RÉFLEXIONS SUR LA QUESTION DU VIOL AU SÉNÉGAL
Il n’existe aucune définition juridique internationale du viol. Les éléments constitutifs de l’acte de viol varient selon les législations nationales. Amnesty International le définit comme «une pénétration forcée ou non librement consentie du pénis ou d’un objet tel qu’une matraque, un bâton ou une bouteille dans le corps humain».
Dans le droit sénégalais, le viol est une agression sexuelle impliquant, selon l’article 320 du Code pénal, «tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise». Au Sénégal, la juridiction considère qu’un enfant en- dessous de l’âge de majorité sexuelle (18 ans) ne peut valablement consentir à un rapport sexuel.
Donc, quand l’acte sexuel implique une personne dont l’âge est au-dessous de la majorité légale, il y a viol. Le texte juridique admet également l’accusation de viol d’une femme sur son mari. Il s’agit du «viol entre conjoints» qui n’était pas reconnu par la société coutumière dans laquelle une femme devait être soumise sexuellement à son époux.
Cependant, le viol y apparaissait comme une infraction de dimension criminelle dont la répression était si sévère qu’elle éclaboussait même la victime. En milieu manding de Casamance, par exemple, après un viol, la victime risquait un traitement stigmatisant et une marginalisation. Le viol était comme une malédiction contre laquelle toute femme était tenue de se battre toute sa vie durant pour éviter d’en être victime.
Donc même violées, certaines femmes se résignaient à garder le silence pour échapper à la «mort sociale». Dans certains pays où le sexe avant le mariage est prohibé, les victimes de viol encourent des poursuites pénales. En Arabie Saoudite, les auteurs de viol sont passibles de la peine de mort et les victimes sévèrement punies.
Le 22 novembre 2007, une chiite violée par sept hommes près de Qatif, a été condamnée par le Tribunal à recevoir 200 coups de fouet et à six mois de prison. En Afghanistan, la «loi religieuse», introduite en 1979 et en vigueur jusqu’en 2006, fixait que le viol devait être attesté par quatre témoins masculins, sans quoi la plaignante pouvait être poursuivie pour affabulation et condamnée.
Ces considérations font qu’il s’avère, aujourd’hui, très difficile de mesurer l’ampleur du phénomène. Toutefois, il n’y a pas de doute de reconnaître que c’est en Afrique qu’on a enregistré des chiffres records, notamment dans des pays comme la Rdc et l’Afrique du Sud.
Selon une étude du journal américain The American Journal of Public Health (4 mai 2003), il y aurait eu 1152 victimes de viol chaque jour, soit 48 cas par heure contre 147 par jour en Afrique du Sud. Au Sénégal, pas besoin de statistiques, l’ampleur du phénomène se perçoit à travers ce qui est relayé quotidiennement par les médias.
Il ne se passe un seul jour sans que la presse ne fasse état d’un où de plusieurs cas de viol. La situation est devenue tellement préoccupante qu’il nous a paru urgent de prendre la plume et d’essayer de réfléchir à ce phénomène particulièrement pernicieux qu’est le viol pour rechercher ses causes profondes et proposer quelques solutions curatives.
Après un petit travail de recherche documentaire, la conclusion à laquelle l’exploitation des données nous a conduits est que les agressions sexuelles, de plus en plus fréquentes dans la société sénégalaise, sont la conséquence directe de la putréfaction des mœurs due à l’infiltration des anti-valeurs en provenance, notamment de l’Occident et à l’abandon irréfléchi de certaines pratiques coutumières à caractère socio-éducatif, comme l’initiation et l’enseignement arabo-islamique.
A cela, il faut ajouter la démission des parents, abandonnant la charge de l’éducation de leurs enfants à l’école et à la rue. Ce qui, par conséquence directe, les expose à la tentation et à des conduites liées à la «mal-éducation». Pourtant, des pratiques comme l’excision, bien que décriée, à raison, pour son aspect chirurgical, était cependant reconnue, dans son aspect éducatif, comme très formatrice et instructive.
Au même titre que son homologue, la circoncision, l’excision consistait à apprendre à la jeune fille, future mère, un certain nombre de pratiques et de connaissances morales (énigmes), sociales et religieuses réservées aux adultes.
Elle enseignait les interdits et les bannis de la société devant servir à la femme de remparts contre la tentation, l’impudicité et le libertinage sexuel. Bref, l’excision déclinait à la jeune fille son identité propre, sa place et le rôle qu’elle doit jouer dans le fonctionnement de sa communauté.
L’abandon des pratiques initiatiques, en tout cas dans leur volet éducationnel, explique l’immoralité et la dépravation outrancière des mœurs, notamment sexuelles. La société sénégalaise actuelle vit une véritable «révolution sexuelle».
Des enfants qui, dès le berceau, se «nourrissent» de films d’amour latino-américains, de musiques et de danses obscènes, grandissent et développent leur personnalité autour du fait sexuel.
La prédominance du sexe dans le mental des jeunes, dès la petite enfance, a donné naissance, dans notre société, comme partout ailleurs, à toutes sortes de pratiques sexuelles contre-nature (pédophilie, zoophilie, nécrophilie, homosexualité, etc.). Et les agressions sexuelles comme le viol ne sont que la face visible de cet iceberg de «religion du sexe».
Il est vrai, le viol est un véritable fléau social d’une capacité de nuisance non négligeable, eu égard à l’ampleur des dégâts causés notamment aux couches les plus vulnérables (enfants, femmes souvent analphabètes et déficientes mentales), mais il se présente également comme une menace de taille importante à la sécurité individuelle pour la raison que des personnes malveillantes n’hésitent
pas de s’en servir à des fins de scélératesse. Il est le plus souvent utilisé par certains soit pour faire chanter un homme soit pour détruire un autre ou, tout simplement, par espoir d’en tirer des avantages pécuniaires. C’est pourquoi nous pensons qu’au Sénégal, nombre de plaintes pour agressions sexuelles, en toute franchise, manquent notoirement de bonne foi.
Un chef de brigade de recherches de la police sénégalaise, incarcéré pour viol, puis libéré au bénéfice du doute, ne nous démentira pas. A sa sortie de prison, dans son interview, publiée par un journal de la place et, en réponse à la question de savoir si aujourd’hui il a une perception différente des plaintes déposées pour cas de viol, il dit : «Bien sûr. Dans l’exercice de mes fonctions, j’ai eu à interpeller des gens sur des plaintes pour viol. Aujourd’hui, je me demande est-ce que ces gens-là n’ont pas été accusés à tort ? (...) C’est devenu maintenant un commerce et puisque ça paye.»
Ce qui est grave, c’est qu’il suffit qu’une plainte pour viol soit déposée pour que l’inculpé gagne son ticket pour la prison. Puisque c’est ainsi qu’il en est, pour détruire un ennemi ou mettre hors compétition un rival, il suffit de lui tendre le piège du viol ou de tentatives de viol entre autres agressions sexuelles.
C’est en cela que le viol pose un problème sérieux de sécurité des individus, car un honnête citoyen peut, à tout moment, se retrouver derrière les barreaux pour viol ou autres agressions sexuelles qu’il n’a pas commis. Les fausses accusations de viol sont monnaie courante dans les sociétés modernes.
Aux Etats- Unis, par exemple, une enquête, bien que controversée, de 1994, menée par Eugène J. Kanin, aurait abouti après 9 ans (1978-1987), à un chiffre de 41% (avec des variations de 25 à 85% selon les dates). Et Kanin explique que ces chiffres n’incluraient que des accusations reconnues fausses par les plaignantes elles-mêmes. Ce qui donne à penser que le véritable chiffre pourrait être plus élevé.
Au Sénégal, les fausses accusations de viol existent à profusion. C’est le cas parmi tant d’autres de ce père de famille à Rufisque, accusé à tort par sa propre progéniture et qui, après avoir passé 8 mois en prison, a été sauvé in extremis par un test Adn qu’il a lui-même commandité et qui a infirmé sa paternité sur la grossesse de sa fille.
Alors, face à une telle délicatesse du problème, quelle thérapie faudrait-il administrer à la société sénégalaise pour la débarrasser de cette «maladie sociale» qu’est le viol ? Quelles mesures prendre pour éviter que certains ne l’exploitent à des fins de nuisance à autrui ?
Nous pensons que pour éradiquer ce «cancer social» qu’est le viol, la meilleure chose à faire, c’est d’arrêter de lui réserver un traitement uniquement symptomatique par la simple condamnation verbale ou écrite et par la répression judiciaire. Il ne servirait à rien de durcir les peines d’emprisonnement, encore moins de «criminaliser» l’acte de viol.
Des recherches ont montré que ce n’est pas en réprimant un mal qu’on arrive à l’éradiquer totalement, mais en tarissant ses sources profondes. La preuve est qu’au Sénégal, malgré la sévérité de la répression que le Code pénal réserve aux agressions sexuelles, les viols n’ont pas cessé. Bien au contraire, la situation a empiré.
Aujourd’hui, on passe, de plus en plus, du viol simple au viol suivi de meurtre. D’où la nécessité de s’arrêter et d’essayer de rectifier le tir. Ce qu’il faut, à notre humble avis, c’est de s’attaquer à la racine du mal, très profondément enfouie dans les mentalités et les mœurs sénégalaises. Il convient de prendre des mesures thérapeutiques sincères au moyen de politiques socio-culturelles à caractère éducatif et de révision des textes juridiques.
Les autorités étatiques devraient lancer des campagnes de type «éducation populaire» à la chinoise, en mettant en place une «police des mœurs» dont la mission serait de mettre en œuvre les différents modules de la lutte contre la perversion et la débauche sexuelle.
La solution sera par la suite orientée vers la formation citoyenne par le canal de l’école, des associations et des Ong, mais aussi par la redynamisation et la modernisation des pratiques coutumières et, surtout le développement de l’enseignement religieux.
Il serait important aussi de voir les parents revenir à l’initiative, en reprenant la charge de l’éducation morale et religieuse de leurs enfants. La sexualité ne doit pas être un sujet tabou, les parents doivent en discuter avec leurs enfants en vue de les former à la maîtrise de soi et, par conséquent, d’éviter de verser dans le «vandalisme sexuel» ou d’en être victime.
Au plan juridique, les textes doivent être adaptés aux réalités culturelles, sociales et sociologiques actuelles du Sénégal. A cet effet, il est indispensable de repenser la définition du viol telle que consignée dans le Code pénal sénégalais qui ne reproduit que celle du Code pénal français remontant à 1810.
Il s’agit d’une définition d’inspiration féministe, une conception pour laquelle le viol est une violence masculine exclusive à l’égard des femmes. Cette analyse, dans le contexte sénégalais, est tout à fait inexacte, car elle ne colle pas à la réalité des mœurs actuelles du pays. Elle ne tient absolument pas compte des faits d’agressivité sexuelle des filles d’aujourd’hui, de leur degré d’immoralité et de dévergondage.
Dans une société aux mœurs aussi pourries que le Sénégal, si une femme arrive à se faire violer, c’est qu’elle a sa part de responsabilité. A moins que ça soit un viol collectif ou de pédophilie, toujours est-il que la victime a la possibilité d’échapper à son agresseur par divers moyens (la résistance farouche, le cri pour ameuter et la fuite).
Donc en cas de plainte pour viol, surtout si les faits ne sont pas clairement établis, la plaignante doit être déférée et mise en détention préventive au même moment que le présumé violeur, en attendant que l’affaire soit tirée au clair. C’est une question de transparence et d’équité. Un viol, s’il est réel, ne passe jamais inaperçu.
Mais au Sénégal, il suffit qu’une dame à la fleur de l’âge, aille se faire établir un «certificat médical» et porte plainte pour viol contre un vieillard de 70 ans, pour que le mis en cause soit arrêté illico et envoyé en prison, sans même que les preuves matérielles et scientifiques de sa culpabilité soient établies.
Or, pour arrêter un homme et le mettre en prison, il faudrait que l’acte commis soit d’abord vu et apprécié par le public, pour ensuite chercher à le prouver scientifiquement.
Encore, faudrait-il que, dorénavant, quand une personne est accusée de viol et envoyée en détention préventive pendant un certain temps, si on arrive à établir son innocence, une fois libérée, cette personne doit être indemnisée à proportion des préjudices subis.
Et une loi devrait être prévue pour traduire en justice la plaignante et ses complices pour affabulation, puis sévèrement punis.