MACRON-LE PEN AU SECOND TOUR
Le président sortant est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle française dimanche, selon les premières estimations, devançant de quelques points la dirigeante d'extrême droite, qu'il affrontera le 24 avril dans un duel qui s'annonce serré
Le président sortant Emmanuel Macron est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle française dimanche, selon les premières estimations, devançant de quelques points la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen, qu'il affrontera le 24 avril dans un duel qui s'annonce serré.
Dimanche soir, Emmanuel Macron s'est adressé aux Français en remerciant ceux qui ont voté pour lui et en promettant aux autres qu’il était prêt à inventer quelque chose de nouveau pour rassembler toutes les sensibilités.
Emmanuel Macron a aussi remercié Anne Hidalgo, Yannick Jadoe, Valérie Pécresse et Fabien Roussel, qui lui ont apporté leur soutien en vue du deuxième tour.
Des chiffres
D'après trois estimations de divers instituts, M. Macron arrive en tête avec des scores entre 28,6 et 29,7 % à l'issue d'une campagne fortement perturbée par la pandémie et par la guerre en Ukraine.
Marine Le Pen arrive deuxième, entre 23,5 et 24,7 %, selon les estimations des instituts OpinionWay, IFOP et Harris, devant le chef de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, qui oscille entre 20 et 21 % des voix.
M. Mélenchon a d'ailleurs exhorté dimanche soir ses partisans à ne pas donner une seule voix à Marine Le Pen le 24 avril.
Les candidats Yannick Jadot, écologiste, Anne Hidalgo, socialiste, et Fabien Roussel, communiste, ont rapidement appelé à voter pour Emmanuel Macron au second tour afin de faire barrage à Marine Le Pen.
Ces quatre candidats représentent environ 15 % des voix du premier tour, selon les estimations.
Le plus grand syndicat de France, la Confédération française démocratique du travailCFDT, a appelé dimanche soir à voter contre Marine Le Pen le 24 avril.
Zemmour appelle à voter Le Pen
En revanche, le candidat d'extrême droite Éric Zemmour, qui a obtenu environ 7 % des voix, a appelé dimanche soir ses électeurs à voter pour sa rivale.
J'ai bien des désaccords avec Marine Le Pen. Mais il y a face à elle un homme qui a fait entrer deux millions d'immigrés, qui n'a jamais évoqué le thème de l'identité. Je ne me tromperai pas d'adversaire, a déclaré M. Zemmour devant ses partisans.
Marine Le Pen a pour sa part appelé les Français à se rassembler autour d'un grand projet national et populaire.
Ce qui se jouera le 24 avril sera un choix de société et de civilisation, a-t-elle lancé.
Jusqu'à 48 millions d'électeurs pouvaient exercer leur droit de vote. L'abstention est particulièrement forte, entre 26,2 % et 29,1 %, selon deux estimations, ce qui marque le dédain croissant des Français vis-à-vis de leur classe politique.
C'est plus que les 22,2 % de 2017, alors que le record est de 28,4 % en 2002.
Reflet des sondages
Les sondages prédisaient que M. Macron devait arriver en tête devant Mme Le Pen, comme lors du scrutin précédent, en 2017, avec le candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon en troisième position.
Mme Le Pen et M. Mélenchon ont des positions très différentes de celles de M. Macron sur plusieurs sujets internationaux. Ils sont par exemple beaucoup plus hostiles à l'intégration européenne et disent vouloir sortir du commandement intégré de l'Organisation du traité de l'Atlantique nordOTAN.
La parole aux électeurs
À Pantin, en région parisienne, Blandine Lehout, une comédienne de 32 ans, n'a pas voté.
À Marseille, Carole Junique, 47 ans, qui travaille dans la fonction publique, est venue à la première heure.
En France, on a le droit de vote, c'est important de le garder. Bien sûr, on n'a qu'une voix parmi d'autres, mais si tout le monde se mobilise, ça peut changer les choses, a-t-elle souligné.
Beaucoup n'ont pas caché pas que leur choix a été difficile. Cédric Hodimont, dans la quarantaine, regrette ainsi d'avoir fait un vote par défaut.
Les différentes études d'opinion montraient avant le premier tour que Mme Le Pen et M. Mélenchon étaient depuis plusieurs jours dans une dynamique de progression, ce qui réduisait substantiellement l'écart avec le président sortant, entré tardivement en campagne.
Cependant, l'abstention et le fait – toujours selon les sondages – qu'une part considérable de l'électorat n'était pas sûre de son choix semblaient laisser les jeux ouverts.
Sur les douze, j'en avais sélectionné quatre hier soir, et je me suis décidée ce matin, expliquait Françoise Reynaud, 55 ans, électrice marseillaise.
Derrière ce trio, les autres candidats paraissaient décrochés, notamment la prétendante de la droite traditionnelle Valérie Pécresse et l'autre candidat d'extrême droite, Éric Zemmour.
Pour le deuxième tour, les sondages donnent M. Macron vainqueur. Il l'emporterait avec un score compris entre 54 % et 51 % contre 46 %-49 % pour Marine Le Pen, selon des sondages réalisés dimanche après le premier tour.
Le score serait ainsi nettement plus serré qu'il y a cinq ans, quand Emmanuel Macron s'était imposé par 66,1 % des voix contre 33,9 % pour Mme Le Pen.
Ce premier tour clôture plusieurs mois d'une campagne dont les grandes questions, en particulier le dérèglement climatique, ont été absentes. Le pouvoir d'achat s'est inscrit comme la principale préoccupation des électeurs, d'autant plus que la guerre en Ukraine a provoqué une inflation notable.
Par un effet de vases communicants, la fille et héritière du sulfureux tribun d'extrême droite Jean-Marie Le Pen s'est retrouvée recentrée sur l'échiquier politique par l'irruption d'Éric Zemmour.
M. Macron a quant à lui joué sur son image de commandant en chef accaparé par les crises sanitaire et internationale. Cette posture l'a d'abord servi mais a ensuite pu le faire apparaître déconnecté des préoccupations quotidiennes des Français. Son image a aussi été compromise par son refus de se livrer à des débats télévisés avec ses adversaires.
Prenant conscience du danger, le président sortant a appelé, à partir du début d'avril, à la mobilisation contre une extrême droite banalisée et a affirmé avoir l'esprit de conquête plutôt que l'esprit de défaite.