Rapidité, promptitude et potentialité au menu des épreuves
EDUCATION : LE CONCOURS D’ENTREE A L’ENA
Le concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration du Sénégal est basé sur des tests psychotechniques. Les épreuves techniques, face à un temps court, causent la déception de la plupart des candidats. Reportage à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar où se tient le concours.
Dimanche 21 juillet. Le concours pour l’Ecole nationale d’administration (Ena) se déroule à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Il est 8h. Les candidats arrivent par petits groupes, sous une pluie battante, le parapluie à la main. Ils sont crispés. La peur et la psychose se lisent sur le visage de certains d’entre eux. Interpellés sur la préparation de ce concours qui a lieu tous les deux ans, ils ne veulent pas piper mot. Nous sommes obligés d’attendre leur descente pour voir ce qu’ils vont nous livrer.
Le concours est ouvert à tous les Sénégalais qui ont la maîtrise ou le baccalauréat. Ceux de l’extérieur en font partie. En général, ce sont les juristes et les économistes qui réussissent massivement l’épreuve. Le cycle A dédié aux maîtrisards et aux doctorants démarre le matin, tandis que celui B consacré à ceux qui ont empoché le baccalauréat est prévu pour l’après-midi. Les épreuves démarrent à 9h 30mn. Vers les coups de 11h, les candidats sortent de l’Ucad II par petits groupes.
Le temps court, une bête noire pour les candidats
Ndèye Fatou Diagne, une maîtrisard qui veut intégrer l’administration sénégalaise, affirme que ce concours est aléatoire, c’est la raison pour laquelle elle ne l’a pas assez préparé. « Il y a plein de facteurs qui entrent en jeu, donc ce n’est pas une matière que l’on étudie. Il faut juste avoir une certaine logique et une certaine rapidité. C’est le potentiel de l’individu qui compte », lance-t-elle. Ils sont 2.807 candidats à passer le cycle A, comparé au concours précédent, le nombre est limité, mais les épreuves de cette année sont beaucoup plus difficiles. « 35 mn c’est trop peu pour finir ce test. Les épreuves de mathématiques demandent beaucoup de réflexion, on n’a pas de calculatrice, ni de brouillon. On a juste la feuille d’examen et le stylo », déplore Mlle Diagne.
C’est un avis partagé par son collègue d’à côté, Amadou Diallo, qui soutient : « les épreuves étaient abordables mais le temps était trop court. On a fait deux épreuves, une épreuve psychotechnique basée sur la logique (15mn) et une autre basée sur des notions de grammaire et de calcul pour une durée de 20 mn. Je n’ai même pas terminé ». « On n’a pas eu assez de temps pour réfléchir. On ne sait pas par où commencer, encore moins par où terminer. On aurait pu se concentrer mieux si on nous avait donné 1h de temps. 35 mn c’est insuffisant pour deux épreuves », crie Mame Fama Diaw, professeur d’anglais.
Pour Youssou Ndong, « le concours était très difficile et le temps qui leur est imparti est insuffisant. Je suis un peu déçu parce que j’avais tellement préparé les tests psychotechniques et voilà, le jour-j, je passe complètement à côté. J’ai acheté deux bon livres et depuis plus de deux mois, je m’y mets nuit et jour ». « Le temps fait défaut. La majeure partie des candidats n’a pas terminé. C’est la promptitude qui compte pour eux », lance Madjiguène Faye, maîtrisard en anglais et en sciences politiques.
« Le nombre de candidats qui passe est insignifiant »
« Le nombre pléthorique fait tiquer. Avec des milliers de candidats, on en choisit une quarantaine, c’est insignifiant », laisse entendre avec amertume Pape Mody Junior Cissokho, doctorant en Droit public à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Pour M. Cissokho qui est actuellement sans emploi, si ce concours c’était annuel, on peut comprendre qu’il ait une quarantaine ou une cinquantaine d’admis, mais puisque c’est par deux ans, on aurait dû augmenter le nombre d’admis jusqu’à 80, voire 100.
Amadou Diallo, son camarade de promotion d’à côté, propose : « ce serait une bonne chose si l’Etat parvenait à augmenter le nombre de candidats qui passent. Nous tentons notre chance dans les concours pour nous insérer dans la vie professionnelle. Avec le poids social qui nous attend, on doit tout faire pour sortir du chômage ». « Face à ce nombre pléthorique, c’est perdu d’avance », lance Néné Sy. Et Madjiguène Faye d’ajouter : « le nombre qui passe est très minime. Sur 2000 et quelque candidats on prend 40 ».
La plupart des candidats interpellés disent que le concours est difficile. C’est le cas d’Astou Fall : « Comme le concours précédent était difficile, je m’attendais à une chose plus facile ; et voilà qu’on fait face à une épreuve beaucoup plus difficile. Je n’ai plus l’espoir, moi qui ai toujours rêvé travailler dans l’administration. J’ai eu mon DEA en Sciences politiques et je chôme actuellement », geint-elle. Les candidats qui auront 10 à ce test vont passer pour faire la culture générale d’une durée de 1h, puis le second test portera sur le droit public et le 3ème sur l’économie du développement et la gestion publique. En attendant de passer cette première étape, les candidats croisent les doigts.