UNE AUDITION INTERMINABLE... DANS LA BONNE HUMEUR !
AMBIANCE AU PROCÈS KARIM WADE
On ne sait pas si c’est la perspective du week-end qui a détendu tout le monde, hier, mais la suite de l’audition du témoin Cheikh Tidiane Ndiaye s’est passée dans une remarquable bonne ambiance... Pas d’incidents, quelques boutades bon enfant entre robes noires et même la validation par la Cour d’une pièce qu’on aurait normalement refusée en temps de...guerre !
Le jeudi, sauf exception, est toujours le jour le plus plaisant dans cette longue marche qu’est devenu ce combat entre Karim Wade, alias Doomu Baayam*, et la CREI.
La journée d’hier n’a pas dérogé à la règle bien qu’il faille reconnaître que les astres ont particulièrement été bienveillants en cette avant-veille de la Toussaint puisque, une fois n’est pas coutume, c’est plus d’éclats de rire que des cris qu’on a entendus retentir dans la salle.
Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ce constat, le premier (et plus évident) étant que les équipes ne jouaient pas sur le terrain au complet ! En effet, en fin de journée, on ne compte que trois avocats du côté de la partie civile (ceux qui font d’habitude des histoires étant absents) et seulement sept pour la défense...
Bien que du côté des inamovibles (le parquet spécial et la cour), tout le monde soit là, notons que chez les inculpés, seuls sont présents Mamadou "consort" Pouye et Wade Jr., soit deux sur les six qu’on a vus depuis le début du procès, devant la CREI.
Dernier et non moins important pion de cette partie de Monopoly géante à la cagnotte de 117 milliards de francs Cfa, le témoin du jour, Cheikh Tidiane Ndiaye, qui réussit quand même (et c’est tout à son honneur) à rester huit solides heures à la barre malgré la climatisation qu’il dit ne pas supporter... Quand on voit à quel point l’intéressé a su garder son calme et rester courtois, on ne peut que le saluer !
Me Amadou Sall assure le spectacle
Le substitut du procureur spécial, Antoine Félix Diome, ayant épuisé l’essentiel de ses questions la veille, c’est la défense qui prend la parole après que la partie civile, via Me Aly Fall, a affirmé "ne pas avoir de questions particulières pour le moment".
Et quand on parle de défense, on veut par là dire que c’est Me Amadou Sall, avocat de Karim Wade jusqu’à la mort (et peut-être même au-delà !) qui s’empare du micro pour ne plus le lâcher en cette fin de semaine.
Connaissant le style taquin, coloré et presque discutaillant de l’avocat, qui a élevé au rang d’art la faculté de faire parler quelqu’un jusqu’à ce qu’il mette tout seul (et, généralement, sans s’en rendre compte) les pieds dans le plat, on se doute bien que son très long chassé croisé de questions avec Cheikh Tidiane Ndiaye est épique.
En effet, c’est par le biais d’anecdotes et allusions à des faits passés, de calcul mental et même de la lecture, en anglais, de factures adressés à AN Média que Me Amadou Sall a fait ressurgir ce qu’il appelle "des contradictions" dans la déposition du témoin.
Si l’on ne revient pas, en ces lignes, sur la nature des dites contradictions, il convient néanmoins de noter le ton badin adopté par le conseil de Karim Wade tout au long de l’exercice. Ainsi, Me Sall dit "ne pas s’offusquer" du terme "acrobaties" prononcé par le témoin pour, à un moment, qualifier le cours de sa démarche. Il se moque ensuite de lui-même, qualifiant son accent anglais comme "originaire d’un pays (qu’il) n’ose pas nommer" (NDLR : on suppose, la Gambie), après avoir demandé pardon à la cour d’avoir à lui "faire souffrir une torture effroyable" que constitue le fait qu’il ait à lire un paragraphe dans ladite langue.
Mieux encore, il taquine le parquet en amalgamant Antoine Felix Diome à Alioune Ndao : "Ces deux là, lorsqu’il s’agit de faire des commentaires et de perturber, si ce n’est pas l’un, c’est l’autre !", plaisante-t-il.
Tant et si bien qu’à force de boutade, c’est Henry Grégoire Diop lui-même qui, souriant, félicite l’avocat en question "de détendre l’atmosphère" !
La pièce "émigrée clandestine" de Vieux Aïdara
Heureusement qu’il y est allé avec le dos de la cuillère pendant des heures avant de tenter son coup puisque c’est un assez gros poisson que Me Amadou Sall a essayé puis, finalement, réussit à ferrer en fin de journée !
En effet, ce n’est rien de moins qu’une nouvelle pièce du dossier dont le destinataire n’est autre que "Vieux" Aïdara, actuellement en fuite, que l’avocat de Karim Wade a communiqué avec succès à la Cour, malgré la réputation qu’a cette dernière, depuis le début du procès, d’être difficile à amadouer !
Ainsi, bien que selon la défense rien ne s’oppose à l’ajout d’une nouvelle pièce au dossier si tant soit peu on respecte la procédure, la bataille n’était pas gagnée d’avance car le parquet spécial a semblé crier au scandale à peine le document entre ses mains.
Il a fallu une avalanche d’observations et Baap** en tout genre de la "Team Rimka 4ever" (NDLR, Karim pour toujours) pour que la balance penche, après suspension de l’audience, en sa faveur.
Ainsi, Me Madické Niang et consorts n’ont pas économisé leurs efforts pour faire passer la pilule... Le plus fatigué de l’histoire étant sans conteste Me Demba Ciré Bathily qui, après s’être solennellement engagé devant la cour à produire "toute la jurisprudence sur la question", a fait un aller-retour à une vitesse record entre son étude et le Palais de Justice pour ramener lesdits documents ! Mais que ne faut-il pas faire pour Karim Wade ?
*= "fils de son père" **= "cajoleries"