Un Germano-Sénégalais veut devenir le premier député africain au Bundestag
HALLE (Allemagne), 16 mai 2013 (AFP) - Karamba Diaby, 51 ans, est le premier candidat d'origine africaine à des législatives allemandes ayant des chances de siéger à la chambre basse du Parlement dans moins de cinq mois.
Ce docteur en géo-écologie né au Sénégal fait campagne au nom du Parti social-démocrate (SPD) à Halle, une ville de 230.000 habitants à 180 km au sud-ouest de Berlin, caractérisée par un taux de chômage deux fois plus important que la moyenne nationale (13%) et une étiquette de place-forte de l'extrême droite.
"J'aimerais être jugé sur mes compétences et mon expérience plutôt que sur ma couleur de peau", déclare de sa voix grave ce petit homme au visage rond et aux cheveux ras. Mais son expérience n'est pourtant pas ce qui amène les médias internationaux à vouloir le rencontrer... Avant de rejoindre sur le tard les sociaux-démocrates, en 2008, Karamba, comme le nomment simplement ses proches, dit avoir toujours "fait de la justice le combat de sa vie".
Cet ancien porte-parole des étudiants grévistes de Dakar qui a passé son bac avec le président sénégalais Macky Sall, voit son parcours en politique comme un "cheminement". Arrivé "par chance" en 1985 dans la RDA communiste, avec une bourse très convoitée pour apprendre l'allemand et étudier la chimie à Leipzig (sud-est), Karamba Diaby ne se doutait pas que ce pays deviendrait sa patrie.
"Je suis Sénégalais c'est vrai, mais je suis d'abord Allemand", dit ce père de deux enfants marié à une Allemande, qui a obtenu la nationalité il y a 12 ans. L'une de ses premières victoires politiques remonte à la chute du Mur en novembre 1989.
Porte-parole des étudiants étrangers de son université, il obtient la régularisation de ses collègues menacés d'expulsion par la disparition de l'Allemagne de l'est, qui avait conclu des accords d'échange avec leur pays d'origine.
Agressé physiquement en 1991 en raison de ses origines, cet ancien président du Conseil fédéral des immigrés estime aujourd'hui que la xénophobie n'est plus le problème aigu que le pays a connu il y a 20 ans. "L'est de l'Allemagne a beaucoup changé", assure-t-il.
Les néo-nazis du parti NPD ont néanmoins réussi à remporter un premier siège au conseil municipal lors du dernier scrutin. Lui même élu municipal de Halle, il est chargé de l'intégration au ministère du Travail de l'Etat régional de Saxe-Anhalt. L'ancien président de la Fédération régionale du SPD Rüdiger Fikentscher, qui l'a adoubé, se souvient s'être dit "pourquoi pas ?
Ce qui compte avant tout ce n'est pas son origine mais son parcours, qu'il a toujours accompli avec brio". "Il a toutes les qualités requises. Il est sympathique, très intelligent, saisit très vite les choses et surtout il ne cherche pas à briller", estime cet ancien président du Conseil fédéral du parti.
Dans son fief, Karamba Diaby, qui se déplace toujours à pied, est connu "comme le loup blanc", selon son entourage. "A chaque coin de rue des gens m'arrêtent et me racontent leurs histoires. Cela fait partie de mon travail", explique-t-il.
Il lancera en juin une campagne de porte-à-porte sous le slogan de la "diversité" et veut favoriser les rencontres par petits groupes. "La grande force de Karamba, c'est qu'il a le contact facile. Vous le mettez avec des personnes dans une pièce et dix minutes plus tard il connaît tout le monde", fait remarquer Thomas Stimpel, un des responsables de sa campagne.
Les sociaux-démocrates, qui l'ont inscrit en 3e position sur la liste régionale, le voient capable de reprendre cette circonscription très disputée: elle est actuellement représentée par le parti d'extrême gauche Die Linke, très puissant localement, qui lors du dernier scrutin, il y a quatre ans, avait fait presque jeu égal avec les conservateurs CDU de la chancelière Angela Merkel.