LES INDUSTRIELS SAOULÉS PAR LA CONCURRENCE
Depuis trois mois environ, les industries travaillant avec des produits alcoolisés ont des difficultés pour écouler leurs produits

Depuis trois mois environ, les industries travaillant avec des produits alcoolisés ont des difficultés pour écouler leurs produits. La raison en tient au vote de la dernière Loi des finances rectificative qui prévoit une hausse de 50% au moins sur tous les liquides alcoolisés.
Les consommateurs d’alcool sont à la peine depuis l’entrée en vigueur des dispositions de la dernière Loi de finances rectificative (Lfr) en juin dernier. Les prix de boissons alcoolisées sont passés, presque partout, du simple au double. Les détaillants qui hésitaient à appliquer les nouvelles mesures ont fini par s’y résoudre, vu que leurs différents fournisseurs ont été les premiers à s’y soumettre. Et même les marques étrangères ont connu une hausse similaire.
Comme dit plus haut, c’est la Lfr votée au mois de juin dernier qui est la base légale de ces augmentations. Cette dernière prévoit une hausse de 65,6 milliards de francs supplémentaires, destinés à permettre, entre autres, à l’Etat de faire face à certains engagements envers les partenaires sociaux notamment, sans compter la couverture d’une facture pétrolière beaucoup plus importante que prévu.
Parmi les niches destinées à couvrir les 65,6 milliards dont l’Etat a besoin, il y a les boissons alcoolisées, la téléphonie, l’immobilier et les assurances. Pour ne parler que du premier produit, la Lfr 2018 indique la mise en place d’une taxe de 50% qui frappe «les alcools et liquides alcoolisés». Le document spécifie : «En ce qui concerne les boissons alcoolisées, il est fait application, quel que soit le contenant, d’une taxe additionnelle déterminée comme suit : -1 500 francs par litre pour les alcools d’un tirage supérieur à 6° d’alcool pur et inférieur ou égal à 15° ; – 5 000 francs par litre pour les alcools d’un tirage supérieur à 15° d’alcool pur».
Si bien sûr les boissons alcoolisées consommées dans ce pays n’atteignant quasiment pas ce degré, elles ont aussi subi les effets de la hausse car, comme l’explique un fabricant de parfum, «les alcools sont vendus quasiment purs par les distillateurs, et coupés en cours de transformation, selon les besoins particuliers». Ainsi, un fabricant de boisson alcoolisé n’aura pas les mêmes besoins qu’un fabricant de parfum ou d’alcool médical.
Ainsi, aussi bien les débits de boisson que les grandes surfaces ont réajusté les tarifs des boissons, dont une grande partie a doublé de prix. Mais les produits parfumés qui comprennent aussi une bonne dose d’alcool ont également connu une hausse.
Ce qui fait dire à plusieurs producteurs que l’Etat du Sénégal, dans sa politique fiscale, en est toujours à vouloir traire la vache jusqu’au sang, «au lieu de chercher à augmenter la quantité de son troupeau».
Ils expliquent que nombre de sociétés qui produisent des boissons alcoolisées comptent arrêter cette production. Leurs produits ne sont plus compétitifs par rapport à ceux qui viennent de l’extérieur. Même la plus grande compagnie de production de boissons alcoolisées est en train de voir à quel niveau réduire ses dépenses pour préserver ses marges bénéficiaires.
Ce qui veut dire en clair que les consommateurs trouveront toujours à consommer, mais il risque de leur être toujours plus difficile de consommer sénégalais dans les années à venir. Et la même chose est en train de se passer dans le secteur de la parfumerie.
En réaction à la hausse de la taxe, certaines usines de parfum ont réduit les quantités qu’elles achetaient sur le marché local, car ici aussi, le calcul est qu’à ce prix, produire du parfum à Abidjan, le transporter à Dakar pour le vendre coûtera facilement bien moins cher que le produire ici, même avec des intrants locaux.
Avec le marasme introduit actuellement par ce réajustement des prix, les consommateurs qui en ont les moyens s’approvisionnent dans les boutiques free shop des aéroports lors de leurs voyages, ou auprès de leurs connaissances diplomates qui, à Dakar, disposent de boutiques qui leur fournissent à des tarifs hors taxe. Ce qui réduit d’autant les marges de l’Administration fiscale. Et en fin de compte, ce que l’Etat parvient à obtenir avec sa mesure, c’est de mettre en difficulté certaines entreprises qui, jusqu’à présent, marchaient très bien.