QUAND L’ACOUSTIQUE PEINE À SE FAIRE UNE PLACE
Les musiciens qui font de l’acoustique n’arrivent pas très souvent à se faire une place dans la scène musicale sénégalaise - S’ils ne sont pas définitivement installés à l’étranger, ils ne sont pas audibles comme ceux qui font du mbalax
Les musiciens qui font de l’acoustique n’arrivent pas très souvent à se faire une place dans la scène musicale sénégalaise. S’ils ne sont pas définitivement installés à l’étranger, ils ne sont pas audibles comme ceux qui font du mbalax. Une situation qui suscite beaucoup d’interrogations. Car, cette musique, en plus d’être définie comme étant une «bonne musique», est aimée par une certaine partie de la population. L’artiste Yoro Ndiaye qui fait de l’acoustique et le journaliste culturel Alioune Diop expliquent cela par un manque de diffusion de l’acoustique mais aussi parce que ces musiciens n’arrivent pas non plus à trouver leur public.
Ils avaient pourtant brillé de mille feux sur la scène musicale sénégalaise. Mais aujourd’hui, on ne les entend presque plus. Oumar Ndiaye, Boy Marone, Metzo Diatta, Diogal Sakho, ces musiciens qui font de l’acoustique, ont, pour la plupart, déposer leurs baluchons à l’étranger. Aujourd’hui, ils ont laissé la place à de jeunes artistes pas plus talentueux qu’eux certes, mais peut-être compositeurs d’une musique beaucoup plus consommée par les mélomanes sénégalais. L’on se rappelle de l’artiste Oumar Ndiaye, avec son mythique titre «Xoslumann» qui a fait fureur dans les années 90. Aujourd’hui, il s’est installé au Canada désertant le Sénégal. Meissa Niang, artiste sénégalais installé en Finlande est le compositeur du tube «Sawaji» rendu célèbre ces derniers temps par la série «Wiri Wiri». Les sénégalais l’apprécient comme si c’était une nouvelle chanson. Et pourtant, elle a été composée, il y’a de cela plusieurs années. L’artiste compositeur de la musique acoustique Diogal Sakho était visible à la télévision au temps où la chaine nationale, la Rts détenait le monopole de la diffusion. Ses œuvres comme «Samba Alla», «Massa Thiono» passaient en boucle lors des émissions dédiées à la musique. Le natif de Ngor a depuis un certain temps, disparu de la scène musicale. Il s’est établi en Europe.
A la recherche d’un public
«Il y’ a des musiciens qui sont là qui jouent du mbalax pur et dur que beaucoup n’aiment pas. Eux-mêmes disent que ce n’est pas une musique exportable. D’autres pensent qu’ils peuvent proposer autre chose mais cette autre chose-là est acceptée difficilement ici. Ils n’ont pas de public et ça peut pousser à l’exil», explique le journaliste culturel Alioune Diop. Toutefois, selon lui, l’exil des artistes est plus une «question d’option».
Un artiste qui a aussi marqué son temps et qui n’est plus présent au Sénégal, c’est Boy Marone. Il est auteur du tube «Pikine» et «Diar Diar» qui ont cartonné en leur temps. L’artiste n’est plus visible au Sénégal. Après une décennie passée en France, Boy Marone avait décidé en 2012 de retourner au bercail. Il n’est pas visible depuis lors. Et pourtant cet artiste, que le public sénégalais a découvert en 1995, avait réussi à se projeter un avenir musical prometteur. Il a été nominé en 1999 en Afrique du Sud à la musique Awards. Il a été finaliste meilleur espoir masculin africain sous le patronage de Nelson Mandela, Miriam Makébé et Mickael Jackson. Ils sont très nombreux ces artistes de la musique acoustique qui préfèrent vivre à l’étranger. Comme Alioune Diop, l’artiste Yoro Ndiaye qui fait de l’acoustique, lui trouve d’autres raisons qui justifient l’exil de ses «collègues».
«Peut-être qu’ils ont trouvé leurs comptes à l’étranger et puis le public qui consomme plus l’acoustique se situe peut-être en Europe plus ou moins. Ils ont aussi la famille là-bas», relève-t-il. Parmi ces musiciens de l’acoustique qui sont installés à l’étranger, on retrouve aussi Elage Diouf qui vit au Canada et qui vient souvent à Dakar. Mais l’essentiel de sa production se fait à l’étranger.
Manque de diffusion de la musique acoustique
Entre autres raisons qui poussent les musiciens de l’acoustique à migrer vers l’étranger, nos interlocuteurs citent le manque de diffusion de l’acoustique. Yoro Ndiaye tout comme Alioune Diop pensent que la musique acoustique n’est pas promue au même niveau que le mbalax. Ils sont d’avis que le mbalax domine au Sénégal. «L’acoustique a sa place au Sénégal sauf que ce n’est pas assez diffusée. Elle a donc un problème de diffusion parce qu’il n’est pas diffusée au même pied que le mbalax ou le hip hop», a indiqué l’artiste.
Le journaliste à la Rsi embouche la même trompette. «Il faut juste écouter la bande Fm pour se rendre compte que le mbalax marche et je crois que le mbalax est la seule musique qui peut avoir deux à trois émissions dans une grille de programmes. Raison pour laquelle l’autre musique, a du mal à trouver leur public. En dehors du public aussi, ils n’ont même pas où jouer, c’est-à-dire des clubs qui les acceptent», fait observer Alioune Diop. A côté de Meissa Niang, Oumar Ndiaye, Boy Marone, il y’a aussi Jules Guèye qui a déserté la scène musicale depuis un certains temps. Metzo Diatta, avec son single Diembéring en hommage à ce village de la Casamance, a eu à faire parler de son talent. Il est devenu moins présent sur les écrans de télévisions. L’artiste du Fouladou Daby Baldé avait commencé à percer. Lui également a disparu des radars. Quel dommage !