MOUSTAPHA DIAKHATE ET IBRAHIMA SENE S’ÉCHARPENT
“Ignorance de l’islam’’, “malhonnêteté intellectuelle’’, “énergumène’’. Ce sont autant d’expressions que Moustapha Diakhaté et Ibrahima Sène se sont lancées hier dans l’affaire du port du voile à l’institution Sainte Jeanne d’Arc

L’ancien président des députés de la mouvance présidentielle, Moustapha Diakhaté, et Ibrahima Sène, membre du Bureau politique du Parti de l'indépendance et du travail (Pit) sont à couteaux tirés, dans l’affaire du port du voile à l’institution Sainte Jeanne d’Arc.
“Ignorance de l’islam’’, “malhonnêteté intellectuelle’’, “énergumène’’. Ce sont autant d’expressions que l’ancien président du groupe parlementaire de la mouvance présidentielle, Moustapha Diakhaté, et Ibrahima Sène, membre du Bureau politique du Parti de l'indépendance et du travail (Pit) se sont lancées hier. Ils s’écharpent à propos de l’interdiction sur le port du voile à l’Institution Sainte Jeanne d’Arc (Isja). “Quand Ibrahima Sène montre son ignorance de l’islam et de sa malhonnêteté intellectuelle (…) Il accuse le khalife général des tidianes, Serigne Mbaye Sy, de jeter de l'huile au feu, pour avoir exigé la tolérance religieuse à l’Isja.
Serigne Mbaye Sy fait honneur à sa fonction, en demandant à l’État de se saisir de l’affaire jusqu’à la fermeture des écoles, si elles ne se conforment pas aux lois du Sénégal’’, a écrit Moustapha Diakhaté, en réponse à un texte du responsable politique, parvenu à “EnQuête’’.
D’après l’ancien chef de cabinet du président de la République, du point de vue islamique, c’est faire preuve de “mauvaise foi et d’inculture’’ qu’Ibrahima Sène réduit le port du voile à une “affaire de shiites libanais’’. “Le port du voile est une recommandation d’Allah à toutes femmes musulmanes sunnites comme shiites. Pour rappel, c’est bien le ministre de l’Education nationale qui est le premier à inviter l’Isja à respecter la Constitution et la loi d’orientation nº91-du 22 janvier 1991’’, renchérit-il.
Ainsi, il estime que les républicains et démocrates de ce pays “ne devraient pas tomber dans ce piège’’. Ibrahima Sène, lui, est d’avis que c’est à l'Etat d’arrêter la controverse autour du respect du règlement intérieur à Jeanne d'Arc, avant qu'il ne soit trop tard. De ce fait, il considère que le khalife général des tidianes a “jeté de l'huile au feu, alors que sa fonction, comme chef de confrérie liée aux " shiites libanais" et à l'église, sa posture publique aurait dû être celle d'un réconciliateur’’. “Ce que ces "shiites libanais veulent", c'est l’acceptation du port du voile par les femmes dans les lieux publics et privés, comme la Charia en a décidé ! C'est pour cette raison qu'ils ont eu recours à la provocation à Jeanne d'Arc, en s'opposant ostentatoirement à l'application du règlement intérieur de l'école, même après en avoir pris connaissance à temps.
Et des gens comme Moustapha Diakhaté évoquent la Constitution du Sénégal pour leur donner raison !’’, attaque le responsable du Pit. Qui traite Moustapha Diakhaté “d’énergumène’’ qui “n’a pas cure’’ du fait que c'est un problème de port vestimentaire dans une école privée selon son règlement intérieur. “Ces gens-là prétendent que l'école devait se conformer à la Constitution pour accepter le voile des filles dans son établissement, alors qu'il n’y a aucune disposition de la Constitution, ni aucune loi qui règlemente le "port vestimentaire des Sénégalais". Chaque entité publique ou privée décide souverainement du port vestimentaire dans ses locaux publics ou privés’’, affirme Ibrahima Sène. Qui donne l’exemple de la présidence de la République et du Building administratif qui interdisent un certain type "de port vestimentaire", “sans se référer à aucune disposition’’ de la Constitution. “Aujourd’hui, on interdit à Jeanne d'Arc d'en faire autant, conformément à son règlement intérieur connu de tous ceux qui veulent y envoyer leurs filles, au nom de la Constitution ! Ces gens-là prennent la Charia comme étant la Constitution du Sénégal’’, fulmine-t-il.
D’après lui, si par “faiblesse’’, le gouvernement leur donne raison, au risque même de mettre l'école sous "administration provisoire" comme le propose Moustapha Diakhaté, ou de retirer son agrément, et que reprend à son compte le khalife général des tidianes, la porte serait ouverte à “l'imposition’’, dans tous les milieux publics comme privés, du port du voile, conformément à la Charia. Ceci, d’après lui, en “violation flagrante’’ de la Constitution. “Les républicains et démocrates de ce pays, à ses yeux, ne peuvent pas accepter que l'on juge les décisions souveraines du privé ou du public, à l'aune de la Charia ! Notre pays renoncerait, le cas échéant, à sa réputation légendaire de cohabitation pacifique et conviviale entre l'islam et le christianisme, qui est la marque de fabrique de la cohésion sociale et de la stabilité du pays’’, juge M. Sène.
En effet, il considère que les shiites libanais “ne peuvent pas avoir joui, de longue date, de cette convivialité, pour aujourd'hui la torpiller pour des raisons non avouées, et que les Sénégalais avertis ne peuvent pas ignorer. La seule décision de l'Etat qui pourrait contrecarrer leur projet, c'est de leur dire de se conformer au règlement intérieur de l’école ou de retirer leurs filles’’.
Ainsi, Ibrahima Sène soutient que le Sénégal “ne devrait pas accepter’’ que l'Etat légifère sur le port vestimentaire des filles dans les espaces publics et privés. “L'exploitation à outrance des convictions islamiques de plus de 90 % des Sénégalais à des fins étroitement sectaires, ne devrait pas prospérer dans le Sénégal d'aujourd'hui’’, plaide-t-il.