PATTE D’OIE BUILDER’S, DES ORIGINES A NOS JOURS
QUAND LA PATTE D’UNE OIE INSPIRE LE NOM D’UNE VILLE

Une patte d’oie et une société immobilière américaine du nom de Builder’s International. Voilà qui ont donné leur nom à cette cité qu’est la Patte d’Oie Builder’s et qui est très connu des Dakarois. Nous sommes allés revisiter l’histoire, à la découverte de cette cité-ville de 40 000 habitants aujourd’hui dans ce premier jet. La suite ce sera demain
Située entre les communes des Parcelles assainies et de Grand-Yoff, la cité Patte d’Oie Builder’s cache, dans sa petite superficie, une histoire riche dont les origines sont diverses et variées. La cité doit son nom à la forme des pattes de l’oie classée dans la famille des palmipèdes à vue aérienne et au nom de la société immobilière américaine Builder’s, propriétaire des premières maisons de la cité. C’est, en effet, la contraction des deux noms qui a donné à cette cité le nom de Patte d’Oie Builder’s.
D’après le délégué de quartier, El Hadji Amadou Mactar Tall, cette histoire remonte à 55 ans. Selon ce vieux âgé aujourd’hui de 75 ans et originaire de la région de Thiès, la création de cette cité découle de la décision prise en 1961 par le Congrès des Etats Unis d’Amérique faisant suite à un décret de législation et consistant à porter une assistance aux nations en voie de développement dans le domaine des logements à loyer modéré.
Une cité née d’un programme américain de logements sociaux de 1961
Le programme est fait d’un commun accord avec le pays hôte qui est le Sénégal et un garant privé «Builder’s international» de New-York. Sur la base donc de cet accord, le gouvernement américain agissant par l’intermédiaire de l’Usaid (Agence américaine pour le développement internationale) a ainsi procédé au lancement du projet de construction de 800 logements.
La réalisation d’une partie des 800 logements signe l’acte de naissance de la cité Patte d’Oie. La Patte d’Oie est bâtie sur une zone occupée par les dunes. Les habitants des 26 premiers logements étaient confrontés aux vents de sable. «Il n’avait qu’une seule route goudronnée avec Langston Hughes, le reste c’était du sable. Non seulement le sable gênait et la prolifération des moustiques perturbait la quiétude des premiers habitants de la cité», s’est souvenu le délégué de quartier qui a, d’ailleurs, constaté jusqu’à nos jours la présence de plus en plus des moustiques dans la cité. A l’origine, à Patte d’Oie, renseigne El Hadji Amadou Mactar Tall, il y avait un centre d’épuration des eaux usées. Ce qui fait que les eaux usées étaient recyclées dans une usine juste au niveau des Niayes à travers une sorte d’égout qui est proche des habitations. De ce fait, l’eau usée était transformée et refoulée à l’intérieur de la Patte d’Oie Builder’s pour l’arrosage des espaces verts. A l’époque, raconte le vieux, les premiers habitants, dès leurs installations, confondaient quelques fois les robinets destinés à l’arrosage des plantes à ceux de l’eau potable.
Les 26 premiers logements sortis de terre en 1969
Dans les détails, le délégué de quartier d’indiquer que la conception, l’aménagement, la réalisation et le suivi des travaux ont été assuré, en 1968, par Builder’s International. L’année suivante, c’est-à-dire en 1969, a-t-il poursuivi dans ses explications sur l’histoire de la cité, les 26 premiers logements qui sont sortis de terre ont été totalement achevés. Leur livraison s’est faite concomitamment avec le bitumage de la première artère de la nouvelle cité qui venait de voir le jour à quelques kilomètres de la ville. Cette artère portera, plus tard, le nom de Langston Hughes et est, aujourd’hui, appelé «Bureau» par les 40 000 habitants de cette cité devenue une véritable ville aujourd’hui. La première cité bâtie de la commune d’arrondissement de la Patte d’Oie est située, actuellement, entre l’autoroute Seydina Limamoulaye, la route de l’aéroport Léopold Sédar Senghor et la nationale menant à Pikine. Cet emplacement particulier a la forme d’une patte d’oie, d’où le nom de la cité.
Les étapes du processus qui ont jalonné la création de la cité, El Hadji Amadou Mactar Tall garde bien dans sa mémoire les détails. «Les 26 premiers logements ont été livrés le 10 mars 1969», se rappelle le vieux. Au passage, il faudra signaler que le premier chef de quartier de la cité Patte d’Oie Builder’s s’appelait Cheikh Tidiane Ndiaye.
De l’installation de la Patte d’Oie Builder’s à nos jours, plusieurs maires se sont succédé à la tête de cette commune. C’est Moussa Guèye qui est le premier maire à diriger la commune d’arrondissement de la Patte d’Oie, en 1996. Ensuite sont élus, successivement, Tidiane Diallo, Ibrahima Diamé et Banda Diop, l’actuel maire. Le périmètre communal s’étend de la cité Keur Damel, à la cité Keur Gorgui, aux alentours du stade Léopold Sédar Senghor (ex- Amitié), en passant par Grand-Médine, la cité de la Patte d’Oie, la cité des Impôts et Domaines, la cité Al Amal, la cité Bceao, la cité Soprim et la cité Soprim Extension. S’expliquant sur les raisons de cette extension, Bamba Diop de souligner que c’est parce que «la commune étouffait».
PATTE D’OIE BUILDER’S : La cité où les villas portent des noms d’oiseaux
Une cité-ville bien atypique. Voilà ce qu’on pourrait dire de la Patte d’Oie Builder’s. En effet, en plus d’avoir tiré son nom de la patte d’une oie, cette cité a la particularité de voir toutes ces villas portées des noms d’oiseaux.
S’il y a une caractéristique qui est spécifique à la cité de la Patte d’Oie Builder’s, ce sont les noms que portent les maisons qui la composent. Dans cette cité, vieille d’environ de 46 ans, les premières villas portent des noms d’oiseaux. Ainsi, au niveau de cette cité-ville, la plupart des maisons qui disposent de trois chambres à coucher sont appelés «Thioker» ou perdrix en français. Les raisons qui motivent la corrélation de ces maisons à ce nom d’oiseau s’explique du fait que les «Thioker» ont trois chambres à coucher. À côté, il y a les maisons qui ont entre deux et trois chambres qui portent le nom du perroquet «Coy», au moment où d’autres qui comptent également le même nombre de chambres portent le nom de «Diamb Diop», le paon en français. Quant aux villas composées de quatre chambres, elles sont appelés «petaakh», c’est à dire les tourterelles. D’après les nombreux témoignages recueillis chez les premiers habitants de cette cité, le choix d’attribuer les noms d’oiseaux à différentes catégories de maisons s’est fait sciemment.
Maintenant, dans chaque type de maison, il y a des blocs. Par exemple, le bloc 26. Dans ce bloc, il y a quatre logements, raison pour laquelle en ce qui concerne l’identification on dit A26 ou bien B26… Il y a également des blocs qui ont 8 logements.
Les habitants de Patte d’oie, des pattes doliens
Conçue par les Américains dans les années 60, tout au début de l’indépendance du Sénégal, dans le cadre d’un programme de logements sociaux, cette configuration de la cité-ville de 800 villas d’alors est maintenue jusqu’à présent.
Il faudra aussi souligner que les habitants de la Patte d’Oie sont appelés les pattes doliens. Une appellation bien originale qui est bien ignorée par bon nombre de Dakarois et même d’habitants de ce quartier très attaché à la faune et aux oiseaux de par son nom et son histoire qui a connu une expansion fulgurante ces dernières décennies