VIDEOTHIERRY HENRY, SANG BLEU MAIS ROI LOIN DE FRANCE
Thierry Henry, désormais retraité du foot et toujours incompris en son pays: Arsenal lui a érigé une statue alors que la France, qui aurait dû le sacrer roi pour son record de 51 buts marqués en Bleu, lui a bien chichement accordé sa reconnaissance.
Combien de joueurs ont eu une statue de leur vivant ? "Titi", lui, a inauguré la sienne en décembre 2011, juste devant l'Emirates Stadium, antre des Gunners, ce club qui lui a permis de devenir un des plus grands joueurs de la planète, au sein des "Invincibles" d'Arsenal sous la direction de celui qu'il appelle toujours le "Boss", Arsène Wenger.
Cette œuvre massive en bronze le montre à genoux, en fin de glissade rageuse, poings serrés, après avoir marqué. Des buts ? Le tatoué barbu a dépassé la barre des 400 dans sa carrière, 411 pour être précis, dont 228 avec Arsenal. Mais des démonstrations de joie, il en a trop peu livrées aux yeux d'un exigeant public français. Les gradins d'Arsenal, eux, ont toujours scandé son nom, même quand leur longiligne (1,88 m) attaquant restait de marbre en faisant trembler les filets.
"Je ne montre pas souvent mes émotions, la presse me l'a souvent reproché, mais la voilà mon émotion, je la montre pour le club que j'aime": c'est avec ces mots, écharpe rouge et blanche du club autour du cou, que le natif des Ulis (Essonne) a remercié Arsenal il y a trois ans pour cette statue, écrasant quelques larmes.
Main contre l'Eire
Voilà résumé le paradoxe Henry qui, après une dernière pige en championnat nord-américain (MLS) à New-York, a mis fin à 37 ans à une carrière immense, mais que la France a trop souvent remise en questions.
Des titres de champion ? L'Antillais, fils d'un Guadeloupéen et d'une Martiniquaise, en a gagné à Monaco (club de ses débuts professionnels en 1994), à Arsenal, où il a été déifié (1999-2007) ou encore à Barcelone. La Ligue des champions ? Il l'a remportée avec le Barça de Pep Guardiola. L'équipe de France ? Il a battu le record de buts d'un certain Michel Platini (51 en 123 sélections, contre 41 en 72 capes pour "Platoche"), a été sacré champion du monde en 1998 (il ne reste plus que deux joueurs de cette épopée en activité, David Trezeguet et Robert Pirès) et d'Europe en 2000.
Mais c'est comme s'il avait toujours manqué quelque chose aux yeux de ses détracteurs: en vrac, sa relation a été trop timide avec Zinédine Zidane (une seule passe décisive de "Zizou" pour "Titi" en Bleu), il n'a pas remporté le Ballon d'Or (2e en 2003; 3e en 2006) et la fin de l'histoire en équipe de France a épousé la trajectoire du crash des Français en Afrique du Sud.
Son épisode footballistique le plus douloureux aura évidemment été cette passe de la main qui a permis à William Gallas de marquer et aux Bleus de se qualifier pour ce maudit mondial sud-africain, un soir de novembre 2009 en barrage contre l'Eire.
La 'spéciale'
Au delà de la polémique planétaire née de ce geste, il gardera toujours en lui la brûlure de n'avoir pas été assez soutenu dans son pays. "Lorsqu'on compare la tempête qu'il a endurée et le quasi pardon dont le coup de tête de Zidane a fait l'objet, on a un peu de mal à comprendre", écrit son sélectionneur de l'époque Raymond Domenech, dans son "Dico passionné du foot".
Ce qui restera, c'est surtout l'image d'un joueur d'une élégance folle et de sa "spéciale" qui a écœuré tant de gardiens: déboulé sur le flanc gauche, percée dans l'axe et enroulé divin du droit dans le côté opposé. Du grand art. "C'est l'un des meilleurs buteurs au monde. Il est si lucide face au but", admirait le "Kaiser" Franz Beckenbauer. "La meilleure chose à faire avec Thierry Henry, c'est de le regarder jouer, pas d'en parler", a souvent dit Wenger.
Henry est un passionné de sport, du tennis --il idolâtrait Stefan Edberg-- à la NBA dont il s'est régalé à New York. Mais c'est avant tout une bible du foot et il va maintenant livrer sa bonne parole sur les écrans de télévision, pour la chaîne de télévision Sky Sports. En Angleterre, à Londres. Tout un symbole.