«QUARANTE-HUIT (48) MILLE DIPLÔMES SONT EN SOUFFRANCE À L’OFFICE DU BAC»
Au Sénégal, si réussir à l’examen du baccalauréat est un vrai parcours du combattant, récupérer son diplôme est cependant un véritable cassetête. Socé NDIAYE clarifie
Au Sénégal, si réussir à l’examen du baccalauréat est un vrai parcours du combattant, récupérer son diplôme est cependant un véritable cassetête. En effet, bon nombre de diplômés se plaignent de la lenteur des procédures de délivrance des diplômes de baccalauréat au niveau de l’Office du Bac. La majorité d’entre eux sont confrontés à un calvaire quand ils veulent faire des concours ou déposer un dossier pour du travail. Ils affirment payer, à chaque fois que de besoin, pour obtenir une attestation spéciale. D’ailleurs, c’est pour cette raison que certains pensent que l’Office du Bac fait exprès de retenir les diplômes pendant des années pour pouvoir les arnaquer. Pour en savoir plus, « L’As » est allé à la rencontre du Directeur de l’Office du Bac, M. Socé Ndiaye
L’AS : M. Le Directeur, au Sénégal, l’opinion est unanime que le retrait des diplômes de Baccalauréat est un véritable casse-tête pour tous les diplômés. Où est-ce que ça bloque exactement ?
Socé Ndiaye : je ne vois pas où ça bloque. Je sais que jusqu’à 2018, il y avait beaucoup de diplômes qui étaient en souffrance. Depuis que le Sénégal a son Bac, on a un peu moins de 800 mille bacheliers. Et sur ces 800 mille bacheliers, la plupart n’avaient pas encore retiré leurs diplômes. Maintenant nous, quand on est arrivé, on s’est engagé à produire et à remettre les diplômes aux ayants droit. Et depuis, beaucoup de diplômes sont produits et les gens qui passent les retirent. Maintenant, le retrait est personnel, c’est-à-dire que personne ne peutle faire à la place de l’autre. Mais quand la personne est à l’étranger, elle doit aller à l’ambassade du Sénégal pour récupérer son diplôme physiquement.
Selon nos informations, vous disposez d’un site pour les procédures de retrait ?
Oui mais ça, c’est pour la demande, ce n’est pas pour le retrait. Pour faciliter la localisation, il faut faire la demande à partir de ce site. Parce qu’une fois la demande faite au niveau de ce site, nous avons votre contact. Ce n’est pas obligatoire, mais cela nous permet de vous joindre facilement pour vous dire que le diplôme est disponible. Aujourd’hui, nous avons répertorié plus de 48 mille diplômes qui sont disponibles à l’office du Bac et qui ne sont pas encore retirés par leurs titulaires. Pour ceux qui savent que leurs diplômes sont disponibles, ils n’ont pas besoin de s’inscrire dans ce site.Ils peuvent venir directement et les récupérer. Mis à part ces 48 mille, il y a des diplômes non encore classés, qui sont rangés dans des malles. Entre octobre 2018 et maintenant, nous avons délivré 100 fois plus de diplômes, qu’il n’en a été délivré avant.
Ces diplômes datent de quelles années précisément ?
C’est toutes les années, mais c’est surtout des diplômes de 2000 à 2010. Parce que la majeure partie des bacheliers le sont depuis 2000 et même 2010. Selon nos chiffres, 81% de ceux qui ont eu le Bac l’ont eu entre 2000 et maintenant. Depuis 1960, on a eu près de 800 mille bacheliers et sur ces personnes-là, les 700 mille ont eu le bac entre 2000 et 2019. Maintenant sur ces chiffres, les 60%, c’est-à-dire si vous prenez 100 bacheliers depuis que le Sénégal existe, les 60 ont eu le Bac entre 2010 et 2019.Donc c’est pour dire qu’il y a beaucoup de diplômes qui sont là. Il y en a qui datent de très longtemps parce que leurs ayants droit ne les ont pas demandé. Parce que par le passé, si les gens ne demandaient pas, on n’établissait pas le diplôme. Ce n’est que maintenant qu’on a commencé à faire un établissement universel des diplômes. Mais s’il n’est pas demandé et qu’on l’établit, on ne sait pas à qui l’adresser, c’est pourquoi on les garde en attendant qu’on vienne les chercher. Par le passé, les conditions étaient telles que l’office ne pouvait pas les produire, et donc il les produisait à la demande. D’ailleurs il ne répondait pas de manière automatique à la demande. Moi quand j’arrivais, les neuf dernières années, c’est-àdire de 2011 à 2018, aucune de ces demandes n’avait encore été considérée. C’est pour vous dire qu’il faut évacuer ce stock.
Justement comment comptezvous procéder pour évacuer tout ce stock ?
Nous pouvons les évacuer en produisant les diplômes, pour que quand les gens les demandent, on puisse leur rendre ça. Pour cela, ils peuvent s’inscrire dans le site. Parce que s’ils ne font pas la demande, on ne peut pas savoir où ils sont. Actuellement, on a mis en place une plate-forme qu’on n’a pas encore déployée. Une fois opérationnelle, elle permettra à n’importe qui de vérifier si son diplôme est disponible. C’est en cours de test en ce moment.Auparavant, on voulait mettre la liste des diplômes disponibles sur le net, mais quand on a demandé à la Commission de Protection des Données Personnelles (Cdp), ses membres nous ont dit qu’il serait préférable de créer une plateforme ; comme ça, c’est la personne elle-même qui met ses données au besoin pour vérifier. Cela permettra de régler le problème des gens dont les diplômes sont là et qui ne le savent pas.
N’envisagez-vous pas d’adopter une autre stratégie pour qu’à l’avenir les diplômes ne puissent plus durer au niveau de l’office du Bac. C’est-à-dire, dès que la personne a son bac, que vous puissiez lui remettre directement son diplôme au lieu d’une attestation de réussite provisoire ?
Effectivement, nous avons imaginé cette formule. D’ailleurs, nous pensons pouvoir le faire à partir de la session de 2020.D’ailleurs ça commence même avec la session de 2019. Actuellement, il y a une validation réglementaire à faire. Mais ce qui est envisagé, c’est de remplacer l’attestation de réussite directement par le diplôme. Donc nous sommes en train de travailler sur les aspects juridiques et de sécurité, et une fois tous ces aspects réglés, on est en bonne voie de le faire. C’est pourquoi on n’a pas encore imprimé les diplômes de 2019. On a temporisé parce que qu’on veut les mettre dans ce registre. Ainsi nous irons sur le terrain, comme nous le faisions avec les attestations de réussite, pour remettre les diplômes aux bacheliers. Ainsi l’arrêté va entrer en vigueur pour la délivrance des diplômes obtenus à partir de la session de 2019. Donc dès que l’arrêté est validé, on tire les diplômes de 2019.Avec cet arrêté, ont prévoit de faire le duplicata, c’est-à-dire que quand vous perdez votre diplôme, on vous le refait. Mais vous payez pour ça. Actuellement, on est en train de fabriquer les diplômes. Mais ilfaut savoir qu’une fois le diplôme fabriqué, on l’envoie au Rectorat pour la signature. Aujourd’hui, si les diplômes de 2018 ne sont pas encore là, c’est parce qu’ils sont au nombre de 56 mille, en plus des diplômes des autres années.Donc, on les a fabriqués et on les envoie au Rectorat pour que leRecteur les signe.D’ailleurs il a acheté une machine pour ça. Donc nous, quand on les envoie, la Direction des affaires juridiques du rectorat fait les vérifications et transmet au Recteur pour la signature. Après signature, les diplômes retournent à la Direction des affaires juridiques pour qu’elle y appose le cachet sec. Et ça prend beaucoup de temps. Et dans la nouvelle procédure que nous allons mettre en place, on va changer cette procédure pour améliorer la vitesse.
Et que répondez-vous à ceux qui disent que l’Office du Bac est en train d’arnaquer les gens en leur faisant payer des sommes à chaque fois qu’ils ont besoin d’attestations spéciales ?
Ce n’est pas vrai, car l’Office du Bac ne fait payer aucun document. Le fait est que, quand vous avez le Bac, on vous donne votre attestation de réussite et c’est gratuit.De même que le diplôme. Maintenant si vous revenez nous demander un duplicata, c’est-à-dire un double de ce qu’on vous avait donné, nous on n’a pas les moyens. Donc on vous demande de payer le prix pour le faire. Vous ne pouvez pas imaginer combien de personnes viennent nous demander le duplicata. Parce que c’est un original et nous le faisons sur du papier sécurisé. C’est pourquoi nous demandons aux personnes qui en ont besoin de payer le coût.