VERS UN SYSTÈME D’INTELLIGENCE TERRITORIALE
Avec l’avènement de l’Acte III de la décentralisation conçu comme une réforme visant à « organiser le Sénégal en territoires viables, compétitifs et porteurs de développement durable, à l’horizon 2020 », ce sont de nouveaux enjeux qui se font jour. On ne peut plus désormais envisager, à ce stade d’évolution historique et politique de notre pays, les questions centrales de son développement sans tenir compte des nouveaux paradigmes qui définissent le territoire comme un espace d’organisation des ressources naturelles, des moyens pour les mettre en valeur en partant d’une analyse partagée de son potentiel et des perspectives de leur utilisation durable par rapport au futur des générations.
Ces questions centrales de développement relèvent des droits légitimes des populations à une gestion transparente fondée sur l’équité, la lutte contre la pauvreté, ou celles liées à la vulnérabilité des communautés face aux aléas des changements climatiques. Un des enseignements tirés des témoignages croisés lors du forum sur l’approche territoriale du développement durable, c’est que les collectivités locales sont de plus en nombreuses à s'interroger sur les facteurs clés, susceptibles de promouvoir un développement durable à l’échelle de leurs territoires. Et qu’à leurs yeux, « les enjeux liés à un tel processus revêtent une acuité particulière dans un contexte marqué par des déséquilibres entre les territoires, une tendance à la paupérisation de certaines zones et un accroissement des inégalités sociales. »
Comme cela a été dit et démontré lors de ces assises où la Société civile rurale, par le biais de ses mandats, a pris une part active, les problèmes d’environnement et de Gestion des ressources naturelles (Grn) se posent à plusieurs niveaux. « Le premier concerne les problèmes relatifs à chaque terroir considéré comme une entité spécifique bien localisée et dont la gestion s’articule autour d’interventions ciblées prenant en compte les contraintes propres au milieu. Le deuxième niveau renvoie aux problèmes environnementaux qui ne concernent pas un terroir pris isolément, mais l’ensemble du territoire national, voire toute une région ou même la totalité de la planète».
Dans ce cas de figure, indiquent les experts qui ont discuté sur ces questions, « les dynamiques, même lorsqu’elles revêtent un caractère local, ne peuvent pas être gérées uniquement à cette échelle, tout simplement parce qu’elles participent d’un mouvement d’ensemble et parce que leur solution ne peut venir que d’efforts concertés et de transformations touchant les relations internationales ou les normes technologiques ». Il convient, pour confirmer cet argument, de souligner la pertinence de ces choix méthodologiques qui permettent de prendre en charge concomitamment plusieurs grands défis (atténuation des effets induits par la variabilité et les changements climatiques, lutte contre la pauvreté, promotion de l’équité sociale) qui sont au coeur des politiques de développement.
Les technologies de l’information qui permettent l’accès structuré à l’information territorialisée du fait des possibilités qu’elles offrent dans le domaine du management des connaissances et du travail collaboratif devraient être utilisées à bon escient. Dans le sens bien compris de ce que l’on appelle « le système d’intellectuel territorial », c'est-à-dire, de ce concept innovant et opératoire que le Pr Philippe Vidal et sa collègue Françoise Desbordes expérimentent, depuis quelques années dans le cadre de masters professionnels sur « Territoire, habitat et politiques d’aménagement » du Dess-Ategu de l’Ecole nationale d’économie appliquée (Enea) de Dakar, au Sénégal, dans l’esprit des leçons de la conférence de la Planète de Rio dont les conclusions ont mis en exergue l'interdépendance étroite entre l'environnement et le développement économique. Respectivement, Maître de conférences en géographie et aménagement de l’Université du Havre (France) et ingénieur d’études Cnrs, membre du laboratoire de recherches Cirus, équipe interdisciplinaire d’études urbaines et professeur à l’université de Toulouse-le Mirail, ils n’ont eu de cesse d’attirer l'attention sur le fait que les sociétés, eu égard à leurs capacités productives et technologiques, détiennent un pouvoir d’intervention leur permettant d’améliorer les conditions d’existence des populations. Mais aussi, de modifier négativement leur environnement proche, voire de porter atteinte aux équilibres fondamentaux du milieu naturel, base de leur propre vie sur terre.