LES CAPRICES D'ALPHA CONDE
Arrivé en retard à la cérémonie d'investiture de George Weah, le chef de l’Etat guinéen a voulu coûte que coûte se faire installer au présidium par le protocole
Le Président guinéen Alpha Condé s’est singulièrement distingué hier lors de la prestation de serment du nouveau Président libérien, George Weah. Arrivé en retard à la cérémonie, le chef de l’Etat guinéen a voulu coûte que coûte se faire installer au présidium par le protocole. N’ayant pas obtenu gain de cause, il a boudé l’événement.
Les grosses attentes du Peuple libérien
Il est rare de voir une foule aussi dense, aussi trépidante de joie, à l’occasion de l’investiture d’un chef d’Etat nouvellement élu en Afrique. George Manneh Weah, installé comme 24ème président de la République du Liberia, a rempli comme un œuf le stade Samuel K. Doe de Monrovia. Une foule en liesse, composée de milliers de jeunes gens, âgés pour la plupart de moins de 25 ans, a pris d’assaut les travées du stade. La foule s’est amassée jusque dans les rues des quartiers avoisinants. Ils portaient des couleurs du Liberia, des casquettes et autres t-shirts à l’effigie de cette ancienne gloire du football professionnel devenu chef d’Etat. Le Peuple libérien a tenu à célébrer avec faste le fabuleux destin de ce gamin échappé des quartiers pauvres de Monrovia. Les jeunes Libériens ont voulu montrer en criant à tue-tête qu’ils tenaient leur «Président en la personne de George Manneh Weah». Ce rêve fou est devenu une réalité et autorise à ces nombreux jeunes de croire en leur propre avenir. L’espoir est grand et le slogan de campagne de George Weah, à savoir le «Changement pour l’espoir», a sans doute renforcé les attentes des populations. Le Peuple libérien est exsangue, frappé par de nombreuses années de guerre civile qui ont provoqué des milliers de morts et des destructions de toutes les infrastructures du pays. «Tout est à construire dans ce pays», annonce le nouveau chef de l’Etat. George Manneh Weah et sa viceprésidente, Jewel Howard Taylor, ex-épouse du sanguinaire dictateur Charles Taylor, ont prêté serment de consacrer tous leurs efforts, avec abnégation, à améliorer le sort de leurs concitoyens.
Dans son discours d’investiture, George Weah a plaidé pour la paix et l’unité de son Peuple et le respect de l’Etat de droit. Il s’engage à œuvrer pour une gouvernance inclusive et à lutter contre la corruption qui a gangréné le Liberia. Il a ainsi tendu la main à ses concitoyens pour se retrousser les manches et se mettre au travail. Les jeunes semblaient n’attendre qu’un tel appel, auquel ils ont répondu par de fortes approbations. La communauté internationale a été invitée à soutenir le Liberia dans ses efforts de reconstruction, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé, des infrastructures et des équipements.
Monrovia, the place to be
Tous les chefs d’Etat et de gouvernement africains semblaient s’être passés le mot. Personne ne voulait manquer cette cérémonie d’investiture. Le tarmac de L’aéroport international Roberts de Monrovia n’a certainement jamais enregistré auparavant un ballet aussi impressionnant d’aéronefs. Les délégations gouvernementales rivalisaient avec les délé- gations d’investisseurs potentiels et d’amis du nouveau Président, venus de tous les continents. Tout le monde a tenu à participer à la fête qui fut belle. On a remarqué de nombreuses stars du football mondial, anciens coéquipiers et amis du nouveau Président libérien. Le célèbre footballeur camerounais Samuel Eto’o, ainsi que le Sénégalais El Hadj Ousseynou Diouf étaient notamment de la partie. George Manneh Weah a tenu à accorder une attention particulièrement délicate au Président Macky Sall. Il a tenu à recevoir en personne le Président sénégalais à son domicile privé de Monrovia avec sa famille, avant de se rendre à la cérémonie d’investiture. Ainsi a-t-il réservé un traitement singulier à celui qu’il appelle «mon grand frère à moi». Il dit considé- rer le Président Sall comme son mentor, qui l’entoure de conseils et d’affection. George Weah révélera qu’à chaque fois qu’il s’engage dans une compétition politique, il recueille les avis et conseils toujours judicieux du Président Macky Sall. C’est ainsi que les conseils de Macky lui avaient permis de remporter en 2013 le fauteuil de sénateur de Monrovia qu’il convoitait, et aujourd’hui d’être élu, à plus de 60% des suffrages, à la tête du Liberia. Pour sa part, le Président Macky Sall a salué le courage et l’abnégation de George Weah. Il a indiqué que le public ne retient que l’aura du grand footballeur, mais George Weah s’est beaucoup investi pour améliorer sa formation par des études supérieures, afin de se doter de plus grandes aptitudes pour se préparer à ses nouvelles fonctions.
La bouderie de Alpha Condé
La seule fausse note de la journée aura été l’attitude, on ne peut plus inconvenante, du Président Alpha Condé de la Guinée. Le chef de l’Etat guinéen, arrivé au beau milieu de la cérémonie d’investiture, avait exigé d’être placé au centre du présidium alors que ses autres pairs chefs d’Etat avaient fini de s’installer depuis longtemps. Le protocole libérien n’avait pas voulu déplacer un autre chef d’Etat pour faire de la place à Alpha Condé qui n’a pas accepté une telle situation. Haut de son statut de président en exercice de l’Union africaine, il estimait devoir être placé au centre du présidium. Il décida alors de bouder la cérémonie et de rameuter, par de grands gestes, les membres de sa délégation. La délégation venue de Conakry quittera ainsi la tribune officielle, au grand dam de tous les invités. L’incident a embarrassé les convives ainsi que Mme Ellen Johnson Sirleaf, la Présidente sortante, sous la responsabilité de qui la cérémonie était organisée. George Weah ne pouvait que se désoler de ce qui venait de se passer. La passation de pouvoirs se déroula sans autre incident.