argent ? Pour des postes de responsabilité ? Moi, je n’en cherche pas. Je ne cherche pas de l’argent, je ne cherche pas…
Pour vous garantir d’avoir la mairie sans opposition.
Mais ils ne peuvent pas me garantir la mairie, il n’y a que les populations qui peuvent me garantir la mairie. Ce n’est pas l’Apr. Parce qu’ils n’ont pas grand-chose là-bas, ce n’est pas l’Apr qui peut m’empêcher d’être maire, les Thiessois peut-être ou au niveau interne.
Le Président Macky Sall fêter ses deux ans à la tête du pays, l’année dernière à la même période Idrissa Seck avait fait une sortie virulente à son endroit. Vous quel est le bilan que vous tirez de ces deux ans ?
Je ne dirais pas que Idrissa Seck a été virulent à l’endroit Macky Sall. Je dirais simplement qu’il a dit la vérité, ce que beaucoup de Sénégalais pensaient, qu’ils n’avaient pas de plateau pour le dire. Je dirais deux ans de tâtonnement parce qu’on nous avait habitué à du ‘’Yonou yokouté’’ ; aujourd’hui on nous parle de Pse.
Macky Sall n’était pas encore prêt ni sur le plan de l’organisation, sur le plan de la vision que de l’approche pour amorcer la Présidence. Il est arrivé sans y être préparé et il a pris deux ans pour essayer. Aujourd’hui avec le Pse, on peut espérer avoir au moins un programme stable, un programme socio-économique sur lequel on peut s’appuyer pour conduire sa gouvernance. Malheureusement, nous avons quand même pris deux ans.
Deux ans perdus ?
Pour moi c’est deux ans, pas perdus mais durant lesquels les acquis n’ont pas été à la hauteur des espérances parce que nous tous nous avions beaucoup d’espoir en Macky Sall, en terme de stabilité politique déjà. Parce qu’avec ce à quoi Wade nous avait habitué, on pensait qu’avec lui on allait avoir un dispositif politique assez stable, une coalition stable avec Idrissa Seck, tout le monde dedans, gouverner ensemble, produire des résultats avec une synergie d’actions d’ensemble dans les idées et les actions. C’est vrai que ça allait créer des résultats assez probants pour les Sénégalais. Malheureusement, ça n’a pas été le cas.
Aujourd’hui avec le Pse, qui est amorcé après deux ans de réflexion avec le club de Paris, c’est salutaire. Mais est-ce qu’aujourd’hui on aura un environnement politique favorable pour sa mise en œuvre ? Parce qu’entre aussi un plan qui est un outil, une planification et sa mise en œuvre on peut avoir la Muraille de Chine. Est-ce que ça sera des résultats dans les 6 prochains mois, dans un an ?
Il fallait sur le plan économique régler les urgences. Les urgences au Sénégal, c’est par rapport à la pauvreté ; la pauvreté est très élevée dans le monde rural. Nous avons nos agrégats. Aujourd’hui, le Sénégal a 70% de sa population qui dépend de l’agriculture familiale. Est-ce que cette agriculture est soutenue pour permettre au paysan sénégalais qui vit à Mbadakhoun, au fond du Sénégal, d’avoir des revenus stables lui permettant d’assurer sa survie alimentaire ? Malheureusement ce n’est pas le cas. Est-ce que la pêche aujourd’hui est réorganisée pour qu’elle puisse quand même jouer son véritable rôle ? Est-ce que le tourisme qui est en balbutiement a été bien planifié pour qu’il puisse jouer son véritable rôle dans le domaine économique ? Est-ce que les mines… C’est vrai qu’on a connu dans ce domaine quelques résultats appréciables avec ce qui se passe avec Dangoté, Mdv à Kédougou. Mais les infrastructures sur lesquelles ils s’appuient tous sont des investissements d’appoints et d’accompagnement à ces projets et ces indicateurs pour pouvoir apporter de la croissance. Malheureusement, c’est un peu l’effet contraire, on se concentre toutes sur les infrastructures alors que derrière on a négligé tous les secteurs porteurs de croissance où de plus-value pour l’économie sénégalaise. C’est un peu un bouleversement des tendances qui est en train d’être fait au Sénégal et c’est quand même assez regrettable.
Qu’est-ce que vous n’avez jamais dit et que vous souhaiteriez nous dire aujourd’hui ? Diattara à l’époque du combat de Idrissa Seck il y avait les Msis (Mouvement de soutien à Idrissa Seck), les Fidel (Forces intégrées pour la démocratie et les libertés), un éphémère parti qu’il avait créé au moment des ennuis judiciaires de Idrissa Seck). Est-ce que vous pouvez nous raconter aujourd’hui un peu ce que vous n’avez jamais dit à propos de ces mouvements de soutien qui ont failli d’ailleurs vous envoyer en prison ?
J’ai peur de dire certaines choses qui peuvent m’envoyer en prison (rires).
Qu’est-ce que vous pouvez dire à propos de ces mouvements ?
A part que j’ai pris des risques qui font que si je le dis aujourd’hui, on risque de m’amener en prison.
Quels sont ces risques ?
Bref, je ne vais pas revenir sur certains aspects mais c’est vrai que ça a été des moments très forts d’engagement patriotique et militant auprès de Idrissa Seck. Parce que nous avions pensé qu’il était en train de subir une injustice et qu’il était un devoir moral en tant que jeune frère de nous engager à ses côtés. On a pris toutes sortes de risques. Je me rappelle souvent quand on rentrait à Thiès après avoir fait mon boulot quand j’écoutais ses Cd je rigolais et je disais : ‘’Si les gens savaient (rires)’’.
Le poste de Pca du Port autonome de Dakar vous a échappé ?
Pas échappé ! Mais comme j’ai dit, je n’en étais pas demandeur donc si cela m’échappe cela ne fait rien.
Donc c’était négocié entre Idrissa Seck et Macky Sall ?
C’était une proposition de Macky Sall.
Et qu’est-ce que qui s’est passé pour que cela revienne à l’Apr ?
Je ne sais pas ! Peut-être que les gens de l’Apr le voulaient plus que moi. Mais ce n’est pas méchant, cela ne m’empêche pas de vivre.
Vous réclamiez à la veille de la Présidentielle de 2000 l’octroi de 2/3 de bourse aux étudiants, aujourd’hui on parle de suppression de la généralisation des bourses. Qu’en pensez-vous ?
Notre combat était un combat de principe. On demandait d’abords la généralisation des œuvres aux étudiants. Parce qu’au moment où on arrivait à l’université, il y avait plus de 50% des étudiants qui n’avaient pas accès au restaurant. C’était notre premier combat de dire qu’il faut que tous les étudiants aient accès au restaurant.
Le deuxième combat était de dire que les étudiants qui réussissent la licence méritent, quel que soit leur parcours même s’ils n’ont pas la bourse entière, 2/3 de la bourse. Parce qu’ils ont réussi un palier important. Nous pensions que tous les étudiants méritaient cette aide et Wade l’a réussi.
Le troisième combat, c’était de dire qu’au niveau des infrastructures, on ne pouvait plus se permettre d’avoir des amphithéâtres où les étudiants passent par la fenêtre pour suivre les cours. On a déclenché la grève, on a mené des négociations avec André Sonko à l’époque ministre de l’Education, Abdou Diouf avait accepté de faire des concessions. Mais on avait estimé, notamment que le projet de l’Ucad 2, c’était tout ou rien. Abdou Diouf avait accepté de financer la première phase et Pierre Goudiaby Atepa était prêt à accompagner. On a dit non ! Et on a maintenu le front !
Quand on a réussi à avoir l’alternance, j’ai moi-même réussi à faire passer le projet de l’Ucad 2 en Conseil des ministres. J’ai soumis à Idrissa le projet et il m’a dit : ‘’Notre devoir moral vis-à-vis de vous c’est de faire en sorte que l’université ait une nouvelle infrastructure‘’. C’est pourquoi quand je fais mon bilan personnel vis-à-vis de l’université, je me dis qu’au moins du fait de ma proximité avec Idrissa Seck, j’ai réussi à faire passer un projet international pour l’université : l’Ucad 2.
C’est des acquis sur lesquels je ne pense pas que Macky revienne. C’est vrai qu’il y a quelques menaces. Mais l’Etat doit résister malgré la pression de lobbys, pour ne pas revenir sur ces acquis. Les étudiants méritent plus de respect et de considération de la part de l’Etat.
Il y a aussi cette actualité qu’est la traque des biens mal acquis, il y a le fils de l’ancien Président qui en est à sa deuxième inculpation et on semble aller vers la clôture de l’instruction. Quel est votre position personnelle sur la traque ?
Sur la traque des biens mal acquis naturellement cela pose un problème de gouvernance et de transparence. En tant qu’acteur politique, je ne peux que réaffirmer une position de principe pour tout acteur politique qui prétend occuper des responsabilités : c’est le principe de la reddition des comptes qui, à mon avis est un principe universel et consacré qu’on doit tous respecter. Seulement au niveau de l’approche donc au Sénégal, il faut reconnaître quand même qu’il y a eu quelques errements.
Ce sont des délits qu’il faut encadrer pour que l’instrumentalisation politique puisse être limitée.
Jusqu’à présent nous avons estimé qu’un an après, l’Etat est encore incapable de montrer aux Sénégalais tout ce qui était reproché à Karim Wade alors qu’ils auraient pu prendre tout le temps pour rassembler les preuves de sa culpabilité. C’est quelques limites de leur approche. Je pense qu’il faudrait à l’avenir prendre toutes les dispositions avant d’en arriver à ce niveau.
Les travaux de la revue du code électoral n’ont pas produit les résultats escomptés. Quelle est la position de votre parti par rapport à cette situation ?
La réalité est que les gens de l’Apr ne sont pas prêts. Nous sommes pour un maintien des compromis politiques trouvés avec les codes successifs et l’organisation des élections à date échue. Pour des raisons politiques, ils sont en train de revenir sur tous les acquis démocratiques de la classe politique sur le mode d’élection.
Ce serait un recul grave que d’éliminer la liste proportionnelle, aussi bien au niveau de la Ville, qu’au niveau départemental tout simplement du fait de calculs politiciens pour éliminer tel ou tel leader politique comme Khalifa Sall ou Idrissa Seck.
A Thiès, ils savent que c’est peine perdue parce que quel que soit le système qu’on va tout rafler. Pour Dakar c’est beaucoup plus compliqué pour Khalifa. Ce qui est injuste d’ailleurs parce qu’on ne peut pas légiférer sur la base d’un parti pris là où on doit le faire pour l’intérêt général. C’est un recul et j’espère que Macky Sall qui a un parcours politique assez atypique, qui a connu tous les crimes politiques avec Wade, qui a connu toutes les injustices, ne doit pas se permettre pour des intérêts particuliers de revenir sur certains acquis. C’est pour l’honneur du Sénégal, de la classe politique.