QUAND LE CNRA MET EN DANGER LA PRESSE
La Radio Futurs médias (Rfm) a été attaquée par des manifestants, ses véhicules caillassés. Puis c’est au tour du quotidien national Le Soleil de recevoir les pierres des manifestants en colère
L a Radio Futurs médias (Rfm) a été attaquée par des manifestants, ses véhicules caillassés. Puis c’est au tour du quotidien national Le Soleil de recevoir les pierres des manifestants en colère. A signaler toute cette tournure des événements était prévisible d’autant plus que c’est le préfet de Dakar, Alioune Badara Samb, lui-même, qui avait demandé à ce que la presse soit gazée.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase est la sortie malheureuse du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra), qui, en plus d’avoir sorti un communiqué fustigé par les acteurs de la presse dénonçant un parti-pris, a coupé le signal de certaines télévisions qui, dit-il, faisaient une mauvaise couverture des événements en incitant à la violence.
L’attaque de certains organes est devenue, de ce fait, un objectif des manifestants. Déjà, interpellé par des médias, dans le cadre à la publication d’un communiqué par la Coordination des association de presse (CAP), dénonçant les menaces du CNRA, le président du Conseil des éditeurs et diffuseurs de presse du Sénégal (CDEPS), Mamadou Ibra Kane (CDEPS) avait prévenu : «l’on ne saurer cautionner de telles menaces à la liberté de presse…».
Non sans plaider pour la mise en place rapide d’un organe de contrôle renforcé et plus indépendant, notamment la Haute autorité de régulation de la communication et de l’audiovisuel (HARCA), devant remplacer le CNRA, un organe devenu caduc depuis l’adoption de la loi sur le Code de la presse, il y a plus de 3 ans et demi, en juillet 2017.
MAMADOU IBRA KANE DU CDEPS SUR LA COUPURE DU SIGNAL DE WALF ET SEN TV : «Il y a là une violation évidente de la loi»
«Je viens d’apprendre avec consternation que le signal des télévisions Walf TV et SenTV a été coupé par le CNRA. Il y a là une violation évidente de la loi. Le CNRA n’a aucune compétence pour arrêter le signal d’une quelconque télévision ou radio. La loi de 2006 instituant le CNRA ne lui donne aucune compétence en la matière. Le code de la presse prévoit le remplacement du CNRA par la HARCA (Haute Autorité pour la Régulation de la Communication audiovisuelle). L’absence de la HARCA ne permet pas au CNRA de s’octroyer les compétences d’une autre structure, car cela n’est prévu par aucun texte, ni le code de la presse, ni toute autre loi. Le CNRA est alors dans la plus totale illégalité. L’interdiction de diffusion d’une télé et d’une radio ne peut être prononcée que par le juge. Aucune autorité administrative ne peut s’arroger cette compétence en violation de la loi. L’absence de certains textes d’application crée un vide juridique qui est une grosse menace pour la liberté de presse et la viabilité des entreprises de presse. En plus de la loi sur HARCA, la loi sur le financement de l’audiovisuel public, le code de la publicité… n’ont pas été pris. Les deux décrets sur les avantages et obligations des entreprises de presse et la création d’un Fonds d’appui et de développement de la presse ont été vidés de toute leur substance. Récemment, la convention et le cahier des charges soumis aux télévisions privées marquent clairement la volonté de l’Etat de contrôler ces entreprises de presse. On assiste à un tournant dangereux pour la liberté de presse au Sénégal. Dans cette situation, il faut que les entreprises de presse puissent défendre leurs intérêts, parce qu’elles sont menacées dans leur existence même ».