PSG: Al-Khelaïfi, quand le discret monte au filet
Discret et souriant en public, impeccables costumes en Europe ou dishdashas au Moyen-Orient, Nasser Al-Khelaïfi incarne depuis 2011, date du rachat par le fonds souverain du Qatar, un PSG qui se veut haut de gamme et tourné vers l'international. A la présidence du club, l'ancien tennisman de 43 ans se fait inflexible et tranchant.
"NAK" n'hésite pas à monter au filet, que ce soit en externe ou en interne. Très sensible à l'image de son pays, l'homme, issu d'une famille de pêcheurs de perles, est depuis son arrivée attentif à ne pas laisser prise au "Qatar bashing". Il avait notamment demandé à la Ligue de football professionnel (LFP) de sévir contre des supporters bastiais accusant, en janvier 2015 et dans le contexte post-attentats de Charlie Hebdo, son pays de financer le terrorisme.
Le dirigeant a aussi débarqué sans ménagement l'été dernier son entraîneur Laurent Blanc pour le remplacer par Unai Emery, dans la foulée d'une humiliante défaite face à Manchester City en Ligue des champions, un club détenu par un membre de la famille royale d'Abou Dhabi. Et il est passé outre les recommandations des autorités françaises pour faire revenir dans son stade une frange de supporters ultras, bannis depuis 2010.
Également président-directeur général de Bein Media group (qui a racheté les studios Miramax, producteurs des films de Quentin Tarantino comme "Pulp Fiction"), "NAK" s'est aussi fortement impliqué dans les instances du football français et européen. Membre du comité exécutif de l'Association des clubs européens (ECA), il est aussi présent au bureau et au conseil d'administration de la LFP.
"Il a une très grande ambition pour le PSG, qui dépasse les frontières, mais a aussi le souhait que les bonnes décisions soient prises pour le développement du football français. Plus le championnat sera fort et plus le PSG pourra asseoir ses ambitions", observe auprès de l'AFP Philippe Diallo, directeur général de l'UCPF, le syndicat des "petits et moyens" clubs professionnels. Ce fin connaisseur des arcanes du foot français précise que le Qatari est "très apprécié de ses collègues".
- Pression sur son poste ? -
Si l'entourage de celui que tout le monde nomme Nasser assure à l'AFP que le président du club est "de manière quotidienne en relation avec le top management du PSG", ses casquettes multiples - il préside également la Fédération qatarie de tennis et assiste souvent aux tournois à Doha - le tiennent éloigné physiquement de son club pendant une partie de la saison. Autre reproche entendu dans l'entourage du club: il donnerait "trop de pouvoirs à certains joueurs".
Au PSG, les entraîneurs sont sous pression. Mais "NAK" - il est le 7e Qatari le plus influent, devant le patron de Qatar Airways dans un classement de l'Emirat - connaît lui aussi le poids des enjeux. "Le sport représente énormément d'argent, des milliards de retombées secondaires" et permet de "placer le Qatar sur la carte", détaille ainsi pour l'AFP Mehdi Lazar, docteur de l'Université Panthéon-Sorbonne, et spécialiste du petit émirat gazier.
Et l'exigence de résultats ? "Les Qataris ont investi au Paris SG en se donnant 4, 5, 6 ans pour devenir champions d'Europe", explique à l'AFP Georges Malbrunot, grand reporter au Figaro et co-auteur notamment de "Qatar, les secrets du coffre-fort" aux éditions Michel Lafon.
"S'ils ne le sont pas, il pourrait y avoir une réévaluation de leur investissement avec un Nasser qui, faute de résultats, pourrait être remplacé", estime le grand reporter. Selon ce dernier, la nomination du dirigeant parisien au poste de président de la Fédération qatarie de tennis, squash et badminton, le 26 décembre dernier, pourrait constituer, le cas échéant, et même si "Nasser reste très proche de l'émir", "une porte de sortie".
- "Beaucoup de gros dossiers" -
Dans l'entourage du président qatari, on balaie toutefois ces affirmations, en mettant en exergue la relation amicale entre l'émir et Nasser, forgée sur les courts de tennis (il a été classé à la 995e place à l'ATP en 2002) et nourrie par une passion commune pour ce sport et le football.
"Ils continuent à passer énormément de temps ensemble", confie une source à l'AFP en précisant que la Fédération de squash et badminton, est "très petite" et vient d'être "rajoutée sous (celle du) tennis", dont Nasser est président depuis déjà "plus de 5 ans".
"C'est quelque chose de typique au Qatar, les très bons managers qataris ont tendance à avoir beaucoup de gros dossiers à gérer", ajoute-t-on de même source. "Quand ils sont +successful+ (avec des succès, en anglais) dans un domaine, dans une entreprise, ils ont d'autres dossiers qui leur sont confiés".
Pour l'heure, le dossier chaud de Nasser, c'est Barcelone en 8e de finale de la Ligue des champions. Preuve de l'importance de cette échéance, "NAK" était en tribune pour les déplacements précédents, et moins clinquants, à Dijon et Bordeaux. Le 8 mars, après le match retour contre le Barça, l'aura de Nasser sera-t-elle toujours "successful" ?