L’ECOLE EN SURCHAUFFE
Une école qui renoue petit à petit avec ses vieux démons, sur fond de grèves et de mouvements d’humeur des personnels enseignants : voilà le schéma que le système éducatif est en train de renvoyer à quelques encablures de la fin de l’année académique
Une école qui renoue petit à petit avec ses vieux démons, sur fond de grèves et de mouvements d’humeur des personnels enseignants : voilà le schéma que le système éducatif est en train de renvoyer à quelques encablures de la fin de l’année académique. Le Saes, le G7 etle G20 sont en mouvement de grève entre le lundi 21 et le mercredi 23 juin. Paradoxe cependant ; ce ne sont seulement les revendications classiques qui poussent les enseignants, du Supérieur à l’élémentaire, à hausser le ton, mais plus des violences perpétrées par des potaches et autres sur les propres… encadreurs, toute chose ayant fini par susciter une levée générale des boucliers.
Après la pause Covid-19 qui a contraint l’école sénégalaise à près de six mois de vacances scolaires forcées et à des gaps drastiques dans l’appropriation des connaissances que les schémas de remédiation ont encore du mal à résorber, l’école sénégalaise était appelée, comme partout ailleurs, à redoubler d’effort et d’investissement pour combler les gaps. L’état de grâce obtenu du fait de l’engagement des différents acteurs et partenaires de l’école a presque tenu le temps de l’année scolaire 2020-202, ponctuée qu’était d’une réorganisation méthodique de l’agenda des enseignements ayant démarré depuis le 12 novembre dernier. Seulement, à quelques encablures de la fin de l’année scolaire, revoilà les vieux démons de la perturbation des apprentissages qui pointent le bout du nez.
A la seule différence que cette fois, les motifs vont au-delà des revendications statutaires, financières et sociales des enseignants, toutes branches et tous niveaux d’enseignement confondus. C’est ainsi que depuis hier, lundi 21 juin 2021, le Saes (Syndicats autonome des enseignants de l’université) exécute trois (3) jours de grève, au motif de l’agression d’un professeur à l’Ucad. Aussi intrigant que cela puisse paraitre, ces turbulences à l’Université Cheikh Anta Diop ne sont pas ainsi le résultat d’un mot d’ordre des étudiants même s’ils en sont la cause. Le syndicat majoritaire de l’Université a décrété, à partir d’hier, lundi 21 juin, 72h de grève pour réclamer la traduction des étudiants auteurs des violences contre certains de leurs membres au Conseil de discipline et leur sanction. Face « aux agressions inhumaines, aux actes d’incivilité et de vandalisme ainsi qu’aux insanités dont certains collègues ont été victimes », le Saes demande aux enseignants de réduire leur mobilité au sein du campus jusqu’à ce que l’autorité académique apporte des réponses concrètes pouvant garantir la stabilité et la sécurité de la communauté de l’Ucad.
LE G7 EN DÉBRAYAGE ET GRÈVE TOTALE
Autre niveau d’enseignement, même vague d’indignation contre les violences exercées sur des enseignants et professeurs. Comme les cas listés parles syndicats d’enseignants, récemment, à Kébémer où un professeur de philosophie a été victime d’une agression ; à Saint-Louis (au lycée Cheikh Oumar Foutiyou Tall), à Dakar (au lycée Blaise Diagne), à Boucotte Diembéring, à Mbour (au lycée de Ndiaganiao CEM de Nianing, à Thies (au lycée de FAHU), et autre lycée de Bambey sérère. Pour contrer cette violence qui est en train de s’enraciner en milieu scolaire, le G7 de l’enseignement s’est mobilisé pour dénoncer les agissements de certains élèves.
Pour marquer le coup d’ailleurs, les enseignants sont appelés à observer scrupuleusement le plan d’action défini. Une grève totale est ainsi prévue demain, mercredi 23 juin 2021, et un débrayage ce jour, mardi 22 juin 2021. Tout en réitérant son soutien à tous les personnels de l’éducation qui sont confrontés à des phénomènes de violence, dans l’exercice de leur métier, le G7 a engagé ses militants, partout où cette violence s’exercera, à faire bloc et à exiger des autorités des sanctions exemplaires et dissuasives.
Des sanctions qui tardent car, selon le syndicaliste Abdou Faty, au lieu de condamner ces écarts des élèves, les autorités et les associations autour de l’école mettent la pression sur les enseignants pour mettre un terme aux poursuites et aux procédures de sanction. « Elles s’associent très souvent avec d’autres acteurs de l’école pour mettre la pression sur les enseignants violentés et les obliger à passer l’éponge » relève le secrétaire général du Sels/A.
Pour Abdou Faty, dans chacun de ces cas, les autorités académiques et administratives ont montré une « faiblesse coupable confortant ainsi les élèves dans un sentiment d’impunité ». Il faut cependant dire qu’au-delà de ces cas répertoriés d’enseignants violentés, le G7 qui regroupe des organisations comme le Saemss, le Cusems, le Sels, le Sels/A, l’Uden, le Snelas/Fc et le Siens est aussi en mouvement pour décrier «l’immobilisme » des autorités par rapport à la mise en œuvre des accords signés, malgré leur patience dans le contexte de la pandémie.
LE G20 AUSSI EN MOUVEMENT
Au même titre que le G7, le G20 qui est un cadre regroupant une vingtaine de syndicats d’enseignants de l’élémentaire et du moyen secondaire au Sénégal, est lui aussi entré en mouvement pour décrier les violences exercées sur les enseignants. Dans une déclaration en date d’hier, lundi 21 juin, Le cartel syndical a décrété un débrayage pour ce mardi 22 juin, à partir de 10heures, suivi d’une grève de 24 heures le mercredi 23 juin courant.
Pour Gougna Niang, le coordonnateur du G20, et ses compagnons, il s’agit par-là de « dire non aux agressions sauvages dont les enseignants sont constamment victimes ; dénoncer les violences indescriptibles que subissent les enseignantes et enseignants ; exiger la prise de mesures spécifiques préventives et coercitives contre les auteurs et complices d’agressions d’enseignants dans l’exercice de leur fonction ou en rapport avec leurs missions ; le respect intégral des points inscrits au Protocole d’accord du 17 Février 2014 et enfin la satisfaction de la plateforme du G20 contenue dans le préavis du 17 Décembre 2020 ». C’est dire à quel point le système éducatif risque de voir ses petits résultats obtenus au forceps, après la pause Covid-19, être réduits en cendres par des postures des plus malheureuses. A moins que l’Etat ne prenne ses responsabilités pour apaiser une situation qui semblé aller petit à petit, dans tous les sens. Du fait du laxisme et de l’extrême permissivité notés dans la gestion des comportements au niveau des encadrés et autres potaches comme du peu d’empressement montré dans le monitoring des accords Etat/syndicats d’enseignants.
AGRESSIONS INTOLERABLES SUR LES PROFESSEURS : Le Forum du justiciable étale son courroux
Dans un communiqué rendu public hier, lundi, le Forum du justiciable a tenu à condamner vigoureusement les actes de vandalisme qui ont eu cours ces derniers jours à l’Ucad, et a dénoncé par la même occasion les agressions inhumaines dont certains professeurs ont été victimes. Pour y remédier, le Forum du justiciable qui dit avoir suivi, « avec émoi, les scènes de violences, de saccages, d’agression physique, micro arraché et de destruction des biens publics qui ont eu cours ces derniers jours à l’Ucad », a invité les autorités compétentes « à prendre toutes les mesures appropriées visant à décourager ces actes d’incivilité qui sont d’une gravité extrême ». « L’assainissement de l’espace universitaire doit être une exigence et une priorité », a conclu le Forum qui assure que « ces actes inqualifiables que rien ne peut justifier, n’honorent pas des étudiants qui aspirent à être de futurs dirigeants de notre cher pays ».