AFRIQUE SUBSAHARIENNE : DES PERSPECTIVES ÉCONOMIQUES EN CLAIR-OBSCUR
Les États, confrontés à la rareté des financements concessionnels, explorent d'autres alternatives, souvent marquées par des coûts plus élevés, une opacité accrue et des échéances plus courtes.
Le Fonds monétaire international vient de publier l’édition d’avril 2024 des Perspectives économiques régionales : Afrique subsaharienne (PER). Celles-ci révèlent que la croissance va connaître un petit bond qui cachera mal cependant le manque de financements auquel sont confrontés les Etats de la région.
«Une reprise timide et coûteuse !» C’est le constat du Fonds monétaire international (FMI) dans son dernier rapport sur les perspectives économiques en Afrique subsaharienne. A en croire l’institution financière, au terme de quatre années de turbulences, la région semble enfin se rétablir. Elle souligne ainsi que les perspectives s’améliorent progressivement et l’activité économique reprend modestement. «La croissance va passer de 3,4 % en 2023 à 3,8 % en 2024, et près des deux tiers des pays s’attendent à une croissance en hausse», ajoute-telle. Non sans assurer que la reprise économique devrait se poursuivre au-delà de cette année ; et que d’après les projections, la croissance devrait atteindre 4,0% en 2025.
En parallèle, informe le FMI, le taux médian d’inflation a pratiquement été divisé par deux, de presque 10% en novembre 2022 à environ 6% en février 2024. Hélas ! relativise-t-elle, la situation de la région n’est pas au beau fixe, et la pénurie de financement se poursuit. «Les États de la région sont encore en proie à des manques de financement, des coûts d’emprunt élevés et des risques de refinancement, dans un contexte où la mobilisation des recettes publiques nationales reste faible», lit-on dans le rapport du FMI dont «L’AS» détient une copie.
Il indique dans la foulée que ces difficultés de financement contraignent les pays à réduire certaines dépenses publiques essentielles et à réaffecter au service de la dette des fonds censés financer leur développement, ce qui met en péril les perspectives de croissance des générations futures. «La pénurie de financement tient en partie à la raréfaction des sources de financement traditionnelles de la région, en particulier l’aide publique au développement», a-t-il renchéri. Au cours des quatre prochaines années, note le FMI, les besoins de financement bruts extérieurs des pays à faible revenu d’Afrique subsaharienne devraient dépasser les 70 milliards de dollars annuels (soit 6% du PIB).
A l’en croire, les sources de financements concessionnels s’étant raréfiées, les États se tournent vers d’autres solutions, qui se caractérisent souvent par des coûts plus élevés, une plus grande opacité et des échéances plus courtes.Non sans relever que les coûts de l’emprunt, au niveau national comme au niveau international, se sont accrus et continuent d’être élevés pour beaucoup de pays. En 2023, souligne-t-elle toujours, les paiements d’intérêts par les États ont représenté 12% des recettes publiques (hors dons) pour le pays médian d’Afrique subsaharienne, soit plus du double du niveau observé il y a dix ans.
Comment les pays de la région doivent s’adapter à cette situation
L’institution financière internationale estime en outre que le secteur privé n’est pas non plus épargné par la hausse des taux d’intérêts. Et que les perspectives économiques demeurent sujettes à des risques baissiers. Elle fait également savoir que la région reste plus vulnérable face aux chocs mondiaux, en particulier un possible affaiblissement de la demande extérieure et les risques géopolitiques. Par ailleurs, le FMI affirme que les pays peuvent s’adapter à ces difficultés en agissant de manière prioritaire dans trois domaines. Il préconise d’abord aux Etats de la région d’améliorer la situation des finances publiques en augmentant les recettes publiques ; cela demeure la première ligne de défense dans un monde où l’emprunt coûte plus cher et où les possibilités de financement se réduisent. Cependant, souligne-t-il, les pouvoirs publics doivent avant tout limiter le plus possible les répercussions négatives du rééquilibrage budgétaire sur les populations et leurs moyens de subsistance. Pour ce qui concerne le financement, précise-t-il, il y a toujours un besoin urgent de davantage de dons et prêts concessionnels.
Ensuite, le FMI pense que la politique monétaire devrait rester axée sur la stabilité des prix. «À mesure que l’inflation marque le pas, de plus en plus de pays disposeront de marges de manœuvre nécessaires pour baisser les taux d’intérêts.Une coordination accrue des politiques budgétaires, monétaires et de change est indispensable», ajoute-t-il. Enfin, le FMI appelle à mettre en œuvre des réformes structurelles, visant par exemple à accélérer l’intégration commerciale et à améliorer le climat des affaires pour attirer davantage d’investissements directs étrangers ; ce qui pourrait permettre de diversifier les sources de financement et l’économie.