Zoss : "J'ai dépassé Ama Baldé"
Il a été difficile à repérer au lendemain de sa victoire sur Tidiane Faye. Déniché chez son conseiller Abdoulatif Diop, à la Cité Aliou Sow à Golf Sud, Zoss a accepté de revenir sur ses débuts difficiles dans l'arène et sa résurrection...
Avant le combat, vous avez dit que si Tidiane Faye est ''Professeur'', vous êtes ''Recteur''. Dimanche, vous l'avez confirmé avec votre victoire sur lui.
Je rends grâce à Dieu de m'avoir donné la victoire sur Tidiane Faye, dimanche dernier. Tidiane Faye est un champion. Je peux même dire que c'est sa première défaite. Si vous regardez bien, il n'a pas connu de revers depuis un bout de temps. Je le félicite et je l'encourage afin qu'il puisse revenir en force. Les gens l'ont donné favori sur loi. Mais quand vous ne connaissez pas la personne, vous ne pouvez pas la juger. J'ai fait des exploits dans la lutte, j'en ai terrassé des champions ; et jusqu'à présent, les gens tardent à reconnaître ce que j'ai fait. Ils disent que c'est un hasard. Ce n'est pas possible. On ne peut pas tout le temps gagner par hasard. Je mets en œuvre des stratégies et c'est ainsi que je terrasse mes adversaires. C'est ça la lutte.
Pourquoi dites-vous qu'il a été donné favori ?
Quand j'entends les gens l'appeler le ''Professeur'' et dire des choses de lui, je me pose cette question : Que suis-je donc ? Moi, j'ai des qualités pourtant. On disait que Issa Pouye était le meilleur lutteur au Sénégal, mais je l'ai battu.
Comment avez-vous fait pour terrasser Tidiane Faye?
Je me suis bien entraîné. J'ai augmenté naturellement mon poids. Si vous analysez bien le combat, je l'ai bien géré. Nous ne sommes pas de la même catégorie. Notre différence de poids, c'est 15 kg, c'est énorme (Je pèse maintenant 118 kilos). Je lui avais dit, depuis le début, que je surpasse ceux avec qui il s'entraîne. Je travaille la force et mes partenaires aux entraînements dans mon écurie sont très forts. Il faut travailler dur, sinon, c'est à l'écurie d'abord qu'on t'humilie et tu ne peux espérer aucune victoire. Donc le travail qu'on a effectué a été tellement sérieux que je savais que ça allait aboutir à une victoire. Je vous avez dit que j'ai réappris à bien me battre. Mais les gens n'ont pas cru que j'allais pouvoir mettre à terre, d'un coup de poing, un lutteur. Ce sont les coups qui ont affaibli Tidiane Faye. Quand il a voulu se relever, il titubait parce qu'il était K.-O. Je fait mes preuves chaque jour. J'ai montré aux gens que je sais lutter et me battre. Mais pour qu'ils ne me croient, il faudra que j'aie un adversaire bagarreur.
Voulez-vous dire que vous ne boxez pas dans la même catégorie que Tidiane Faye ?
Mais oui ! Nous ne sommes pas de la même catégorie. D'ailleurs c'est grâce à Gaston Mbengue j'ai accepté ce combat contre Tidiane Faye. Mais je l'ai pris, comme je l'ai déjà dit, parce que c'est un sérère comme moi. Et j'ai fait sa promotion d'ailleurs. Maintenant, tout le monde sait qui est Tidiane Faye, c'est très important. Ce n'est pas pour autant que j'allais brader le combat. Non ! J'étais venu pour le battre. J'avais plus à perdre s'il m'avait terrassé. J'ai terrassé des lutteurs qui étaient d'une catégorie supérieure à la sienne. Il n'a jamais terrassé un lutteur qui a un cachet supérieur au mien. C'est un plus pour lui de m'avoir affronté. Il aura à battre d'autres lutteurs parce qu'il est technique.
Vous dites que les gens l'ont donné favori sur vous. N'est-ce pas le ''Zoss Showman'' que les gens ont toujours considéré ?
Je sais lutter. Mais le show, quand je le faisais, c'est par manque de maturité. Quand j'ai commencé à lutter, je n'avais que 17 ans, j'étais encore très jeune. Je ne pouvais pas avoir la maturité nécessaire pour gérer mes combats. Mais aussi le manque d'encadrement m'a beaucoup pénalisé. Actuellement, j'écoute les conseils. Ce que je ne faisais pas auparavant. Nous faisions tout ensemble, j’avais mes boys et j’étais le meneur. Désormais, j’écoute leurs conseils parce que les jeunes comme les vieux ont une certaine connaissance. Les gens pensent que si une écurie n’a pas de sages, elle ne peut prospérer, alors que tout le monde est sensé avoir une connaissance. On dit souvent que pour être un intellectuel, il faut être d'un certain âge. Mais il y a des jeunes qui ont une bonne expérience, il faut juste qu’on les écoute. J’ai aussi des ''grands'' que j'écoute, qui me donnent des conseils. Ils sont tapis dans l'ombre, mais ils me disent ce qu’ils ont à dire et restent dans leur coin.
Nous avons remarqué un certain changement chez vous. Qu’est-ce qui est à l’origine de cela ? Quand est-ce cela a commencé ?
J’ai changé quand je me suis rendu compte que j’ai ma place dans l’arène. J'avais beaucoup de lacunes que j'ai comblées aujourd'hui. Et cela a commencé par le respect de l’adversaire ; lutter comme il se doit, respecter des entraînements et des supporters, la prise en compte du mystique et le fait d' être bien encadré…
Quand avez-vous véritablement changé ?
C'est depuis mon premier combat avec Gouye-gui. J’étais à un autre niveau en 2010... mon combat avec Papa Sow... J’avais d’autres ambitions qui ne me permettaient pas de m’entraîner correctement. Après ce combat, je me suis dit que je devais faire des efforts pour réussir dans l’arène qui est ma profession. Contre Gouye-gui, j’ai laissé beaucoup de choses derrière pour me concentrer sur la lutte. J'avais pris le combat au sérieux et je l’ai gagné. L'erreur que j'ai faite, c'est face à Papa Sow. J’étais pressé et il m'a battu. Tout ça m’a servi de leçon. Après avoir terrassé Gouye-gui, perdu face à Papa Sow et battu Tidiane Faye, on peut dire que j’ai fais une bonne saison.
Le mystique occupe alors une place importante dans l’arène ?
Le mystique fait partie de nous. Nous l’avons trouvé dans l’arène, nous n’y pouvons rien. Même si vous gagnez, les gens vont se demander après si vous n’étiez pas mieux préparé mystiquement. C’est très important pour nous et c’est autre chose.
Il semble d'ailleurs que vous avez dépensé toute votre avance dans le mystique...
J’ai beaucoup dépensé dans ce combat parce que je n’avais pas le droit de le perdre. Je savais que si je le terrassais, j’allais passer dans la cour des grands. Une défaite allait me rétrograder chez les plus jeunes.
À quel niveau vous situez-vous , aujourd'hui ?
Je fais partie maintenant des ténors. Ce sont les amateurs qui décident, mais l’essentiel est que je ne vais plus donner de chance aux jeunes.
Ama Baldé a pourtant dit qu'il aurait souhaité en découdre avec le vainqueur de votre combat avec Tidiane Faye...
Ce sont des propos de jeunes, je dis que je ne vais plus leur donner de chance.
Pensez-vous que prendre Ama Baldé, c’est lui donner sa chance ?
Ces ''boys-là'', je ne suis pas leur égal, nous ne boxons pas dans la même catégorie. Ce combat contre Tidiane Faye, c'est Gaston (Mbengue) qui me l'a imposé. Ama Baldé, j’ai terrassé son bourreau, Gouye-gui, c’est pour cela je vous dis que je ne suis pas son égal.
Mais Ama Baldé a évolué entre-temps...
Même si Gouye-gui me demandait une revanche, je n'allais pas l'accepter, de même que Papa Sow d'ailleurs.
L’année dernière, vous demandiez Tyson, Gris Bordeaux et autres...
(Il coupe) Je ne demande plus personne, ni Tyson, ni Gris, ni Lac de Guiers 2. Qu’on me donne celui que je mérite, je suis prêt pour tous les grands lutteurs.
Aujourd'hui, quel est votre cachet ?
Mon cachet va maintenant jusqu’à 100 millions F Cfa.
En réclamant 100 millions, cela veut dire que vous ciblez certains lutteurs, parce qu'on ne peut pas vous donner ce cachet pour n'importe quel adversaire...
Je fait partie maintenant de ces ténors qui touchent ce montant, j'ai terrassé tous les jeunes. Je dois maintenant passer à un cap supérieur, je ne peux pas rester toujours au même stade, à prendre les jeunes et les terrasser. À la limite même, on me manque de respect. J'ai entendu des gens dire que je ne fais que freiner les jeunes lutteurs, ce n'est pas normal. Donc je dois les laisser lutter entre eux, jusqu'à ce qu'ils atteignent mon niveau. Là, je pourrais lutter avec eux.
Vous étiez le ''Show-man'' de l'arène, mais depuis deux saisons, vous êtes revenu au premier plan.
J'ai eu beaucoup de mauvais moments dans la lutte. J'ai abandonné mes études, mon métier, tout cela pour mieux me concentrer sur la lutte. Les débuts ont été difficiles, il y a beaucoup de risques et de dangers dans la lutte, mais c'était une passion qu'il me fallait assouvir. Je savais que j'allais y réussir tôt ou tard. C'est une chose à laquelle je croyais beaucoup. Ne dit-on pas souvent qu'il faut y croire pour réussir ? Quand nous débutions, la lutte n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui.
Quand avez-vous débuté votre carrière ?
J'ai débuté en 1998. Chaque année, je disputais un combat. À l'époque, j'étais très jeune et j'étais à l'écurie Pikine, avec Falaye Baldé. C'est là que j'ai appris à lutter, avec les Eumeu Sène, Baboye, entre autres...
Quand est-ce que vous avez quitté Pikine ?
C'est l'année où l'on a créé l'écurie Rock Énergie. À l'époque Pikine n'avait plus d'encadreur, puisque Baboye était parti en Italie. J'ai formé l'écurie Rock Énergie avec les Khadim Gadiaga, Dolf... Nous avons aidé des jeunes qui étaient venus nous solliciter.
Pourquoi avez-vous quitté Rock Énergie ?
Il n'y avait plus d'esprit de groupe. Un jour, j'avais un combat, je leur ai demandé qu'on se déplace pour que je ne sois pas épié, ils ont refusé. À partir de cet instant, je me suis dit que ce n'était plus la peine de rester avec eux. Je voulais que nous nous entraidions, que nous fussions un et indivisible. Si ne n'était pas possible, j'ai quitté. Dans mon écurie actuelle, tous les jeunes qui sèment la zizanie ou la division, je les chasse. Parce que cette écurie m'appartient, je l'ai créée. Chez nous, il y a de la solidarité, les gosses sont soudés. C'est ce dont j'ai besoin. J'ai un mental américain, je ne suis pas faux. Quand une personne ne m'intéresse pas, je ne lui parle pas.
Quel était votre premier cachet ?
C'était 30.000 F Cfa, contre Modou Awa Tine, et il m'avait battu d'ailleurs. Pape Sène m'a aussi terrassé pour mon second combat. C'est là que j'ai commencé à chercher des marabouts. Je n'y croyais pas avant, il me suffisait tout simplement de manger du ''dibi'' et de boire du lait. Comme je gagnais dans les ''mbapatt'', j'ai battu Pape Sène deux fois dans ces séances de lutte traditionnelle, je croyais que c'était la même réalité. Par la suite, j'ai enchaîné avec des victoires sur Saloum-Saloum, Alam Dare, Issa Pouye. En 2006, j'ai participé au Claf (Championnat de lutte avec frappe) de Gaston Mbengue. J'ai terrassé Boy Sèye et Balla Diouf. J'ai perdu contre Bathie Séras mais je m'étais qualifié pour la finale, que j'ai perdue face à Lac de Guiers 2. Après le Claf, j'ai pris ma revanche sur Bathie Séras et j'ai affronté Papa Sow, pour une défaite que je n'accepte toujours pas.
Votre dernier cachet contre Tidiane Faye s'élève à combien ?
(Rires) à plus de 30 millions.
Gaston Mbengue veut laisser tomber la lutte pour le football, comment appréciez-vous cela ?
Je ne l'encourage pas en tout cas. Depuis 1992, il fait de grands exploits. Ce n'est pas le moment de partir, il ne faut pas le décourager. Il faut que tout le monde trouve un terrain d'entente et s'unisse car l'union fait la force. Je n'ai pas de préférence particulière pour un promoteur. Je travaillerai avec ceux qui m'engageront et je prie pour eux.
Qu'est-ce que vous dites au monde entier par rapport au nouveau Zoss ?
J'étais un gars qui négligeait tout. Mais maintenant je prends les choses au sérieux. Je suis prêt à tout pour réussir et atteindre le sommet.
Vos relations avec le chanteur Akon ?
C'est un ami, il m'aide à chaque fois que j'ai un combat ainsi que sa mère, et je les en remercie beaucoup. Il est gentil avec moi et il me respecte beaucoup. C'est un de ses oncles qu'on appelle ''Rambo'' qui nous a présentés. Et depuis lors, il m'estime et me soutient. Nous avons tissé une bonne relation et je suis allé le voir à Atlanta (États-Unis), il m'a bien accueilli. Au-delà du rôle de garde du corps, il a ses propres gardes du corps aujourd'hui, nous sommes amis.