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FRANCOPHONIE ET DÉMOCRATIE
Il y a 25 ans, la Francophonie épousait une forme plus politique. Aujourd’hui, certains pensent que cette ossature lui donne le droit et surtout le devoir de s’impliquer davantage dès qu’il s’agit du non-respect de principes démocratiques, la violation de la Constitution par exemple. Dans des situations pareilles, elle ne devrait pas se taire. C’était là l’un des sous-thèmes du Colloque sur la Francophonie qui prend fin ce jour, vendredi 31 octobre.
C’est le 1er Sommet de Dakar, en 1989, qui «scelle la vocation politique de la Francophonie (…) c’est son acte de naissance politique». Même si, selon le président des cinéastes sénégalais associés, Cheikh Ngaïdo Bâ, les acteurs culturels, eux, n’ont jamais pensé qu’il puisse en être autrement, parce que ce sont des chefs d’Etat qui ont signé le traité de Niamey en 1970. Pour Christine Dessouche, Maître de Conférences Honoraire de l’Université de Paris I, Senghor lui-même l’avait compris, «le projet initial de la Francophonie était d’envergure politique ».
En 1997, à Hanoi au Vietnam, l’organisation se dote même d’une nouvelle Charte et élit un Secrétaire général, en la personne de l'Égyptien Boutros Boutros-Ghali. La Déclaration de Bamako (2000) qui suit, est un «texte normatif et de référence» sur la démocratie, les droits et les libertés dans l’espace francophone. Pour y parvenir, explique l’avocat Robert Dossou, ancien président de la Cour Constitutionnelle au Bénin, il aura fallu travailler pendant 10 ans.
Professeur de Droit public, Albert Bourgi, qui interroge le concept de démocratie, se demande si celle-ci se limiterait uniquement à la tenue d’élections. Sans vouloir citer aucun pays, ni aucun contexte politique, il affirme pourtant que dans ce domaine, la Francophonie «n’a jamais été un modèle», elle qui a parfois «labellisé des élections qui n’ont été que des farces».
Ce que dénonce aussi Cheikh Ngaïdo Bâ, c’est la politisation d’une institution qui souffre d’un manque de solidarité francophone, avec un silence parfois complice, pendant que dans certains pays, on touche à la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Robert Dossou pense également que la Francophonie ne devrait pas se tenir éloignée de la «vague démocratique», ne serait-ce qu’en insistant davantage sur le respect de la durée des mandats présidentiels.
Les pays francophones toujours, devraient avoir une vision commune en matière de paix et de sécurité, d’immigration aussi. La Francophonie devrait ainsi parvenir à franchir les obstacles liés à l’harmonisation et à l’application des conventions internationales. C’est l’avis du président du Conseil sénégalais des droits de l’Homme, Alioune Tine, dont la communication a été lue, en son absence, par Moussa Daff, directeur de l’Ecole Doctorale Arts, Cultures et Civilisations (ARCIV).
Le Colloque sur la Francophonie a aussi été l’occasion, pour certains, de témoigner de la relation, qu’elle soit personnelle ou professionnelle (ou les deux) qu’ils ont entretenue ou entretiennent encore avec le Secrétaire général sortant de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), Abdou Diouf. Un homme dit-on, à la fois humble et courtois, d’une grande générosité et d’une intelligence humaine. Un homme aussi avec une certaine volonté de consensus, qui «aura mieux fait connaître la Francophonie».