QUESTIONS AUTOUR D’UN PROCÈS
Le procès de Hissein Habré marche vers une impasse... Le communiqué publié par les Chambres africaines extraordinaires, chargées de juger l’ex-chef de l’Etat tchadien pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et tortures, montre la déception et les craintes qui entourent cette affaire.
Pour Ndjamena, Saleh Younous et Mahamat Djibrine, considérés comme des tortionnaires présumés, sont cités dans deux autres procédures internes au Tchad, même s’ils bénéficient de liberté provisoire.
Par conséquent, soutient le Tchad, ils ne peuvent pas être remis aux Chambres africaines extraordinaires. Aujourd’hui, ce refus de transférer les présumés complices de Habré, qui constitue une «fuite en avant», «viole l’accord de coopération judiciaire» signé le 3 mai 2013.
Par cet accord, les parties se sont engagées à s’accorder mutuellement «l’assistance légale et judicaire la plus large possible en faveur des Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises» dans le cadre de la poursuite des crimes internationaux commis au Tchad durant la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990.
L’accord de coopération est pourtant clair : il parle de la transmission des actes de procédures entre les deux pays, incluant la transmission de documents officiels, publics ou d’archives ; de la production de témoignages ou de la comparution de témoins devant les magistrats des Cae, du transit de détenus pouvant comparaître en qualité de témoins, des immunités et de la protection conférées aux témoins et experts, de la conduite par les Cae de commissions rogatoires sur le territoire tchadien.
En tout cas, l’audition de ces deux personnes aurait permis de savoir ce qui s’est réellement passé au sein «de la piscine». Et le rôle de la Dds, considérée comme l’appareil de répression du régime de Habré, durant la période 1982-1990.
Mais, le refus de Ndjamena ferme les volets de cette «parenthèse sinistre» de l’histoire du Tchad. Alors que la coopération judiciaire entre les Chambres africaines extraordinaires (Cae) et le Tchad est essentielle à la réussite du processus judiciaire. Ce refus lié à une procédure interne serait-il un argument fallacieux ? «Probablement», explique un membre des Cae. Que craint Ndjamena ? Redoute-t-on qu’on mouille le Président Deby ?
«C’est possible parce que ce refus ne s’explique pas et viole l’accord de coopération», répond-on au niveau des Cae. «Ce qui est sûr, cela va enlever au procès une partie de sa franchise parce que les deux personnes sont des éléments clefs du procès. Mais, la procédure va encore continuer avec la multiplication des pressions», poursuit-il. Il y va de la sincérité du procès. Car, on risque de se contenter des témoignages des présumées victimes.
Avocat de Hissein Habré, Me El Hadj Diouf soutient sans mettre de gants «que le procès de Hissein Habré n’aura pas lieu». Il pense que «Idriss Deby ne peut lui lui-même comparaître. Donc, il ne va pas, renchérit-t-il dans Sud Quotidien, envoyer des gens qui vont le désigner comme le principal auteur des crimes commis, perpétrés au Tchad».