POUR QUE LES MAIRES EN PLACE SOIENT SUR PLACE
La déchéance électorale des partisans du président de la République lors des locales dans les plus grandes métropoles fait suite, selon mon humble avis, à une erreur d’appréciation sur l’électorat sénégalais. La bourde que malheureusement nos dirigeants commettent jusqu’à présent, est d’instaurer un règne sans partage, que certains défendent par l’hypothèse selon laquelle il faut doter le Président de tous les moyens afin de lui faciliter sa gouvernance.
Le contexte sociopolitique est constitué de sorte qu’il est difficile voire impossible de gagner une élection sans faire de coalition. Les Locales présentent une certaine spécificité dans la simple mesure où les populations peuvent directement interagir sur leur destin, en choisissant le candidat qui présente le mieux à leurs yeux, le profil pouvant porter leur projet de société.
Ce choix semble être édicté par un contrat de confiance, qui lie les habitants à leur maire et qui se traduit par une connaissance réelle de leurs préoccupations, contribuant nécessairement à soutenir leur prise en charge.
Et cet exercice ne peut être rendu possible qu’en consacrant exclusivement son temps, son savoir-faire et son énergie aux affaires de la cité.
Contrairement à certains édiles (ou maires fantômes) qui ne se présentent dans leur localité qu’à l’occasion des cérémonies officielles, pour sans doute attester de son aspect solennel.
C’est pour ainsi dire que les habitants aspirent à un maire sur place pour traiter par pièces leurs problèmes afin de garantir leurs résolutions définitives. Illustration ne saurait être plus parfaite que l’assertion de Napoléon : «On peut certes gouverner de loin, mais on ne peut qu’administrer de près.»
Le nouvel attelage gouvernemental va à rebrousse-poil de la théorie de Bonaparte, en ce sens que tous ceux qui ont remporté leur localité ont aujourd’hui dans leur majorité, des charges ministérielles. Une manière pour le chef de l’Etat de récompenser positivement ces nouveaux maires et par ricochet, de se séparer des perdants. Comme pour lancer un message sans équivoque aux membres de sa composante politique, que je décrypte en ces termes : «Je ne m’accompagne qu’avec les gagnants.»
J’ai bien peur qu’en opérant ainsi, le Président Sall n’hypothèque ses chances d’être réélu aux prochaines joutes électorales, pour la simple raison que les maires qui ont été nommés ministres consacreront l’essentiel de leur temps à l’accomplissement des obligations gouvernementales au détriment des responsabilités locales.
Par ce fait, les ministres-maires vont être éloignés de leurs bases ce qui pourrait éventuellement conduire à une négligence quant à leurs préoccupations quotidiennes, pouvant inéluctablement conduire au vote sanction.
Le choix stratégique du chef de l’Etat qui consiste à nommer les maires de grandes villes à des fonctions ministérielles, aux fins d’étendre sa politique à la base ne semble pas convaincre plus d’un.
Le Président Sall gagnerait, selon moi, à les laisser s’occuper principalement de leurs localités respectives, en les accompagnant de moyens financiers conséquents. C’est en cela que les localités seront ragaillardies puisqu’elles auront à leur tête des autorités sur place, qui assumeront pleinement les responsabilités qui leur sont assignées.
Il est grand temps pour nous au Sénégal, d’avoir des maires rien que pour nos localités.