ELEVAGE INTENSIF D'AUTRUCHES A MLOMP
Un projet novateur et…prometteur
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Formidable laboratoire créatif, le projet d’élevage d’autruches de Mlomp explore des pistes complètement nouvelles. Les éleveurs commercialisent la viande fraîche d’autruche, transforment la graisse de cet oiseau en huile, sa peau en cuir, sa fiente en biofertilisant. Autant d’avantages et d’astuces qui font de cet élevage un business lucratif.
Mlomp, à une quarantaine de kilomètres de Bignona. Dans ce village niché au cœur de la Casamance naturelle, c’est la fête pour marquer la visite du ministre de l’Elevage et des Productions animales, Aminata Mbengue Ndiaye. Venu visiter la ferme d’élevage d’autruches, le 19 mars, le ministre a reçu un accueil pour le moins chaleureux.
Pour l’occasion, les habitants se sont parés de leurs atours des grands jours. Pagnes et marinières pour les dames, costumes traditionnels pour les messieurs, chants et danses pour tous. Ici, l’on rivalise d’élégance pour honorer les invités de marque : le ministre, ses directeurs et ses proches collaborateurs.
Sur la place du village, une tente est dressée sous de gigantesques fromagers pour recevoir la délégation ministérielle. A quelques mètres se trouve la ferme qui s’étend sur quatre hectares. Une cinquantaine d’autruches sont regroupées dans des enclos. Elles sont séparées en fonction de leurs âges. A l’est de la ferme, un bâtiment abrite : une salle de découpe de la viande, un couvoir, une salle de massage et une boutique. Loin d’être un élevage de prestige ou simplement contemplatif, la ferme de Mlomp vise avant tout une rentabilité économique.
Lucratif
Les oiseaux arrivés à maturité sont abattus et leurs différentes composantes destinées à la commercialisation. Avec l’autruche, rien ne se perd, tout se transforme. La viande fraîche très prisée est vendue à l’état ou mise dans des boîtes de conserve de 400 g. La transformation respecte scrupuleusement les règles d’hygiène pour garantir aux consommateurs une viande de qualité. Grâce à son poids significatif, l’autruche est pourvoyeuse de viande.
« A l’âge adulte, une autruche peut fournir 40 kg de viande. Vendue à 8000 FCFA le kg filé, la viande a une valeur marchande de 320 000F par autruche en moyenne », explique Baboucar Sambou, président du GIE Etamaya Balokir et exploitant de la ferme.
A côté de la viande, la graisse d’autruche est transformée en huile. Pressée par une machine, la graisse est mise dans un four qui la transforme en huile. Le produit fini permet à la ferme Etamaya Balokir d’avoir d’importantes rentrées d’argent. «Chaque autruche donne en moyenne 110 flacons d’huile. La vente des flacons à 5000 FCFA l’unité donne 550.000 FCFA par autruche ».
Réputée pour ses nombreuses vertus thérapeutiques, cette huile naturelle trouve facilement preneurs. Particuliers et industrie cosmétique se l’arrachent. « L’huile d’autruche contient un degré important d’oméga 3, 6 et 9.
Cet acide oméga fait que l’autruche a le meilleur système immunitaire que tout autre animal. Son huile contient en outre des vitamines E et A », soutient Ousseynou Sambou, secrétaire du GIE Etamaya Balokir. Cette huile est également destinée à d’autres usages. Elle est, par exemple, utilisée pour lutter contre les jambes lourdes, l’arthrite, l’arthrose, l’acné, l’eczéma, les dermatoses, les irritions, les peaux sèches ou ridées, etc.
L’élevage d’autruche permet aussi de fabriquer divers accessoires de mode et d’avoir des matériaux pour l’artisanat. A la ferme de Mlomp, on confectionne des chaussures, des sacs à main, des ceintures et des pochettes avec la peau d’autruche. Grâce à une imagination et une ingéniosité sans limites, les éleveurs transforment également les os de l’oiseau en colliers, la coquille des œufs en objets d’art, les plumeaux en ornements et les excréments en engrais bio…
Cet éventail de produits donne à l’élevage d’autruches une grande rentabilité économique. « Pour chaque autruche, nous pouvons encaisser 1.500.000 FCFA avec la vente des différents produits», renseigne Baboucar Sambou. Outre l’avantage financier, le projet est pourvoyeur d’emplois. La ferme compte 4 employés permanents et plus de 50 emplois temporaires.
Doléances
Fruit d’un partenariat entre le village de Mlomp et l’Association Casamance-Finlande, le projet d’élevage intensif d’autruches a démarré ses activités en 2014. Il a nécessité un investissement de 43 millions de FCFA du partenaire financier et la formation du personnel par le Service régional de l’Elevage de Ziguinchor. Après seulement trois années de mise en œuvre, cet élevage d’autruches tient déjà toutes ses promesses. «Ce projet a sensiblement amélioré le niveau de vie des populations du village de Mlomp et la clientèle ne cesse de croître», s’est réjoui, Sisko Hernandez Leon, Présidente de l’Association Casamance-Finlande.
Mais, la fin de la coopération suscite quelques appréhensions chez les populations. « Avec le départ des Finlandais, il nous faut l’aide des pouvoirs publics pour pérenniser ce projet. L’alimentation et l’importation des autruches coûtent cher », avertit Ousseynou Sambou.
En effet, l’autruche est très vorace. Elle consomme d’importantes quantités de végétaux, de graines, de feuilles, de racines, de bourgeons, de pousses ou de fruits. Ce qui pose un problème d’aliments pour assurer la nourriture correcte de ce troupeau.
En raison de ces difficultés, les gestionnaires de la ferme ont profité de la présence du ministre de l’Elevage pour égrener un chapelet de doléances. Ils ont sollicité l’appui du ministère en matériel pour augmenter la surface d’exploitation et mieux sécuriser la ferme. Ils ont aussi demandé une installation solaire pour mieux assurer l’autonomie de la couveuse et des congélateurs de la ferme.
Pour accompagner le projet, le ministre Aminata Mbengue Ndiaye a prévu de leur offrir un broyeur-mélangeur pour la fabrication d’aliments. Elle a également orienté les gestionnaires du projet vers les programmes agricoles de l’Etat pour la culture de fourrage. Se réjouissant de ce « projet novateur et pilote », le ministre souhaite qu’une telle initiative essaime un peu partout à travers le pays. Au grand bonheur des populations.