TOTALE TRANSPARENCE
L'ambiance est si polluée par les déclarations de patrimoine que la publication de ces documents serait un moindre mal pour l'Etat. Bien sûr qu'on écarquillera sans doute les yeux devant certaines "fortunes"
Pour arrêter ce spectacle consistant à créer du tintamarre autour des déclarations de patrimoine, n'y a-t-il pas besoin de publier les contenus des documents déposés à l'Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) ?
Cela a un double avantage... En effet, en sacrifiant au rituel de la publication des patrimoines déclarés de nos dirigeants, on permet au contribuable, qui justifie la nomination des ministres et Cie, de disposer comme il en a le droit, d'informations sur ceux qu'il a délégués pour gérer ses biens. On oublie bien souvent que le ministre (l'étymologie du mot renseigne sur son caractère de subalterne) est un serviteur.
Un Directeur général n'est pas une "sainteté" au-dessus de nos têtes. Bien au contraire. Il doit donc nous dire qui il est avant de s'installer sur des budgets souvent énormes. Et il ne devrait pas le dire en cachette. Sa parole sur sa fortune avant de prendre fonction doit être rendue publique. La publicité est une conséquence normale de la logique de transparence déjà introduite par la déclaration de patrimoine.
C'est ainsi que cela se passe en France où les déclarations de patrimoine sont postées sur un site officiel de l'Etat. L'exception culturelle ne peut pas expliquer cette forme nocive de rétention d'information. Qu'est-ce qui différencie fondamentalement le Sénégalais du Français sur ce plan ?
Ce sont les mêmes arguments qu'on utilise souvent pour expliquer le retard démocratique de certains pays africains alors que le Sénégal expérimente depuis longtemps la démocratie.
La publicité a un autre avantage. Hormis le fait qu'elle enterre le débat sur la liste de ceux qui ont effectivement déposé leurs déclarations de patrimoine, elle évite l'installation d'une "industrie souterraine". A jouer à cache-cache avec ces documents, à force de les estampiller "top secret", on leur donne une valeur pour les maîtres chanteurs et autres délinquants à col blanc qu'on retrouve malheureusement aussi dans la haute administration.
C'est aussi installer le nid de la corruption sur le lit d'une volonté de transparence. Aujourd'hui, l'ambiance est si polluée par ces déclarations de patrimoine que la publication de ces documents serait un moindre mal pour l'Etat. Bien sûr qu'on écarquillera sans doute les yeux devant certaines "fortunes". On pourrait même être choqué. Raisonnablement ou à tort.
Mais si le président de la République lui-même a publié sa fortune, alimentant du coup toutes sortes de débat, pourquoi ses ministres, les directeurs généraux de sociétés nationales, Dage et autres ne devraient-ils se soumettre à la même discipline ? Simple question de bon sens !