L’ABSENCE DE DIALOGUE FRANC INDEXÉE
Raisons de la crise du secteur éducatif
La crise qui secoue le système éducatif était au cœur des débats hier, au Centre de recherche ouestafricain. La plupart des intervenants ont recommandé l’instauration d’un dialogue franc, d’un climat de confiance, la cohérence dans les politiques mais aussi le respect des engagements pris.
Le règlement de la crise qui secoue le secteur de l’enseignement passe nécessairement par l’instauration d’un dialogue franc, d’un respect mutuel et de la cohérence dans les politiques. C’est en substance ce qu’a déclaré hier, le professeur Bouba Diop. Ce dernier, qui prenait part à la conférence organisée au centre africain pour la recherche, soutient que le Gouvernement doit jouer «carte sur table».
Selon lui, «si une des parties pense qu’elle a la vérité et qu’elle impose ses vérités, il y a des difficultés». «Les gouvernements qui se succèdent continuent de raconter les mêmes histoires, de faire des promesses, qu’ils ne peuvent pas respecter parce qu’ils n’osent pas dire la vérité», a-t-il déclaré.
Poursuivant son analyse sur le système éducatif, M. Diop s’interroge sur la pertinence de la politique de l’Etat. «Est-ce que vous avez entendu le Gouvernement parler d’une commission de suivi ? Par quel miracle vous allez faire en sorte qu’il n’y ait pas de conflit permanent ?
Quand vous faites des propositions, les gens ne vous écoutent pas, ils se croient malins en prenant ce qui les intéresse, je ne suis pas d’accord avec cette méthode», a-t-il regretté. Pour lui, le débat de fond sesitueàceniveau:iln’yapas un dialogue franc entre les acteurs. «Ils font la politique de l’autruche et ça devient le dialogue des autruches, chacun regarde de son côté et fait ce qu’il veut», a-t-il ajouté.
Abondant dans le même sens, Pr Boubacar Barry soutient que l’Université est prise en «otage» par trois éléments (l’Etat, les étudiants et les enseignants). D’après ce professeur à l’Université de Dakar, il n’y a pas un dialogue sincère entre ces forces. Selon M. Barry, pour sortir de cette «crise profonde», il faudra encore attendre 10 voire 15 ans.
Pour amener l’Université dans son «état normal», il préconise l’instauration d’une «médiation qui sera en mesure de réunir ces 3 éléments à savoir l’Etat, les enseignants et le Gouvernement et que ce dernier tienne aussi ses engagements». «Il faut rompre avec les années universitaires de 4 mois, on ne peut pas avoir une bonne formation à ce rythme. Il faut tout faire pour arriver à une année scolaire de 9 mois», a-t-il recommandé.
Invitée à cette rencontre, la présidente du Haut conseil pour le dialogue social a énuméré quelques difficultés qui sont à l’origine de cette crise quasi-permanente dans ce secteur. Selon Innocence Ntap Ndiaye, «les parties ne se donnent pas les moyens, après la signature des accords, de prendre toutes les mesures idoines pour créer les conditions de leur mise en œuvre consensuelle». De même, elle a souligné «l’absence ou le non-fonctionnement du comité de suivi».
«Les dispositions sont rarement prises en amont pour que d’une part, les parties s’accordent sur les modalités de mise en œuvre des accords, d’autre part de veiller à ce que les incidences financières soient prises en charge dans la loi des finances initiale», a-t-elle déploré.
Pour Mme Ndiaye, «il serait souhaitable dans ce cadre, de prendre des dispositions pour que les comités de suivi des accords soient dotés de la capacité de veiller de manière plus active à la mise en œuvre des accords de manière consensuelle». «En procédant ainsi, l’on se place dans une perspective de tirer pleinement profit de la gouvernance participative», a-t-elle dit.
Pour Innocence Ntap Ndiaye, si de telles dispositions ne sont pas prises, «la confiance entre les parties prenantes s’érode davantage» alors que «la confiance entre les parties est l’un des socles du dialogue social sincère». Dans son exposé, la présidente du Haut conseil pour le dialogue social a rappelé que son organe appelle à «la restauration des règles de la cogestion pour dépasser l’escalade de la conflictualité».
Pour Mme Ndiaye, les causes conjoncturelles de ce conflit restent «l’intensification du recours à l’extrémisme, l’exercice de l’autorité de manière unilatérale de la part de l’Etat-employeur, quant aux travailleurs, c’est le recours à l’interruption du travail». «Le dialogue social doit être au cœur de la préoccupation de tous les acteurs», a-t-il appelé.