« DES MESURES SONT PRISES POUR QUE LES ÉLÈVES PUISSENT, LE JOUR DE LA RENTRÉE, REGAGNER TRANQUILLEMENT LES SALLES DE CLASSE »
Le secrétaire général du ministère de l’Education nationale, Khady Diop Mbodji, fait le point sur les préparatifs de la rentrée, notamment les défis qui l’attendent à l’aune de cette nouvelle année - ENTRETIEN
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A un jour de la rentrée scolaire 2018/2019 – ouverture des classes, demain, mardi, pour le personnel enseignant et jeudi prochain, le 04 octobre, pour les élèves, le secrétaire général du ministère de l’Education nationale, Khady Diop Mbodji, fait le point sur les préparatifs de la rentrée, notamment les défis qui l’attendent à l’aune de cette nouvelle année. Dans cet entretien, elle nous communique en exclusivité les résultats du Bfem (52,11%) et du Cfee (55,47%), non sans livrer les efforts fournis par le gouvernement pour la réussite de tous les apprenants. Sur la situation dans les écoles et établissements, l’ancienne directrice de l’Enseignement élémentaire explique l’état des lieux fait par le ministère pour savoir le nombre précis d’écoles envahies par les eaux et annonce des mesures pour assurer la salubrité dans ces structures scolaires.
L’année 2017/2018 a été marquée par des grèves des syndicats d’enseignants, obligeant le gouvernement à procéder au réaménagement du calendrier scolaire. Les résultats du baccalauréat sont connus. Peut-on avoir de manière officielle ceux du Bfem et du Cfee ?
Comme vous l’avez rappelé l’année scolaire précédente a été marquée par la grève des enseignants qui a effectivement perturbé le bon déroulement des enseignements apprentissages. Fort heureusement, les plus hautes autorités ont pris en charge la question et sont parvenues à des accords avec les syndicats d’enseignants et nous espérons que l’année à venir se déroulera dans le calme et la sérénité. Pour revenir à votre question, je dois rappeler que les résultats du baccalauréat se sont établis au taux de 35,16%, ceux du Bfem à 52,11% et ceux du Cfee à 55,47%.
Les acteurs, notamment les parents d’élèves et les syndicats d’enseignants, ont dénoncé les mauvais résultats. Quelle appréciation faites-vous des résultats, sachant que vous êtes loin des objectifs fixés dans le document de normes et standards de qualité en éducation et en formation de février 2013 par le ministère de l’Education ?
Je dois préciser que les résultats aux examens, cette année, se sont améliorés, exceptés ceux du Cfee. Car, pour ce qui est du Bfem, nous sommes passés de 45,11% en 2017 à 52,11% en 2018, soit un gain de 07 points de pourcentage ; concernant le baccalauréat nous avons eu un gain de 04,50 points de pourcentage en passant de 31,60% en 2017 à 35,16% en 2018. C’est avec le Cfee que nous avons eu une très légère baisse de 01,27 point de pourcentage, puisque les résultats à cet examen sont passés de 56,74% en 2017 à 55,47% en 2018. Globalement, si on part de 2013 à maintenant, aussi bien pour le Bfem que pour le Cfee, on a enregistré des bonds importants. Pour le Cfee, en 2013 on était à 33%, en 2016 à 58% et en 2017, 56%. Pour le Bfem, en 2013, on était à 41%, en 2015, à 43%, en 2016, à 51% et cette année à 52%.
Cependant, nous ne versons pas dans l’autosatisfaction. Nous travaillons à la réussite massive à tous les examens et concours, je dirais à la réussite de tous les apprenants. C’est pourquoi d’ailleurs, j’en profite pour appeler les syndicats d’enseignants à toujours prendre en compte l’intérêt majeur des apprenants. Quant aux parents d’élèves, nous considérons qu’ils sont des partenaires privilégiés de l’éducation, nous les encourageons à croire à l’école, à croire à notre engagement à travailler inlassablement à la réussite des enfants.
Tous les actes que nous posons vont dans le sens d’améliorer les résultats des apprenants. Depuis quelques années nous accordons la priorité aux premiers apprentissages pour installer les compétences de base au niveau de l’enseignement élémentaire à travers les disciplines fondamentales que sont la lecture et les mathématiques. Plusieurs initiatives sont prises à travers les projets tels que Lecture pour tous, projet d’amélioration de apprentissages en mathématiques à l’élémentaire, Ecoles et langues nationales et Projet d’amélioration de la qualité dans l’éducation de base.
Quels sont les facteurs explicatifs des résultats des évaluations certificatives nationales, au-delà du quantum horaire grugé ?
Vous savez, un résultat quel qu’il soit est très souvent le produit d’une multitude de facteurs et en éducation, en plus de la multiplicité des facteurs, il s’y ajoute la complexité de ceux-ci. Dans votre question vous avez avancé un de ces facteurs qui lui-même est complexe, à savoir, le quantum horaire ou temps scolaire ou temps d’apprentissage. Les spécialistes en éducation recherchent les causes des performances des apprenants dans un ensemble de facteurs qui sont souvent reliés à l’environnement d’apprentissage, l’école, la classe, l’enseignant et l’élève lui-même, etc. Il convient de noter que le gouvernement du Sénégal est conscient du fait que la réussite des élèves doit être la priorité de toute action éducative.
C’est pourquoi, d’importants efforts sont en train d’être faits pour améliorer les conditions d’enseignement/apprentissage et favoriser ainsi la réussite de chaque élève. A titre d’exemple, le Programme zéro abris provisoires dont le lancement a été fait le 30 mars 2018, à Tambacounda. D’autres interventions dans ce domaine sont en cours comme le projet de renforcement de l’appui à la protection des enfants dans l’éducation au Sénégal ; le projet d’appui au système d’éducation de base qui intervient dans les régions de Kaolack, Kaffrine, Sédhiou, Kolda et projette de construire et équiper 37 écoles élémentaires et 13 collèges, de réhabiliter environ 300 salles de classes et d’améliorer les environnements pédagogique et didactique de l’éducation de base avec un accent particulier sur l’éducation des filles.
Parlons des préparatifs de la rentrée scolaire 2018. Au niveau du ministère de l’Education, quels sont les efforts engagés pour une bonne ouverture des classes pour le personnel enseignant et les élèves ?
Comme d’habitude, la rentrée pour l’année scolaire 2018/ 2019 a été bien préparée. Le ministère a émis une note d’orientation à l’endroit du niveau déconcentré qui identifie les mesures à prendre et les actions majeures à réaliser. Cette note transmise aux Gouverneurs et aux Inspecteurs d’Académie a facilité la tenue des rencontres ; ensuite, le séminaire de rentrée, présidé par le ministre de l’Education nationale, a d’abord permis de faire le point sur l’état de la mise en œuvre des ambitions déclarées pour l’année scolaire précédente et fixer de nouvelles ambitions pour l’année scolaire à venir. Au nombre de huit (8), ces ambitions tournent autour du renforcement du dialogue social, de l’intensification du pilotage pédagogique, de l’amélioration de la gouvernance du secteur, de la gestion rationnelle des ressources humaines et de la carte scolaire, du déploiement à l’échelle du Système d’information et de management du système d’information (Simen), la promotion de l’enseignement des Sciences et de la technologie et le renforcement de l’éducation aux valeurs civiques, morales et environnementales. Sans oublier la Semaine nationale de la propreté à l’école (Snpe) dont l’objectif majeur est d’arriver à rendre nos établissements scolaires propres, accueillants et fonctionnels à la rentrée afin de contribuer au démarrage effectif et à temps des enseignements/apprentissages, dans l’esprit du slogan « Ubbi tay, Jang tay ».
Au moment où je vous parle, les autorités académiques, en rapport avec les services compétents de l’Etat sont à pied d’œuvre pour faire en sorte que toutes les structures scolaires soient prêtes pour accueillir les élèves le Jeudi 04 octobre 2018.
A Saint-Louis, plusieurs écoles sont envahies par les eaux, les ordures. Avez-vous fait un état des lieux dans le pays pour connaître la situation des écoles et établissements ?
Oui, les eaux dans les écoles, ce n’est pas seulement à Saint-Louis, c’est pratiquement dans beaucoup de localités. Mais comme je vous ai dit l’état des lieux a été fait au niveau de chaque académie, le nombre précis d’écoles envahies par les eaux est connu et toutes les mesures sont en train d’être mises en œuvre pour assurer la salubrité dans ces structures scolaires afin que les élèves puissent, le jour de la rentrée, regagner tranquillement les salles de classe. Les écoles se trouvant dans les zones inondables ne sauraient être épargnées mais il faut retenir qu’il s’agit d’un nombre très infime d’écoles. Notre rôle consiste à mettre un dispositif de pompage, en rapport avec le groupement des sapeurs-pompiers et les collectivités territoriales.
Quelles sont les dispositions prises par le ministère pour matérialiser le concept Ubbi Tey, Jang Tey ?
Comme vous le savez, depuis quelques années nous nous engageons à faire du Ubbi tey, Jang tey. Ce qui devrait d’ailleurs être la règle et non l’exception. En tous cas pour ce qui concerne le M.E.N, tout est en train d’être mis en œuvre pour que les enseignements/apprentissages démarrent le jour de la rentrée.
D’ailleurs nous voulons aller au-delà de Ubbi tey Jang tey, et préconiser l’effectivité des cours le premier jour et tous les autres jours.
J’en profite d’ailleurs pour rappeler aux parents que la participation aux cours au début de l’année n’est pas strictement conditionnée au paiement des frais de scolarité pour les élèves des collèges et lycées publiques du Sénégal. Les administrateurs de ces établissements en rapport avec leurs conseils de gestion vont fixer un délai de rigueur pour s’acquitter de ces frais. Je les exhorte donc à faire en sorte que tous les enfants se présentent dans les établissements le jour de la rentrée pour que celle-ci soit réellement effective.
Pour la présence des personnels, le ministère a pris toutes les dispositions utiles pour tenir la commission de mutation des personnels depuis le mois de juin, l’affectation des nouveaux professeurs et inspecteurs sortants de la Fastef. Il ne reste que pour les élèves–maîtres en formation dans les Centres régionaux des personnels et pour qui l’évaluation finale se fera dans les jours à venir.
Pouvez-vous rassurer les élèves et parents pour une année scolaire apaisée, sachant que les syndicats ont annoncé les couleurs d’une année mouvementée ?
Ce que nous pouvons dire c’est que le ministère de l’Éducation nationale, conformément à ses missions a commencé à mettre en œuvre tout ce qu’il faut pour une rentrée effective et pour que les enseignements/apprentissages se déroulent normalement.
S’agissant des accords avec les syndicats, sachez que le gouvernement conformément à la volonté du Chef de l’État qui a été réitérée tout récemment lors du conseil des ministres de la rentrée, et en train de tout mettre en œuvre pour que les accords soient respectés. A cet effet plusieurs rencontres ont déjà été tenues avec les syndicats. On ne peut que souhaiter que les différentes parties s’entendent pour le bien de l’école sénégalaise et de la société.
Des efforts importants pour la prise en charge des revendications des enseignants, ont été déployés ; aujourd’hui, le point de crispation que constituait le système de rémunération connait un début de mise en œuvre avec les rencontres tenues à Ngor Diarama et à Saly, et ce, en plus de la mise à disposition du rapport de l’étude sur la question. Pour ce qui concerne le M.E.N, les rencontres mensuelles (cadre d’échanges entre le ministre de l’Education nationale et les partenaires sociaux) reprennent le mardi 02 octobre 2018. Le Premier ministre a instruit les autres départements ministériels à initier ce genre de rencontres pour le monitoring du protocole du 30 novembre 2018.
Le Siens dénonce votre inertie sur la prise en charge de leurs revendications. Qu’en dites vous ?
Le M.E.N a toujours été présent aux côtés des organisations syndicales quant à la prise en charge de leurs revendications. Concernant les revendications du Siens, dès la réception du préavis, le ministre de l’Education a pris l’initiative de les rencontrer et d’étudier les points soulevés en vue de trouver des solutions. Plusieurs rencontres ont été ensuite tenues sur leurs préoccupations dont celles des 13 avril et 7 juin 2018, d’ailleurs cette dernière a fait l’objet de compte rendu adressé au Premier ministre. Je les ai moi-même rencontrés le 3 juillet 2018, pour dire que le M.E.N porte une attention particulière aux revendications de ce syndicat. A cela, je peux ajouter les efforts fournis pour l’amélioration de leurs conditions de travail avec la dotation en véhicules, mobiliers de bureaux. Pour dire que le ministre de l’Education leur a prêté une oreille attentive et a pris des initiatives pour satisfaire leurs revendications.
Où en êtes-vous avec le projet de résorption des abris provisoires ?
En 2012 on en était à 18% d’abris provisoires en valeur relative ce qui correspondait à plus de 8000, actuellement nous en sommes à moins de 10%. Le projet a démarré, comme je l’ai annoncé tantôt et bientôt le Ministère atteindra son objectif de résorption des abris provisoires.
Ce projet s’est fixé comme objectifs de construire et équiper 4 189 salles de classe, 4 534 Blocs administratifs et 2 264 Blocs d’hygiène dans les écoles élémentaires ; 1589 salles de classe, 97 Blocs administratifs, 206 Blocs d’hygiène et 194 500 ml de clôture dans les collèges et enfin 1591 salles de classe, 70 Blocs administratifs, 28 Blocs d’hygiène et 47 000 m de clôture dans les lycées. C’est une intervention d’envergure de plus de 100 milliards et concerne toutes les régions du Sénégal. Il se fera sur 3 années et divisé en 4 lots. Le premier lot a déjà démarré et est à plus de 50% de taux d’exécution.
Quelles sont les innovations du ministère pour l’année académique 2018/2019 ?
Pour cette année scolaire, le ministère s’est fixé comme ambition de développer le numérique et à tous les niveaux. Il y aura le déploiement de notre système d’information et de management du ministère, le Simen avec le lancement de l’identifiant de l’Education nationale qui a été fait au mois de juillet à Diourbel. Le Simen qui permet à terme une meilleure utilisation des Tic dans la conception, la mise à jour et le suivi-encadrement des politiques éducatives, ainsi que l’amélioration des services rendus aux usagers, le renforcement des performances et rendements scolaires et l’amélioration de la qualité de la gestion de l’Education.
Il y aura l’ouverture de 64 daaras modernes dans 7 Académies, ce qui constitue une première au Sénégal. La modernisation des datas vise à améliorer l’équité et sera accompagné par un cadre juridique et réglementaire, la mise en œuvre d’un curriculum pertinent et consensuel permettant aux enfants d’acquérir un enseignement religieux et d’autres compétences de la vie courante, la formation des séries daaras, des maîtres coraniques et d’autres acteurs impliqués.
Il y a également la poursuite de l’introduction des langues nationales comme langues d’enseignement dans 7 régions et au niveau des 3 premières années de l’élémentaire sans compter la promotion de l’éducation aux valeurs suite à la dynamique enclenchée depuis la semaine nationale de l’Ecole de base.
Le Médiateur de la République a fait une sortie pour déplorer le nombre d’élèves dans le Ferlo et le Fouta qui ne disposent pas de salles de classe et le risque de déperdition ? Qu’en dites- vous ?
Il y a certes des problèmes de scolarisation dans cette partie du Sénégal mais il faut retenir que le gouvernement a fait beaucoup d’investissement en termes de construction d’écoles mais aussi d’affectation de personnels dans un souci de rétablir l’équité. Ces efforts vont se poursuivre avec le projet zéro abris provisoire et les autres interventions en perspective.