PARI REUSSI
Macky Sall a tenu et réussi son sommet de la Francophonie, XVe du genre depuis une trentaine d’années. Participation massive de chefs d’Etat et de gouvernement, tenue impeccable de la rencontre de Dakar, hommage élogieux difficilement égalable rendu au Secrétaire général sortant Abdou Diouf, en sa terre natale du Sénégal, passage du témoin à Michaëlle Jean du Canada, nouveau vecteur de paix et actrice du développement pour la Francophonie, etc. Dakar a montré encore une fois que le Sénégal savait bien organiser et répondre présent, et de quelle manière, aux grands évènements. Une expérience fort riche que notre pays pourra bien transmettre à Madagascar, organisateur du XVIe Sommet en 2016.
Seule petite fausse note qui ne gâche en rien le succès éclatant du Sommet de Dakar : le comportement du Président guinéen Alpha Condé. C’est une évidence que ses relations avec le Président Macky Sall ne sont pas des plus cordiales. Loin s’en faut ! Poignée de main froide avec le président sénégalais et son épouse, absence d’accolade… Tout le contraire de son comportement avec Abdou Diouf et Amath Dansokho. Présent malgré lui à Dakar, Condé aurait pu simplement s’abstenir de venir à cette grande rencontre de la Francophonie. Macky Sall et lui n’ont jamais été des amis et ne le seront jamais. La fermeture de notre frontière avec la Guinée pour barrer la route au virus Ebola n’a fait qu’envenimer des relations qui n’ont jamais été excellentes entre les deux hommes.
Après la Francophonie culturelle et politique, voici venu le temps de la Francophonie économique. Les pays ayant en commun la langue française auront fort à faire pour contrebalancer l’hégémonie de la langue anglaise. Langue du monde, langue des sciences et des techniques, langue des jeunes, langue de la première puissance mondiale, l’anglais est devenu incontournable alors que le français perd dangereusement du terrain. En dehors des quelques anciennes colonies françaises, qui parle la langue de Molière en Afrique ? En Afrique centrale, un pays francophone par excellence, le Gabon, a décidé depuis quelques années de donner à l’anglais toute la place qu’il mérite dans l’enseignement.
Mais la Francophonie, ce n’est pas que la langue. Ce sont 700 millions d’habitants, un PIB de 7200 milliards de dollars en 2012. Une puissance ! A condition toutefois que la libre circulation des biens et des personnes soit une réalité tangible et facilite les échanges entre les peuples. Un visa facilement accessible serait un puissant levier pour les 700 millions de francophones disséminés à travers les cinq continents.
Outre le visa, le devoir de mémoire serait une excellente chose pour huiler les relations entre pays francophones, bastion qui sert plus la France que ce pays ne les sert. Pour la première fois, les présidents français et sénégalais réunis ont rendu hommage aux tirailleurs sénégalais tués le 1er décembre 1944 à Thiaroye. Par honnêteté intellectuelle, le Président français parle d’«évènements épouvantables» et «inoubliables » prisonniers de guerre revenus en Afrique et qui réclamaient leurs arriérés de solde et d’indemnité que la France rechignait à leur verser. Après avoir «de guerre lasse» laissé «s’exprimer leur exaspération», ils seront plus de 70 à y laisser leur vie.
A travers ce devoir de mémoire, hier à Thiaroye, François Hollande aura ainsi réussi à faire mieux que De Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterrand, Chirac et Sarkozy.