QUATRE DÉTOURNEMENTS DE PRÈS DE 2 MILLIARDS
GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET RÉDDITION DES COMPTES DE 2008 À 2013

Avant de rejoindre son poste à la tête de l’Office national de lutte contre la corruption (Ofnac), Nafy Ngom Keïta, l’ancien Vérificateur général du Sénégal, a présenté son rapport au président de la République. Ce document, qui couvre la période de janvier 2008 à juillet 2013, est le premier rapport de l’Ige sur l’état de la gouvernance et de la reddition des comptes au Sénégal. L’Ige a recouvré plus de 64 milliards.
C’est un vœu pieux longtemps entretenu par Macky Sall, alors Premier ministre, qui vient d’être exaucé. L’idée était de permettre à l’Ige, institution supérieure de contrôle, d’accoucher d’un rapport qui participera à la bonne gouvernance administrative et financière. Et pour Nafy Ngom Keïta, ce rapport, «soutenu et parrainé par Macky Sall en 2005 et 2007», permet de rendre compte aux citoyens du travail de l’Ige jusqu’alors considérée comme un service secret de l’Etat. A la suite d’une série de réformes dont la création du poste de Vérificateur général, l’institution d’un mandat de 7 ans non renouvelable, l’obligation pesant sur lui de présenter un rapport annuel au président de la République, un pas de géant venait d’être franchi.
Cependant, Nafy Ngom Keïta avertit : «Ce n’est ni un rapport d’audit ni un rapport de vérification, c’est d’abord un instrument de reddition de comptes de l’Ige.» Ayant toute la latitude d’exercer son contrôle, l’Ige a produit «408 rapports d’inspection, d’audit, d’enquête de vérification et d’études, 408 notes de transmission, 112 notes d’observations sur divers projets de textes législatifs et réglementaires soumis à son appréciation et 82 comptes rendus d’activités.» Depuis sa création en 1960 sur les cendres de l’Inspection générale des affaires administratives de l’Aof, l’Ige a produit plus de 3 800 rapports.
Les interventions de l’Ige génèrent une valeur ajoutée qui constitue une contribution à la promotion de la bonne gouvernance. Cette valeur ajoutée est aussi bien monétaire que non monétaire. La valeur ajoutée monétaire consiste dans la réintégration de fonds dans les caisses de l’Etat, lesquels autrement seraient perdus comme le remboursement de sommes, de subventions indûment perçues, le retour d’excédents de facturations, de droits d’enregistrement, de Tva ou autres impôts non payés. Le déclenchement d’informations judiciaires avec quatre dossiers de détournements ou de dissimulations qui ont pu atteindre un 1 728 768 950 francs Cfa, lesquels montants, sans les investigations qui ont permis de les déceler, auraient sans aucun doute augmenté progressivement.
Près de 2 milliards de détournements
Au total, par ses investigations, compte tenu des ressources mises à sa disposition, pour chaque franc Cfa, l’Ige a rétrocédé à l’Etat un potentiel de recouvrement de fonds, lesquels, autrement, seraient perdus, détournés, utilisés indûment ou abusivement, pour des montants de 12 087 000 francs Cfa, 8 321 716 582, 1 771 988 589 entre 2005 et 2008. Globalement, le retour sur investissements du fait de son coût a été de 15,10 ; 9,2 ; 1,66 et sur la période indiquée, au total, pour chaque franc Cfa mis à sa disposition, l’Ige a rétrocédé à l’Etat la possibilité de recouvrer 8 autres francs. La recommandation N°4 issue du rapport de l’Ige sur une enquête relative aux conditions de concession du terminal du Port autonome de Dakar à Dp World a donné une valeur ajoutée monétaire de 24 500 000 000 francs Cfa effectivement encaissés par le Trésor public. Au total, la valeur ajoutée monétaire issue des travaux de l’Ige dans ces rapports se chiffre à 64 574 705 171 francs Cfa.