AFRIQUE, TERRE DE PREDILECTION DES ENTREPRENEURS PREDATEURS
Gestion des ressources naturelles
Le pillage des ressources naturelles du continent est dénoncé dans un rapport très fouillé du très sérieux Centre d’études stratégiques de l’Afrique, une structure du département de la défense des Etats-Unis. Il épingle, par ailleurs la pratique d’un puissant groupe chinois opérant en Afrique nommé : « Queensways ».
A qui profitent les ressources naturelles en Afrique ? A cette question lancinante, le rapport spécial numéro 3 daté de mai 2015, du Centre d’études stratégiques de l’Afrique (Cesa) une institution à vocation académique créée par le Département de la défense des Etats-Unis et basée à Washington, D.C tente d’apporter des réponses.
« Avec plus de 20 pays possédant d’abondants gisements minéraux et pétroliers, l’Afrique abrite plus de pays riches en ressources qu’aucune autre région du globe. Pourtant, les conditions de vie de la plupart de ses citoyens restent déplorables, en partie dues à l’inéquitable distribution des revenus provenant de ces ressources », fustige J.R. Maily, l’auteur principal du document.
« La richesse tirée des ressources naturelles est également étroitement associée à une gouvernance antidémocratique et illégitime. 70 % environ des pays riches en ressources au niveau mondial tombent dans la catégorie d’autocraties. Cet état de fait n’est pas une coïncidence », poursuit-il.
Pour preuve, écrit encore Maily, « les cinq premiers pays producteurs de pétrole de l’Afrique subsaharienne se classent dans le dernier tiers à l’échelle mondiale pour ce qui est de la mortalité infantile. Les deux producteurs les plus importants du continent, l’Angola et le Nigéria, se classent parmi les dix derniers dans cette catégorie ».
FORTE CORRUPTION
Où va donc l’argent ? « Le flux constant des revenus issus des ressources naturelles finance le patronage et les structures de sécurité sur lesquelles les gouvernements se reposent pour rester au pouvoir sans le soutien du peuple », répond le Centre d’études stratégiques de l’Afrique qui se veut un forum à la recherche de coopérations bipartites et multipartites, à la communication et à l’échange d’idées.
Par ailleurs, le document soutient sans ambages que : « Pratiquement sans aucune exception, dans les pays riches en ressources naturelles de l’Afrique, le secteur public est victime d’une forte corruption. De plus, les pays reposant lourdement sur l’exportation de pétrole et de minéraux, sont plus exposés au risque de conflits civils que les pays pauvres en ressources naturelles ».
DES TRANSACTIONS ILLEGALES
Au banc des accusés, le rapport pointe du doigt les multinationales extractives, lesquelles se comportent plus en prédateurs des ressources naturelles du contient que comme de vrais investisseurs soucieux d’un partenariat gagnant-gagnant.
« Certains investisseurs sans scrupules, désireux surtout de faire des profits immédiats, ont trouvé que les gouvernements des pays riches en ressources de l’Afrique sont des proies faciles. La volonté de ces investisseurs à s’adonner à des transactions commerciales qui sont illégales, moralement questionnables ou autrement allant jusqu’à l’exploitation, devient un avantage comparatif par rapport à des entreprises de réputation supérieure ».
Le document ajoute en enfonçant le clou que : « Ces entreprises au comportement prédateur ne sont pas seulement des spectateurs faisant des affaires comme si de rien n’était dans un environnement peu ragoûtant. Elles habilitent souvent, de façon proactive, des responsables non justiciables et tirent fréquemment profit directement de conflits internes et de crises politiques.
Le retour possible sur investissement de ces investisseurs est énorme comparé au risque minimal pris d’une entente qui échoue. Avec les bonnes relations et la volonté d’opérer au milieu d’un chaos relatif, ces sociétés peuvent faire fortune à partir des pays riches en ressources naturelles ».
Dans la foulée, le rapport déplore le manque de collaboration entre les gouvernants et les entreprises au bénéfice des populations. « Munies de leur savoir-faire technique et de leurs ressources financières, les sociétés internationales peuvent être un élément vital dans l’équation de la gestion des ressources en Afrique en aidant un pays à mettre ses ressources sur le marché et en récupérant un retour plus important pour le public qui ne saurait autrement l’être. », regrette-t-on.
A titre illustratif, le Cesa est d’avis que si le produit des ressources naturelles était géré de manière responsable, il pourrait être une aubaine pour la société, permettant ainsi des précieux investissements dans les infrastructures, le capital humain, les services sociaux et autres biens publics.
Le rapport étudie les cas de plus de 200 investisseurs intervenant en Afrique. Mais d’après le document du Pentagone, le modèle le plus répandu est celui du très puissant groupe basé à Hong Kong et connu officieusement sous le nom de « 88 Group Queensway ».
Si les pratiques jugées prédatrices de cette société appartenant à un homme d’affaires chinois sont fréquentes sur le continent, ajoute la source, le Cesa l’explique entre autres choses par : la faiblesse financière des gouvernements, des institutions de contrôle faibles ou inexistantes et une répression sans limite de la société civile ainsi que de la presse. (Mamadou SARR)