LE TER ET LES ÉCONOMIES AUTOUR
Une petite économie s’est développée autour des gares à la faveur de la mise en circulation du Train express régional (TER), qui assure le transport entre Dakar et Diamniadio
Une petite économie s’est développée autour des gares à la faveur de la mise en circulation du Train express régional (TER), qui assure le transport entre Dakar et Diamniadio, a constaté l’APS.
L'arrivée de ce nouveau mode de transport dans la capitale a suscité de nouvelles opportunités dont profitent par exemple les conducteurs de motos dites "Jakarta''.
Ces derniers sont désormais omniprésents à la sortie de la gare de Diamniadio.
Assis sur des bancs ou des tabourets et protégés du soleil par des parasols bien déployés, ils scrutent attentivement l'arrivée de chaque train, à la recherche d'éventuels passagers à transporter dans les quartiers de la nouvelle ville ou dans ses environs.
Une vingtaine de motos bien alignées sont ainsi prêtes à démarrer à la moindre sollicitation. Ces conducteurs de “Jakarta” fréquent les lieux depuis le lancement, en 2017, des chantiers du Pôle urbain de Diamniadio, avec la présence de nombreux ouvriers.
Ils affirment que leur chiffre d'affaires est en hausse avec la mise en circulation du TER.
A l'image de Cheikh Ahmadou Bamba Mbaye, la plupart d’entre eux exerçaient d'autres métiers avant de se reconvertir en conducteurs de motos "Jakarta".
Habillé d'un boubou bleu assorti d'un gros bonnet qui cache sa chevelure, il affirme : “Tous ceux que voyez ici avaient leur métier. Mais, depuis quelques années, nous nous sommes reconvertis dans cette activité de +thiak-thiak+ [terme désignant le transport des passagers par les moto-taxis ou Jakarta], pour subvenir à nos besoins et ceux de nos familles."
“Parmi nous, il y en a qui ont tenté l'émigration irrégulière”, révèle-t-il, en montrant un jeune conducteur d'une vingtaine d’années, les yeux rivés sur son téléphone.
Ces conducteurs se sont constitués en un collectif qui compte environ 50 membres.
"Aucun passager n'a eu de perte de bagage ni été victime de vol ou d'indiscipline venant de nous'', assure Cheikh Bamba Mbaye, qui fait office de chargé de communication dudit collectif.
“Vous avez constaté que le lieu est très bien organisé. Nous avons même une caisse sociale […] dans le but de s'entraider et de se soutenir mutuellement en cas de besoin”, explique M. Mbaye.
“Certes nos tarifs, comparés à ceux des bus Dakar Dem Dikk, sont plus chers. Néanmoins, les passagers préfèrent les motos Jakarta. Cela est dû à la rapidité et la sécurité du service que nous offrons aux clients”, reconnait-il.
Au-delà des cotisations et versements de caution, leur structure dénommée “Thiak-Thiak Pôle urbain Diamniadio'', ”compte confectionner des cartes de membre, des casques de protection et des gilets''. Néanmoins, pour formaliser leur travail, ces conducteurs demandent l'appui et l'accompagnement des autorités étatiques.
“Nous souhaitons collaborer avec l'Etat dans le but de nous formaliser. Malheureusement, nous peinons toujours à les rencontrer pour leur exposer nos doléances”, lance Ibrahima Sané, debout derrière son collègue Bamba. Les conducteurs confient, en effet, qu'ils sont priés de quitter les lieux.
A quelques mètres du lieu de stationnement des motos, se dresse la gargote de fortune de mère Seynabou Saye, une habitante de Bargny qui rallie le site chaque jour par le TER.
Elle explique que c'est sa fille, Mariétou, qui "gère la gargote, aménagée récemment grâce à l'appui de ces vaillants conducteurs".
"Nous sommes ici bien avant l'arrivée du TER. Depuis la mise en circulation du TER, les choses sont améliorées. Avant, nous ne vendions qu'aux ouvriers mais maintenant, avec le TER, il y a même des passagers qui se restaurent ici'', se réjouit-elle.
“Avec le TER, on s'en sort bien. On se frotte bien les mains. Notre bénéfice quotidien peut avoisiner 11.000 francs CFA”, renchérit-elle, le sourire aux lèvres.
Vêtue d'une robe de couleur verte, Madame Saye indique qu'il se pose un problème de sécurité du fait qu'il n'est pas possible de "vendre à certaines heures de la nuit.''
Aly Camara est un habitué de la gargote. Assis sur une chaise, le photographe passe sa commande pour le petit déjeuner. "Pain omelettes au menu'', lance-t-il.
“Chaque jour, je quitte Keur Massar pour rallier les sphères ministérielles de Diamniadio. Les motos-Jakarta sont non seulement plus rapides, mais aussi j’y trouve du confort et de la sécurité. Les conducteurs sont disponibles et courtois, j'apprécie bien leur travail”, témoigne-t-il.
Camara plaide pour “un accompagnement de l'Etat” en faveur de ces transporteurs. “Avec la problématique du chômage de nos jours, si des jeunes s'efforcent de trouver des voies et moyens pour décrocher un boulot avec un revenu journalier de 5.000 Fcfa, l'Etat doit se rapprocher d'eux et les accompagner'', dit-il