AFRIQUE : LA GRANDE OFFENSIVE RUSSE !
L’offensive enclenchée par Poutine sur l’Afrique, ces dernières années, est loin de s’estomper, eu égard aux initiatives qu’ils ont entreprises pour asseoir leur puissance dans les instances économiques, financières et commerciales du continent
Jadis, si on entendait parler de l’Afrique dans les foras et autres rencontres internationales, c’était pour décrire une image austère du continent. L’évocation de son nom renvoyait d’habitude à la pauvreté, à la faim, à l’insécurité alimentaire, aux coups d’Etat, aux guerres civiles… Mais, ces dernières années, c’est une nouvelle Afrique plus ou moins reluisante qui semble s’offrir au monde. Comme en illustre la forte ruée des grandes puissances économiques qui continuent d’étendre leurs tentacules dans les coins les plus reculés du continent. Au moment où la Chine consolide ses relations avec ses partenaires, les Etats-Unis renforcent leur domination et l’Union européenne densifie sa coopération. D’autres pays comme la Turquie, le Brésil ou l’Inde marquent également leur territoire en Afrique.
La Russie est loin d’être en marge de cette dynamique. Elle imprime de plus en plus son empreinte à travers différents types de coopérations (militaire, économique, diplomatique ou politique). Aujourd’hui, quelques pays sont dans la galaxie russe. On peut citer la Centrafrique où cette présence est de plus en plus visible. En Egypte, les relations sont plutôt tournées vers l’énergie avec la construction de la première centrale nucléaire par la compagnie nationale russe suite à un accord signé avec Le Caire. D’autres pays comme l’Ethiopie, l’Angola, la Namibie et le Mozambique sont également dans le viseur de l’Etat fédéral russe, à travers notamment la coopération militaire.
Autant d’initiatives qui prouvent l’intérêt croissant de la Russie pour le continent où les grandes puissances se livrent à une véritable géo-économie. La Russie se montre plus que jamais déterminée à prendre la place qui lui revient en Afrique, quitte à bousculer l’ordre établi. Une étude de l’Institut français des relations internationales (Ifri), publiée en avril 2019, tente de justifier cette forte affluence en Afrique. Elle explique que cette relance de la politique africaine de Kremlin, qui a débuté vers la fin de l’année 2014, peut se justifier par la conjonction de trois facteurs. Il s’agit des sanctions occidentales adoptées contre la Russie après l’annexion de la Crimée, l’entrée en vigueur de l’Union économique eurasiatique (Uee) et le début des frappes aériennes russes en Syrie (en septembre 2015). La confrontation avec l’Occident s’impose ainsi comme un élément structurant de la politique étrangère russe.
L’offensive enclenchée par Poutine et son gouvernement sur l’Afrique, ces dernières années, est loin de s’estomper, eu égard aux initiatives qu’ils ont entreprises pour asseoir leur puissance dans les instances économiques, financières et commerciales du continent. Pour preuve, le Centre russe des exportations (Rets) a intégré, depuis 2017, la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) comme actionnaire. Ceci permet à Moscou d’avoir voix au chapitre dans cette institution financière panafricaine. Mieux, elle a eu le privilège d’abriter, les 20 et 21 juin 2019, la 26ème édition de l’Assemblée annuelle d’Afreximbank qui a enregistré la participation du Premier ministre Dimitri Medvedev et du ministre des Affaires, Sergueï Lavrov. C’est la deuxième fois, après Beijing (Chine), en 2012, que ces rencontres se tiennent en dehors de l’Afrique. Dans leurs interventions, les deux autorités ont réitéré leur volonté de renforcer la coopération russe avec les Etats africains dans des secteurs aussi stratégiques que l’énergie, les finances, les infrastructures, les technologies, le pétrole et le gaz.
Moscou ne compte guère s’arrêter là puisqu’elle annonce déjà la tenue du tout premier sommet Russie-Afrique à Sotchi (Russie) qui aura lieu du 22 au 24 octobre 2019. Cette rencontre, où sont attendus des chefs d’Etat et de gouvernement africains permettra sûrement à Poutine d’huiler davantage ses relations avec le continent et de légitimer sa présence aux côté des autres puissances économiques. Son statut de membre des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) lui ouvre également un boulevard d’opportunités en Afrique. Autant d’initiatives qui ne manqueront pas de créer de la jalousie chez les partenaires traditionnels du continent.