QUI EST ADAMA BARROW ?
Portrait du nouveau président gambien
Il y a tout juste quelques mois, Adama Barrow, 51 ans, était encore un parfait inconnu sur la scène politique. Jeudi, il a officiellement détrôné Yahya Jammeh, après 22 ans de règne sur la Gambie en prêtant serment ... à l'ambassade gambienne à Dakar.
Et des armées de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao, 15 pays) sont entrées en action jeudi pour l'installer au pouvoir, avec le soutien unanime du Conseil de sécurité de l'ONU.
Rien ne semblait pourtant destiner cet homme massif et peu démonstratif, propriétaire d'une agence immobilière et ancien vigile de supermarché en Grande-Bretagne, à marquer l'Histoire.
La contestation par Yahya Jammeh de sa victoire à l'élection présidentielle du 1er décembre a plongé le pays dans une crise profonde, l'ayant conduit en exil temporaire.
Depuis le 15 janvier, Adama Barrow est accueilli à Dakar à la demande de la Cédeao qui craignait pour sa sécurité durant les derniers jours du mandat de Yahya Jammeh, expiré officiellement mercredi à minuit.
M. Jammeh a annoncé le 9 décembre qu'il ne reconnaissait plus les résultats du scrutin, une semaine après avoir félicité M. Barrow pour sa victoire. Ce fut le début d'un long blocage politique et d'une bataille judiciaire, se prolongeant d'une menace d'intervention militaire de la Cédéao pour exiger que un transfert pacifique de pouvoirs.
Adama Barrow, marié à deux femmes et père de cinq enfants, a aussi été frappé par un drame personnel: un de ses fils, Habibou, 7 ans, est décédé des suites de morsures de chiens, et a été inhumé à Banjul en son absence.
- Bourreau ... de travail -
Dans sa première interview accordée à l'AFP après l'annonce de sa victoire, début décembre, M. Barrow faisait voeu de transformer le visage de son pays, promettant "une nouvelle Gambie".
Il s'est dit déterminé à rompre avec l'exercice solitaire du pouvoir pratiqué pendant 22 ans par son prédécesseur, se présentant en chef d'un collectif sélectionné selon des critères de compétence. "J'ai une très bonne équipe, qui est très expérimentée, très instruite, il y a donc un espoir pour la Gambie", avait-il assuré.
Pendant la campagne électorale, il s'est engagé à respecter le mémorandum adopté par la quasi totalité des partis d'opposition qui l'ont désigné comme leur candidat, prévoyant la mise en place d'un gouvernement de transition pendant trois ans.
Adama Barrow, appartenant à l'ethnie mandingue, la plus importante du pays (environ un tiers de la population), qui se décrit comme un bourreau de travail, a appelé ses compatriotes à retrousser leurs manches pour développer leur pays.
En juin 2016 encore, bien peu de Gambiens auraient pourtant pu mettre un nom sur son visage, omniprésent dans les rues, sur les affiches ou des T-shirts tout au long de la campagne.
Ce cadre de la principale formation de l'opposition, le Parti démocratique unifié (UDP), a été propulsé sur le devant de la scène à la suite de l'arrestation et la condamnation, en juillet 2016, à trois ans de prison pour rassemblement illégal d'une partie de la direction de l'UDP, dont son chef Ousainou Darboe.
Cette répression a favorisé un rare mouvement d'unité de l'opposition autour d'Adama Barrow, qui a ensuite démissionné de l'UDP pour mieux représenter toute la coalition.
A la suite de sa victoire à l'élection présidentielle du 1er décembre, Ousainou Darboe et plusieurs dizaines de militants de l'opposition ont été libérés sous caution quelques jours plus tard.
Souvent habillé de longues tuniques, M. Barrow, qui se présente comme un fervent musulman, a créé son agence immobilière après avoir travaillé plusieurs années dans la plus importante société du secteur en Gambie.
Il a aussi confessé une passion, celle contractée lors de son séjour en Grande-Bretagne dans les années 2000, pour le club de foot londonien d'Arsenal.