NIGER : L'OPPOSITION NE RECONNAITRA PAS LES RÉSULTATS DU SCRUTIN

Niamey, 23 fév 2016 (AFP) - L'opposition nigérienne a annoncé qu'elle ne reconnaîtrait pas les résultats "fantaisistes" de la présidentielle qui tombaient au compte-gouttes mardi, le pouvoir affirmant au contraire que le scrutin était bien conforme aux normes internationales.
Le président Mahamadou Issoufou, 63 ans et surnommé "Le lion", brigue un deuxième quinquennat et a promis une "victoire un coup KO" (au premier tour), face une opposition qui n'a cessé d'agiter le spectre de la fraude électorale pendant une campagne tendue.
"Tel que cela a été proclamé jusqu'à maintenant, on ne peut pas les reconnaître", a déclaré à Niamey Amadou Boubacar Cissé, dit "ABC" le porte-parole de la Coalition pour l'alternance 2016 (COPA 2016) en commentant l'annonce par la Commission électorale nationale indépendante (Céni) des premiers résultats du scrutin de dimanche et lundi.
"On demande aux militants de résister, de ne pas accepter ce qui se passe parce que c'est totalement contraire à ce qui été exprimé par les urnes", a-t-il ajouté, refusant de commenter les modalités d'action.
- 'Bureaux fictifs' -
Pour la COPA, la Céni "diffuse des résultats pour le moins fantaisistes (...) en désaccord total avec les données réelles récoltées" par ses représentants. "A Zinder (sud, 2e ville du pays) et dans d'autres régions, les résultats proviennent de bureaux de vote fictifs", a accusé M. Cissé, lui-même candidat, parlant de "résultats fabriqués" et de "complicité grave de la Céni".
Selon les autorités, les résultats globaux devraient être annoncés dans les cinq jours après la clôture du scrutin, qui s'est déroulé dimanche et lundi.
Quelque 7,5 millions de Nigériens étaient appelés à choisir entre quinze candidats pour présider le pays de 18 millions d'habitants parmi les plus pauvres de la planète et vivant sous la menace des groupes jihadistes sahéliens et des islamistes nigérians de Boko Haram.
Le scrutin était couplé à des législatives. Le ministre de l'Intérieur, Hassoumi Massaoudou, a pour sa part assuré que les élections avaient été conformes "aux standards internationaux".
"Cela fait longtemps qu'ils (l'opposition) disent qu'ils ne reconnaitront pas les résultats. Ce n'est pas une surprise. Ce sont des héritiers naturels de la dictature militaire dans notre pays", a-t-il dit à l'AFP. "Ils ont appelé à résister, nous sommes habitués.
Leurs partisans sont moins +Va-t'en-guerre+ qu'eux. Nous sommes sereins. Nous défendrons les résultats, les élections et la démocratie dans notre pays", a-t-il prévenu.
"Si nous perdons, nous partons sans problème et si nous gagnons, nous restons", a-t-il conclu. - Satisfecit de l'UA - La Céni a proclamé les résultats d'une quarantaine des 308 communes du pays. Il est toutefois encore impossible de dégager une réelle tendance, les résultats étant encore très peu représentatifs.
L'Union Africaine (UA) qui avait déployé 40 observateurs, a globalement donné un satisfecit à l'organisation malgré "des retards", l'absence fréquente de l'affichage de listes ou de membres de bureaux de vote.
La Mission d'observation conduite par l'ex-Premier ministre gabonais Jean Eyeghé Ndong note que "l'intégrité du vote a été garantie" et estime que "dans l'ensemble, les élections constituent une étape très importante dans l'enracinement de la démocratie".
"Cette élection a permis au peuple nigérien de choisir son président et ses députés librement et dans la transparence. Le climat d'apaisement et l'esprit de paix qui ont prévalu méritent d'être préservés dans l'attente des résultats et la gestion de la phase post-électorale", selon le rapport.
La mission "exhorte les partis (...)à respecter la volonté du peuple telle qu'exprimée à travers les résultats officiels et à recourir, le cas échéant, uniquement par voie légale".
Elu en 2011, M. Issoufou affronte trois adversaires principaux: deux anciens Premiers ministres, Seïni Oumarou et Hama Amadou, ainsi que Mahamane Ousmane, premier président démocratiquement élu (1993-1996).
M. Amadou est incarcéré depuis novembre, accusé de trafic d'enfants dans un dossier de "droit commun" selon le pouvoir mais "politique" selon le candidat.
La campagne a été marquée par des échauffourées entre partisans du président et opposants qui contestent la régularité du fichier électoral. Elle a été précédée de l'arrestation de personnalités et de l'annonce d'un putsch raté par le pouvoir.