"SORCIER BLANC" OU EXPERTISE LOCALE ?
SUCCESSION D’ALAIN GIRESSE
Après le départ d’Alain Giresse, la fédé cherche un entraîneur pour les Lions. Depuis un peu plus de 20 ans, l’expertise étrangère a fait de meilleurs résultats que celle locale.
Alain Giresse parti, l’heure est à l’étude pour chercher son successeur à la tête de la sélection sénégalaise de football. Avant même qu’un appel à candidature ne soit lancé par la Fédération sénégalaise de football (FSF) – s’il va y en avoir – des techniciens ont fait part de leur ambition de diriger les Lions. On parle de plus d’une dizaine de postulants. Des "Sorciers blancs" comme des techniciens locaux : Luis Fernandez, Lamine Dieng, Aliou Cissé... Avant de désigner celui qui va essayer de redorer le blason de la sélection nationale qui sort d’un énième échec en Coupe d’Afrique des Nations de football (CAN) où elle n’arrive plus à franchir le premier tour depuis 2008, EnQuête fait un bilan comparatif entre l’expertise étrangère et celle locale.
Abdoulaye Sarr-Amara Traoré : l’honneur national
L’expertise locale doit dire merci au duo Abdoulaye Sarr-Amara Traoré. Après avoir perdu quasiment toute crédibilité, voire confiance envers les Sénégalais, les entraîneurs nationaux ont vu l’actuel directeur technique de Génération Foot et l’actuel coach du Jaraaf de Dakar redorer leur blason. Abdoulaye Sarr et Amara Traoré ont pris la sélection après l’éviction de Guy Stéphan suite à un nul (2-2 ; 18 juin 2005) contre le Togo qui a compromis la qualification des Lions à la Coupe du monde 2006. Nommés du 1er juillet 2005 au 13 mai 2006, ils ont failli créer l’exploit. Ils ont enchaîné deux victoires de suite en Zambie (0-1) et face au Mali (3-0). Malheureusement, le Sénégal rate la qualification au profit du Togo. Mais le travail convainc les fédéraux de les maintenir. Laye Sarr et Amara réussissent à hisser les Lions en demi-finale de CAN 2006, malgré des débuts difficiles avec deux défaites en poules. Malgré un arbitrage-maison devant le pays hôte, l’Egypte, le Sénégal perd honorablement (2-1). Ils seront remerciés à leur retour.
De Karim Séga à Koto : la déception
A part ce duo, tous les autres techniciens nationaux qui ont eu à diriger les Lions, ces 20 dernières années, ont échoué. Karim Séga Diouf (1995-1997) n’a pu qualifier le Sénégal à la campagne en Afrique du Sud, Amsatou Fall (1997-1999) n’a pas pu faire mieux pour la CAN 1998, ni Lamine Ndiaye (février 2008-octobre 2008). Malgré une belle carte de visite avec le Cotonsport de Garoua du Cameroun (cinq titres de champion, deux Coupes nationales entre 2003 et 2004), l’ancien entraîneur du TP Mazembe (RD Congo) n’avait même pas réussi à sortir de la première phase de poules des éliminatoires combinées CAN-Mondial 2010. Le retour d’Amara Traoré (décembre 2009-février 2012) donna un faux espoir. Brillamment qualifié pour la CAN 2012, le coach qui a offert à la Linguère de Saint-Louis son premier titre de champion du Sénégal (2009), entra tristement dans l’histoire. Il revint de Bata (Guinée Equatoriale) avec une campagne désastreuse marquée par trois revers en autant de matches au premier tour. Aliou Cissé et Karim Séga Diouf assurèrent l’intérim (février-avril 2012) avant que Joseph Koto ne prenne leur place. Mais l’ancien ailier des Lions et de la Jeanne d’Arc de Dakar aura tenu moins de 7 mois (avril-octobre 2012janvier 2013). Il a été emporté par l’humiliation contre la Côte d’Ivoire (3-1 à Abidjan et 0-2 à Dakar) en barrages de la CAN 2013.
Metsu, le vrai "Sorcier blanc"
Le nom de ce technicien français sera à jamais gravé dans la mémoire des Sénégalais. Ce n’est pas un hasard qu’il ait eu des obsèques nationales à son décès le 15 octobre 2013. Car "l’homme à la crinière de Lion" a écrit la plus belle page de l’histoire du foot sénégalais. Arrivé à la tête des Lions en 2000, Bruno Metsu amena le Sénégal pour la première fois en finale de CAN 2002. Son succès a été couronné par une place en quart de finale de Coupe du monde, la même année, pour une sélection novice à ces joutes. On se rappelle sa victoire (1-0) d’entrée, à Séoul, contre le champion du monde de l’époque, la France, super favorite pour sa propre succession.
Peter Schnittger, le guide
Mais à vrai dire, Bruno Metsu n’a fait que parfaire le travail qui a été amorcé par Peter Schnittger (1999-2000). C’est ce technicien allemand qui a véritablement construit ce groupe qui a été étoffé par la suite par les Ferdinand Coly, Habib Bèye, Lamine Diatta. Arrivé à la rescousse d’une sélection très mal en point lors des éliminatoires à la CAN 2000, l’ancien directeur technique national (DTN) a pris le quart à Ghana-Nigeria avec des joueurs comme Khalilou Fadiga, Pape Seydou Diop, Omar Daf, Assane Ndiaye, Salif Keita, Fary Faye, Mbaye Badji... Il faillit créer l’exploit face à l’un des pays organisateurs. La bande à Pape Malick Diop et Oumar Diallo contraignit le Nigeria à aller en prolongations (2-1) dans des conditions que tout le monde sait (envahissement du terrain après le deuxième but des Super Eagles).
Les déboires de Guy Stéphan
A part ces deux techniciens étrangers, les autres "Sorcier blancs" n’ont pas fait grand-chose. Et les Sénégalais se rappellent Guy Stéphan 2002-2005. Beaucoup d’observateurs le considèrent comme la personne qui a fait exploser le groupe Génération 2002. Ayant hérité d’une équipe bien en place qui aurait dû se bonifier avec son expérience, l’actuel adjoint de Didier Deschamps chez les Bleus a fait une mauvaise campagne en Tunisie. Une CAN 2004 qui a vu les Lions se faire éliminer tristement par le pays hôte (1-0). Maintenu malgré cet échec, il n’a pas su redresser la barre. Il perd (3-1) au Togo, fait rater le Mondial 2006 avec un nul (2-2) compromettant à Dakar contre les mêmes Togolais amenés à l’époque par Emmanuel Adebayor. Suffisant pour être débarqué.
Henryk Kasperczak (2006-2008) s’est particulièrement distingué par son attitude. Après un nul (2-2) contre la Tunisie et une défaite (3-1) face à l’Angola à la phase finale de 2008 à Tamale (Ghana), le technicien franco-polonais quitta le navire avant même la fin de la compétition.
Le dernier de ces "Sorciers blancs" se nomme Alain Giresse. Intronisé en janvier 2013, l’ancien milieu de terrain de l’équipe de France réussit à faire revenir le Sénégal dans l’échiquier du foot continental après une absence en 2013. Mais le signe indien n’a pu être rompu. Les Lions sortent dès le premier tour, comme en 2008 et 2012. Son mérite est d’avoir récolté le plus de points (4) lors des phases de poules. Mais son contrat, qui finit en ce mois (février 2015), ne sera pas renouvelé. Cet échec n’enlève en rien le travail abattu par l’ancien entraîneur du Toulouse FC et du Paris Saint-Germain. Giresse a réussi à construire un groupe solide. Sous son magistère, les Lions sont passés de la 65e place au classement Fifa au 35e rang mondial.