L'ÉCO ATTENDRA FACE AUX INCERTITUDES
Si la volonté de souveraineté est légitime, la mise en place effective d'alternatives au franc CFA semble encore incertaine au regard des défis macroéconomiques
La monnaie unique des pays francophones d'Afrique de l'Ouest, le franc CFA, fait l'objet de nombreuses critiques ces dernières années. Symbole de la domination économique de la France, sa réforme est jugée nécessaire par les pays membres qui veulent plus d'autonomie. Pourtant, son remplacement par l'éco se fait attendre. Quels sont les enjeux et les défis d'une telle transition ? Émilie Laffiteau, économiste à l'IRIS, apporte un éclairage sur ces questions épineuses.
Bien que toujours utilisé au quotidien, le franc CFA souffre d'un rejet croissant dans les opinions publiques ouest-africaines. Symbole de la colonisation, il est accusé de freiner le développement économique par son arrimage à l'euro. Si l'accord de 2020 a permis d'entamer une réforme en transférant la gestion des réserves à la BCEAO, la France conserve un droit de regard sur la politique monétaire.
La transition vers l'éco, monnaie unique souhaitée au sein de la CEDEAO, tarde cependant à se concrétiser. Selon Mme Laffiteau, le contexte économique mondial défavorable incite à la prudence. Le franc CFA offre une certaine stabilité tandis que de nouvelles devises seraient vulnérables. Elle identifie trois scénarios : une éco commune à 15 pays incluant le Nigeria, une éco dans l'UEMOA seule, ou le maintien du franc CFA avec de simples changements cosmétiques.
Chacun comporte des risques. Le premier nécessiterait une longue phase de convergence entre économies contracycliques. Le second poserait la question de la garantie française. Le troisième ne répondrait pas à l'aspiration à plus d'autonomie. Si la volonté de souveraineté est légitime, la mise en place effective d'alternatives au franc CFA semble donc encore incertaine au regard des défis macroéconomiques. Le débat sur l'avenir monétaire de la zone franc est loin d'être résolu.