GOOD LUCK AFRICA!
EXCLUSIF SENEPLUS - Sommet de l'Union Africaine - Abdoulaye Bathily, le profil naturel et idéal - Parfait concentré de compétence, de professionnalisme, de l’intellectuel panafricaniste, de l’habile négociateur...

Une semaine capitale s’ouvre pour l’Union Africaine. La conférence des chefs d’état devrait en effet statuer sur deux dossiers sensibles. D’abord, le retour du Maroc dans le concert de l’UA, ensuite, l’élection du Président de la Commission. Et accessoirement d’autres problèmes annexes, pour ne pas récurrents, comme les questions de sécurité, de développement, d’environnement. A vrai, les deux points focaux restent l’épineux dossier marocain et le choix du remplaçant de Mme Zouma dont le passage à la tête de la commission ne s’inscrira pas certainement dans le marbre de l’histoire de l’organisation panafricaine.
Et pour cause ! Rien de décisif, de fondamentalement stratégique ou de marquant n’a été fait sous magistère. Ni au plan des enjeux géopolitiques internationaux, encore moins à celui des options en matière de développement ou d’environnement. Préoccupée par son avenir dans la quête de la Présidence de son pays, Mme Zouma qa enlisé l’UA dans son pétrin. Elle laisse en pire état l’héritage de son prédécesseur, le gabonais Jean Ping, une léthargie, source d’inaction, voire de paralysie. A la limite les regroupements sous-régionaux et régions, en Afrique centrale, de l’Ouest, de l’Est et du Sud ont davantage assuré tant que mal que bien la gestion des crises et les médiations occurrentes, dans les zones en confit ou au sein des états.
L’échec de Mme Zouma
Sur les nombreuses difficultés liées aux transitions démocratiques, à la violence politique et aux violations des libertés politiques essentielles, en moins sur les grandes endémies (Ebola), l’absence de l’autorité de l’UA a été déconcertante. Les problèmes de sécurités dont la survenance est quasi-totale sur le continent ont révélé encore une fois l’inertie de l’UA, qui se contente de cris d’orfraie en attendant que les puissances occidentales viennent apporter leur protection. Tel au temps du protectorat des pays africains menacés par l’État Islamique avec ses ramifications au Mali, en Afrique centrale et de l’Ouest. Les forces africaines déployées ça et là, l’ont été davantage par la volonté des États concernés eux-mêmes, épaulés non sans intérêt économique et géopolitique par les forces occidentales, avec la bénédiction tardive du Conseil de sécurité de l’ONU. Le Tchad et le Nigéria, et dans une moindre mesure, le Cameroun, en Afrique de l’Ouest et du Centre, l’Afrique du Sud en Angola, ont pu sensiblement jouer les puissances sous-régionales, pour sauver des situations plus ou moins désespérées.
C’est dire à quelle ample tâche doit s’attendre le prochain Président de la Commission de l’UA, dans son rôle stratégique d’aiguillon, de pro-activité, d’alerte et de plaidoyer. A ce titre, la candidature de notre compatriote Abdoulaye Bathily symbolise plus qu’un espoir. Elle se présente comme une bouée de sauvetage pour une organisation dont l’érosion de l’autorité autant l’aphonie sont tout simplement déconcertantes. L’ancien ministre sénégalais, récemment encore envoyé spécial des Nations Unies dans les pays des Grands Lacs, ne se présente plus. Il est le parfait concentré de la compétence, du professionnalisme, de l’intellectuel panafricaniste, de l’habile négociateur. Son parcours politique, son profil sociologique et sa familiarité avec les questions de sécurité, d’environnement et de développement durable le désignent comme le candidat naturel, mais plutôt idéal, pour sortir l’UA de son immobilisme actuel.
Bathily, le profil naturel et idéal
Tous les acteurs s’accordent à penser qu’il présente le meilleur profil pour porter les habits du poste. Le soutien du gouvernement sénégalais a été jusqu’ici, totale et sans faille. Les moyens matériels, techniques, les intermédiations et le lobbying indispensables dans des situations de cette nature ont été déployés, même avec un peu de retard, pour à aller à la pèche aux voix dans des conditions particulièrement difficiles. La diplomatie sénégalaise a été donc mise au service de la candidature de l’historien sénégalais de manière si active que le Sénégal fait l’objet de vives critiques pour tout le poids qu’il a mis à Kigali pour que l’élection du Président de la Commission ne puisse pas déboucher sur la désignation des candidats de la première liste, semble –t-il arrêtée depuis avril 2016. Un triomphe stratégique pour rebattre les cartes, mais qui laissera des traces chez les adversaires du Sénégal (le Tchad et l’Algérie) heurtés par l’activisme payant de notre diplomatie, à repositionner Abdoulaye Bathily dans la course.
Mais il faut bien s’en convaincre. La tâche de Dinga (surnom de Bathily, synonyme de Chef princier en soninké), ne sera pas des plus aisées. La multiplicité des candidats (cinq au total), le comportement hystérique des pays comme le Tchad, l’Algérie, et sans doute le Nigéria, l’absence de soutien de la Mauritanie notre voisin immédiat, corsent un peu plus les entraves. Qui plus est, l’exigence d’obtention des 2/3 des voix quel que soit le tour, semble infranchissable, sans de sérieux appuis, parfois souterrains, en dehors des ententes sous-régionales ou d’affinités diverses.
Solidarité mécanique
Toujours est-il que Bathily reste la meilleure chance pour l’Afrique de se sortir de cette mauvaise passe. Il faut espérer que la raison saura habiter les esprits des chefs d’état en lieu et place du cœur et de la solidarité mécanique nuisible à la rationalité d’une nouvelle gouvernance de l’Afrique. Sans mépris contre les autres candidats, Abdoulaye Bathily réunit les meilleurs atouts, pour gravir les marches d’une transformation qualitative de l’UA. Il en a l’étoffe, l’engagement et la détermination. L’autre point de focalisation reste, le retour du Maroc au sein de l’UA. Le Sénégal en a toujours fait un point d’honneur. Tête de file des pays dits à l’époque modéré, il n’a jamais reconnu la RASD et s’est offusqué du départ du Maroc de l’Union. Aujourd’hui, l’Algérie, mentor de la RASD, qui héberge à Tindouf sur son territoire l’essentiel des réfugiés saharaouis, joue son va-tout pour tenter de s’opposer et de rassembler les « progressistes », autour d’un seul point de ralliement : exiger la reconnaissance de la RASD par le Maroc. Ou tout au moins l’organisation de référendum d’auto-détermination tel que préconisé par l’ONU dans ses résolutions. A l’évidence, le Maroc même dans sa nouvelle stratégie diplomatique ne l’entendra de cette oreille.
L’impossible cohabitation Maroc-RASD ?
Tout au plus acceptera-t-il de cohabiter avec la RASD sans jamais, songer à la reconnaître. Cette attitude minimaliste ne satisferait même pas aux désidératas de l’Algérie et de ses alliés, qui considèrent que le Sahara Occidental, annexé par le Maroc, est déjà indépendant, depuis sa reconnaissance par l’OUA. Et qu’en conséquence, le Maroc devrait se conformer aux dispositions onusiennes en acceptant de mettre fin à la colonisation du territoire et surtout d’organiser un référendum sur la base d’un recensement déjà établi. Or, tout le monde sait que les données démographiques ont changé au Sahara et que la Marocanité forcée ou consentie est déjà en marche.
Ce contexte complexe et chargé risque d’obérer les chances de notre valeureux candidat. Ce que sa compétence, son sens du dialogue et de l’autorité, lui donnent, risque de lui manquer le jour du choix par les chefs d’état. Or tout autre choix que celui pour Bathily est une chance ôtée à l’Afrique de se re-posséder.