MYSTIQUE OU SATANISME
Si les révélations du lutteur Eumeu Sène sont vraies, on vient de franchir un pas dans l'abject. Profaner la tombe de la maman d'un adversaire pour gagner un simple combat de lutte fait froid dans le dos

"Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan. L'invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre." (Charles Baudelaire).
Si les révélations du lutteur Eumeu Sène sont vraies, on vient de franchir un pas dans l'abject. Profaner la tombe de la maman d'un adversaire pour gagner un simple combat de lutte fait froid dans le dos. Car, dans toutes les civilisations et de tout temps, la mort a toujours été sacrée.
Aujourd'hui, si on en arrive à cette extrémité, c'est qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette société. On ne se donne plus de limites. On bascule dans l'animalité. Dans une société sénégalaise éprise de valeurs cardinales, cette bassesse n'a pas de sens. En plus de l'incompréhension qu'un tel acte suscite, il y a eu lieu d'interroger certaines pratiques qui ont cours depuis maintenant trop longtemps et qu'on laisse passer, dans le monde de la lutte.
Et le dernier face-à-face entre Eumeu Sène et Balla Gaye II est édifiant à ce sujet. Car, le débat a tourné autour du mystique. Qui a prié pour qui ? Qui compte le plus de charlatans dans ce domaine ? Qui compte le plus de soutien mystique en Casamance, en pays sérère etc. ?
Un débat qui n'a pas de sens et qui témoigne de l'importance prise par les pratiques mystiques, depuis l'avènement de la sur-médiatisation de la lutte et de ses pratiques ésotériques. Aujourd'hui, les acteurs de la presse, et au premier chef les télévisions, sont interpellés.
Car ce sont eux qui véhiculent des images qui ne devraient jamais être portées au grand public. Notamment, les "cumikaay" exposés à la vue de tout le monde. D'ailleurs, dans les émissions de lutte qui ont essaimé, des rubriques sont spécialement réservées au mystique, en faisant fi des répercutions que ces images ont sur l'inconscient des populations.
Dans cette surenchère verbale observée au niveau des acteurs de la lutte, on assiste aussi à un discours ethniciste qui ailleurs, notamment en Côte d'Ivoire, au Rwanda, a conduit à des drames. a
Des pratiques d'un autre âge sont remises au goût du jour, au nom de la quête d'une gloire vaine et d'une cupidité qui ne dit pas son nom. Il est temps que les citoyens épris de la foi en Dieu se lèvent et combattent ce fléau qui menace notre commun vouloir de vivre ensemble.
Dans la mesure où ces pratiques mystiques voire sataniques ont pris trop de place dans nos vies. Les chefs religieux sont interpellés. Car, cette force, ce ciment que constitue la religion pour le Sénégal s'étiole au profit d'une irréligion qui sape les fondements de notre société.
Bidew Bou Bess, dans une de ses chansons, n'a pas tort de s'écrier : "Wala wala book gnoun fou gnou dieum ? Wala wala book, xërëm la gnou guëm" (Mon Dieu, où est-ce qu'on va ? Nous ne croyons qu'aux pratiques mystiques)..