Stratégie agressive
INVESTISSEMENTS DIRECTS MAROCAINS
Soucieux de promouvoir l'implantation de ses entreprises, le Royaume chérifien développe depuis une dizaine d'années « une véritable stratégie » à destination du continent africain, particulièrement à l’Ouest. Le Sénégal est un des premiers pays récipiendaires des investissements marocains, tous secteurs confondus.
Tout part du Groupe ONA (Omnium Nord Africain) qui est le premier groupe industriel et financier du Maroc. Sa stratégie, créer des filiales dans plusieurs secteurs d’activités. Dans le secteur bancaire, on retrouve ainsi sa filiale, le Groupe Attijariwafa Bank (AWB) : Actionnaire au Crédit du Congo (81% du capital), de la Société ivoirienne de banque (51%), de la Société camerounaise de banque (65%), de l'Union gabonaise de banques (59%) et du Crédit du Sénégal (95%) , de CBAO Groupe Attijariwafa bank (100%), constituée de la fusion entre la banque sénégalaise CBAO et la filiale marocaine "Attijari bank Sénégal" en 2008 qui est devenue aujourd’hui numéro un sur la place bancaire au Sénégal.
Cette même Attijariwafa bank et Banque Populaire détiennent 60% du capital de BNP Paribas Mauritanie, filiale du groupe BNP Paribas, une opération conclue via un holding détenu à 67% par AWB et 33% par BP. Quant à la BMCE Bank (Banque marocaine du commerce extérieur), elle détient 25% de la Congolaise de Banque, 27,38% de la Banque de Développement du Mali et cerise sur le gateau, elle détient aussi 55,8 % du capital du groupe Bank Of Africa.
Mieux, cette même Attijariwafa Bank a ouvert ses tentacules dans les assurances à travers sa filiale Wafa assurances, deuxième assureur marocain dans un marché suffisamment consolidé et évoluant dans un cadre réglementaire abouti, poussant les opérateurs marocains à se développer au-delà des frontières du pays.
Ils assurent
L'Afrique subsaharienne s'impose ainsi comme le terrain de chasse des assureurs marocains, d’autant plus depuis qu’un contrat programme a été signé en mai 2011 entre, d'une part, le ministère de l'Économie et des Finances et, d'autre part, la Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurance (FMSAR), faisant du développement à l'international des compagnies l'une de ses mesures phares.
Depuis qu’elle a réussi à « embarquer » dans son capital la Société Financière Internationale (filiale de la Banque mondiale) qui y a injecté un investissement d’un équivalent de 125 millions de dollars, la holding SAHAM, créée en 1995 et qui était alors à la recherche de fonds pour boucler son programme de développement en Afrique subsaharienne suite à la reprise en novembre 2010 de la compagnie d’assurance Colina, est aujourd’hui implantée dans 18 pays en Afrique de l’Ouest dont le Sénégal.
Le groupe Saham détenu à 95% par l’homme d’affaires marocain Moulay Hafid Elalamy qui était récemment à Dakar, contrôle notamment CNIA Saada, le troisième assureur marocain en termes de primes, avec des parts de marché de 13,6% en 2010, Isaaf Mondial Assistance, compagnie d’assurance voyages avec 46% de parts de marché et Colina, troisième assureur en Afrique de l’Ouest et du Centre avec 13,2% de parts de marchés en 2009, positionné dans les pôles vie et non vie. Le groupe qui s’est ainsi positionné comme le premier assureur panafricain, hors Afrique du Sud, montre clairement qu’il ne veut pas faire de la simple figuration en Afrique au sud du Sahara.
Les assureurs français, présents de longue date en Afrique devront ainsi compter avec les assureurs marocains, bien décidés à profiter du potentiel du continent.
Cependant, les investissements directs Marocains en Afrique subsaharienne sont dans les secteurs de l’Agriculture, du Génie civil et des BTP, dans l’Eau et Assainissement, dans l’Electrique, dans l’Aviation civile, dans les Télécoms, dans le secteur financier (Banque et Assurance) et dans le Holding.
Moteur d'une économie émergente
Le Groupe ONA (Omnium Nord Africain), par exemple, dispose de filiales dans les Mines et industries, au Gabon, et en République Démocratique du Congo, à travers sa filiale Managem. ONA est aussi dans la distribution des biens d’équipement et dans la Négoce, en Côte d’Ivoire, à travers sa filiale Optorg.
Les entrepreneurs marocains sont aussi présents dans les télécoms, avec Maroc Telecom, au Burkina Faso, ONATEL (51%), au Mali par le rachat de la Sotelma (51%) et en Mauritanie ( 54% dans Mauritel).
Dans l’aviation civile, le divorce retentissant entre Air Sénégal international et la Royal Air Maroc (RAM) n’a pas empêché celle-ci d’être à 51% dans Air Gabon International; en Mauritanie (Air Mauritanie) où la RAM détient le même pourcentage.
Ils sont mêmes dans l’électricité à travers l’Office National de l'Electricité (ONE) qui est adjudicataire de marchés au Sénégal, en Gambie, au Niger, en Sierra Léone et au Tchad. Mais aussi dans les Eaux-Assainissement, le GENIE CIVIL et BTP ainsi que l’Agriculture.
Cette stratégie de développement démontre à suffisance que le Maroc ne construit pas sa stratégie de développement économique sur les seuls secteurs du tourisme, de l’immobilier et de l’infrastructure, mais mise plutôt sur l’émergence et le développement d’entreprises marocaines « leaders ».
Au risque cependant et malheureusement de voir au Sénégal notamment, de ne plus voir que des banques, des sociétés d’assurances, entre autres compagnies à capitaux marocains, alors que la même stratégie n’est même pas envisagée à contrario au Maroc par le secteur privé sénégalais.