QUAND KARIM SE PERD DANS SES EXPLICATIONS
TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS
Si le procès de Karim Meïssa Wade est parti pour tirer en longueur, selon des juristes, force est de reconnaitre qu’il ne sera pas facile de démêler l’écheveau. En effet, depuis le début de la traque des biens mal acquis lancée par le nouveau régime, l’ancien ministre du “ciel et de la terre” entretient le mystère sur sa personne, son parcours, son patrimoine
Les prémices de l’enquête ont d’ailleurs laissé entrevoir un procès à multiples rebondissements, avec un ministre avare en révélations.
Pour d’aucuns, Karim Wade aurait manifesté une réelle volonté de ne pas coopérer. Il a livré, lors des interrogatoires, soit des réponses évasives, soit des informations qui ne cadrent pas toujours avec la vérité des faits.
Néanmoins, le procès-verbal de la Section de Recherches gendarmerie nationale permet de dresser le profil d’un ancien ministre d’Etat assez particulier. Il révèle lui-même que “la particularité des métiers qu’il a eu à exercer l’exhorte à la confidentialité”.
Autre confidence, il disait : “j’ai eu à travailler avec des entités de groupes, dans le métier que j’exerçais à l’époque, nous avons des engagements de confidentialité extrêmement restrictive”. A-t-il fini par s’adosser à cette déformation professionnelle ? Point d’informations saillantes de sa part !
Il oublie l’année d’obtention de son Bac
L’ex-super ministre est un expert en finances qui n’a pas dépassé, comme niveau d’études, le Dess. Toutefois, lors de ses interrogatoires, il a eu du mal à se souvenir de l’année où il a obtenu son baccalauréat. Sommé de décliner son parcours académique, une première fois, le fils d’Abdoulaye Wade déclare avoir décroché son baccalauréat en 1996, au “collège Saint Martin de France en Pantoise”.
Mais, lors de l’audition suivante, il a cafouillé sur la question. “Est-ce que vous ne vous êtes pas trompé sur la date d’obtention de votre baccalauréat ?”, lui ont finalement demandé les enquêteurs. Il a répondu : “Je vous communiquerai ces informations plus tard”.
Poursuivant ses explications, Karim Wade a souligné qu’il a eu le privilège, avant la fin d’une formation pour l’obtention d’un Dess en ingénierie financière, en 1990 à Londres, de “travailler dans une banque d’affaire dénommée Sg Warburg”. Il gagnait, à l’époque, quinze mille francs français (15 000 F), par mois, soit 1 500 000 de FCFA. Dire qu’il était simple étudiant.
“Avant 2000, j’avais un patrimoine de 8 milliards de FCFA”
Dubitatifs face à des explications qui ne leur semblaient pas “rationnelles”, les enquêteurs lui ont demandé de les éclairer par rapport à son “cursus obscur”. Et Karim de répondre : “j’ai obtenu le bac en 1986, en France, puis le Dess durant 5 ans jusqu’en 1989 et j’ai soutenu durant la même année et, en parallèle, je travaillais à Warburg Bank avec un contrat à durée indéterminée”.
Toujours devant l’invraisemblance du fait qu’un étudiant puisse décrocher un CDI à la banque Warburg de Paris, avec un salaire aussi important, les enquêteurs ont insisté. Karim Wade leur a livré ses éléments de réponse :
“J’ai été analyste à la banque de Warburg de Paris où en parallèle, j’ai fait mon année de Dess et de maitrise en même temps. Je bénéficiais au même moment de mon salaire de 15 000 FF composé de salaire et de gratification”.
Ensuite, invité à se prononcer sur sa fortune acquise avant 2000, avant que son père ne conduise les rênes du pays, Karim Wade a insisté sur son poste de directeur associé, “avec une compétence géographique qui, disait-il, m’a permis de rayonner un peu partout dans le monde avec une responsabilité d’une dizaine de personnes, je gagnais 25 000 F à 30 000 F français”.
Aussi, affirmait-il, “mon patrimoine avant 2000 était de 8 milliards de FCFA. En dehors de cette somme, j’avais des biens immobiliers. Ce montant provient de mon patrimoine immobilier. J’avais également des activités parallèles, des activités économiques comme dans le secteur minier. Je travaillais dans de grandes sociétés dont je ne peux révéler les noms, parce que je suis lié à elles par des accords de confidentialité”.
Mais, interpelé lors d’une troisième audition, Karim Wade avait apporté ces précisions :
“Je vous prie de noter que contrairement à ce qui a été dit, je ne possède pas les milliards dont on parle. J’aimerai bien que vous me montriez ces milliards dont on parle. Je vous ai dit que j’avais un patrimoine de 8 milliards, avant 2000, et que je ne possède pas les milliards qu’on me prête. J’attends toujours la réponse de mes conseillers n’ayant pas pu les consulter.”
Pourtant, des confrontations avaient permis d’évaluer le montant de son patrimoine, jusqu’en 2002, à 5 222 000 de F CFA “sans y défalquer (se)s dépenses durant cette période”. “Comment pouvez-vous expliquer cet écart ?”, lui avaient demandé les enquêteurs. Comme réponse, l’ex-ministre avait dit :
“d’abord, mon salaire ne constituait qu’une partie de mes revenus. Comme j’ai pu vous l’expliquer, j’ai également bénéficié de revenus complémentaires sous forme de bonus options, de pensions, d’autres revenus… Mon salaire a connu alors une forte progression”.
En outre, il a toujours été dans l’incapacité de présenter ses attestations de revenus quand il était employé de banque à Warburg. “Je ne les ai pas ici avec moi. Il faudrait que je vérifie qu’elles sont toujours en ma possession. Je devrai prendre contact avec mes conseillers juridiques et fiscaux”….
“Je vous prie de fournir des preuves” Il ressort des différents procès-verbaux que des contradictions ont émaillé certains propos de l’ancien conseiller spécial du président de la République jusqu’en 2004, qui a été président de l’Anoci, en 2009, puis ministre en charge de la Coopération internationale et des Transports aériens. Karim Wade a souvent pris le soin de se référer à ses conseillers juridiques pour des compléments d’informations.
L’ex-super ministre qui souligne n’avoir été actionnaire dans aucune société au Sénégal, avant 2000, et ne disposant aussi pas d’aéronef, n’a pas été aussi prolixe, quand il s’est agi d’apporter des informations sur des versements effectués sur son compte.
Karim Wade s’est braqué et demandé aux enquêteurs de fournir les preuves de leurs “accusations”. Par rapport à ses supposés biens planqués à Monaco, “ma réponse est claire. Je vous demande de me fournir des éléments relatifs à ces informations”. Il a aussi nié, dans l’ensemble, l’existence de comptes éparpillés un peu partout dans le monde.
Confronté à Patrick William par rapport à des baux de l’Etat qui lui auraient été attribués, il a tout nié en bloc. Lorsque Patrick a soutenu que “c’est Karim Wade qui (lui) a demandé de se rapprocher des services des impôts et domaines en la personne de Monsieur Tahibou Ndiaye, Directeur du Cadastre de l’époque, pour la signature des actes.
Wade-fils a répliqué : “Je ne suis jamais intervenu auprès de quelque service que ce soit pour l’octroi de terrains”……. Idem pour son implication dans la gestion d’An Média.
“J’avais été sollicité par Vieux Aïdara et Cheikh Tidiane Ndiaye pour les aider. Et mon intervention s’est limitée à leur organiser un déplacement au Maroc pour rencontrer et développer un partenariat avec la chaine de télévision marocaine….. “