MENACE D’EFFONDREMENT DE L’IMMEUBLE DE L’APS EN PLEIN CENTRE VILLE DE DAKAR
Il ne faut pas se fier aux apparences de l’immeuble de l’Agence de presse sénégalaise (Aps). Le bâtiment de onze étages, vu de l’extérieur, semble bien résister au temps. Mais à l’intérieur, l’on découvre un bloc de pierres qui, effectivement, menace de s'écrouler. Reportage.
L’Etat a mis à la disposition de l’Agence de presse sénégalaise (Aps) le premier étage de la Maison de la presse, sise sur la Corniche ouest. C’est la fin du calvaire pour la soixantaine de travailleurs qui emprunte quotidiennement l’ascenseur de l’immeuble de 11 étages qui surplombe la Place Washington. Escorté par le ministère de l’Intérieur, à gauche, et l’imposant bâtiment du ministère de l’Economie et des Finances, à droite.
La menace de grève des agents de l’Aps a donc fait son effet. Les travailleurs de l’agence avaient fixé à mercredi prochain le délai au-delà duquel ils allaient "observer un arrêt de travail", s’ils ne sont pas relogés. Ils craignaient pour leur vie. Criant sur tous les toits qu’un jour ou l’autre, ils risquaient de faire l’actualité en se retrouvant écrasés sous les décombres d’un immeuble condamné à l’effondrement.
Ils ont obtenu satisfaction. Mais, on aurait pu croire à une blague, une exagération ou une erreur d’appréciation. Le bâtiment en question porte certes des signes tangibles de vieillesse, mais à vue d’œil il n’y a rien de bien alarmant. Il parait souffrir plus d’un manque d’entretien que de l’usure du temps. Certaines constructions alentours, comme les anciens locaux de la Rts, semblent plus proches de l’effondrement.
Au rez-de-chaussée, le marbre qui couvre les murs et la relative propreté des lieux, poussent au doute. Il faudra prendre les escaliers, éviter l’ascenseur, un véritable trompe-l’œil, pour se rendre compte de la réalité hideuse et flippante. Le préfet de Dakar a été bien inspiré de donner l’ordre d’évacuation du bâtiment.
Premier étage, cabinet du directeur général. Boudez le couloir qui mène au saint des saints et tournez à gauche. Faites quelques pas jusqu’au fond en laissant promener votre regard tout autour. L’endroit est rustique et crasseux. On aurait cru à un ancien fort abandonné. Murs fissurés. Installations électriques ainsi que de plomberie datant d’une autre époque. Cage d’ascenseur hors d’usage condamné. Dalle tapissée de poussière et, à certains endroits, d’ordures…
En revenant sur nos pas pour prendre l’escalier menant au deuxième étage de l’immeuble, cet après-midi, vendredi 5 juillet, nous tombons sur le patron de l’Aps. Thierno Birahim Fall est pressé.
«Je vais de ce pas visiter la Maison de presse, mais on peut se voir rapidement», propose-t-il. Il tourne les talons, traverse le couloir, pénètre dans le bureau de son assistante, puis dans le sien et se pose sur le salon de la grande pièce au décor sobre. Assis sur le rebord du fauteuil et sans se départir du cartable qu’il tenait de sa main droite, Fall explique que l’état de délabrement de l’immeuble exige un déménagement rapide. Que celui-ci se fera en deux temps, sans que le fonctionnement de l’agence n’en soit perturbé.
L’entretien a duré moins de 15 minutes. Le directeur de l’Aps se lève, nous raccompagne, repasse dans le bureau de sa secrétaire, tombe sur deux visiteurs, leur demande, avec courtoisie, de repasser une autre fois et descend les escaliers.
Nous prenons le sens opposé. Direction, le deuxième étage. Les couloirs sont déserts, les travailleurs de l’Aps sont en Assemblée générale. L’ordre du jour : la situation de l’immeuble. La note d’information est affichée sur le mur peint en beige.
Au fond d’un couloir, des escaliers étroits et circulaires mènent à l’arrière de l’immeuble. A cet endroit sale et peu éclairé, lugubre, la cage d’ascenseur hors d’usage est dépourvue de portes. Au fond de l’ouverture, de l’eau est mêlée à des détritus de toutes sortes. Ce qui constitue un bon lit pour les moustiques, d’où monte une odeur nauséabonde. Le spectacle est irréaliste.
On ose à peine croire que la direction de la Communication est toujours logée deux étages au-dessus et que de prestigieux services de l’Etat avaient, jusqu’à l’année dernière, leur siège dans ce bâtiment fortement délabré. Il a fallu la venue d’Abdou Lô, l’ancien ministre de la Communication et des Télécommunications et actuel directeur de l’Artp, pour que les services du département déménagent et que l’état de l’immeuble soit une question d’actualité.
L’affaire vient de connaître une issue heureuse avec le relogement imminent des personnels de l’Aps. Une perspective qui marquera la fin d’une histoire de plus de 20 ans. L’agence ayant installé ses quartiers dans ses futurs anciens locaux dans les années 90. Reste maintenant à connaître le sort qui sera réservé à l’immeuble après que ses derniers occupants auront vidé les lieux.
Réfection ? Destruction ? Le dernier mot revient aux ingénieurs du génie civil dont le rapport sur l’état de l’immeuble est attendu par les pouvoirs publics.