AU PAYS DES AVEUGLES…
Macky Sall n'est pas le roi. C'est déjà beaucoup, mais il ne faudrait surtout pas vouloir en faire un "roi fou". C'est-à-dire quelqu'un qui, non seulement pourrait presque tout faire mais encore tout ce qui lui passerait par la tête
Bafouillé-je ? M'étranglé-je ? Non, je suis estomaqué, comme après un violent coup de poing reçu, soudainement, en plein plexus solaire ! J'en ai perdu le souffle pendant un bon moment. Sans doute aura-t-on, tout vu et vat-on, tout entendre, à propos du mandat présidentiel de la République à limiter, pour l'avenir, et surtout à réduire et à écourter là, maintenant. C'est vrai mais là, cela dépasse mon entendement puisqu'il s'agit de Madame Amsatou Sow Sidibé, une personne de très grande qualité vraiment. Elle est professeur et professeur d'université en plus et qui plus est encore de Droit ! Elle fut candidate à la magistrature suprême, lors des consultations de 2012 et, pour l'heure, ministre-conseiller spécial du chef de l'Etat. N'en jetez plus !
C'est cette personne, ce monument devrais-je dire, qui dans un entretien accordé à un journal de la place a soutenu que : "Bof, le Président de la République, quand bien même le Conseil constitutionnel objecterait à son projet d'écourter son mandat pourrait, pour peu qu'il le veuille, passer outre ! Car, ce ne serait, selon elle, qu'un avis en somme et donné à titre purement consultatif. Voilà ! C'est un truc quoi, un machin que le Conseil constitutionnel mis là pour la forme pour faire comme les "Toubabs " ! Si je suis atterré, je ne suis pas, toute réflexion faite, si surpris puisque ça là, c'est dans l'air du temps et ce l'était depuis très longtemps.
Macky Sall n'est pas le roi. C'est déjà beaucoup, mais il ne faudrait surtout pas vouloir en faire un "roi fou". C'est-à-dire quelqu'un qui, non seulement pourrait presque tout faire mais encore tout ce qui lui passerait par la tête. Car, dés lors, il ne serait plus un monarque mais un despote. On voit ainsi que même dans le sens d'un pouvoir purement autocratique la marge est très grande : d'avoir tous les pouvoirs, c'est déjà une chose en faire n'importe quoi, parce que seulement on le veut ainsi, en est toute autre ! Or voilà ce qu'on voudrait qu'un Macky Sall fasse lui qui n'est, si je puisse ainsi dire, qu'un président de la République. C'est-à-dire quelqu'un ne devant ses pouvoirs que d'avoir été élu d'une part et d'avoir été élu, d'une part et d'avoir été installé après la prestation de serment d'autre part.
L'on voudrait donc les avis qu'il doit, obligatoirement, requérir de l'autorité même qui a reçu son serment et l'a consacré ne puissent pas le lier, le concerner ? Quelle conception du droit est–ce là ? Car ce qui a fait de Macky Sall le président de la République du Sénégal non pas dans la virtualité mais dans la réalité, dans la vérité, dans la légalité, c'est la cérémonie de l'hôtel King Fahd que présidait le président du conseil constitutionnel. Ce n'était pas d'avoir été choisi par le plus grand nombre de Sénégalais qui a fait de lui le Président mais d'avoir prêté serment à la barre du Conseil constitutionnel où il avait été dûment appelé par le greffier de celui-ci ! Ce n'est pas un truc ça, ce n'est pas un "machin" !
Macky Sall est un homme de bonne foi mais souvent que celle-ci peut se trouver trompée. Probablement est-ce ce qui, dans cette affaire, lui est arrivé : il a demandé conseil et on lui en a donné de peu pertinents. Et pourquoi donc ? Parce que malheureusement, nous sommes comme ça ! Ce n'est pas par vice, méchanceté ou autre, non, nous simplement comme ça !
Voyez Abdoulaye Wade, par exemple, n'avait–il pas aligné tous les diplômes possibles et imaginables que l'Université, l'Alma Mater française pouvait délivrer ? Et qu'en est-il resté ? Voyez vous-même : il a essayé d'instaurer, au profit de son fils une espèce de monarchie héréditaire plus ou moins démocratique. Il était pourtant intelligent et cultivé et c'est peut-être, même pourquoi il s'est cru assez de force pour forcer le même destin et nous ramener ainsi au Moyen âge !
Macky Sall donc a cru devoir faire confiance aux "sachants" car il ne pouvait autrement. Car les "sachants", pour beaucoup dans notre malheureux pays, ne veulent garder de ce qu'ils ont appris que ce qui leur est nécessaire pour l'examen de sortie, le parchemin, le laissez-passer, le sésame qui fait soudain s'ouvrir la caverne d'Ali Baba ! C'est tout. C'est alimentaire ! C'est utilitaire ! Or non ! C'est le reste qui compte le plus : l'esprit !
S'il faut, pour tel projet, obligatoirement consulter le Conseil constitutionnel et qu'on peut passer outre l'avis que celui-ci a rendu à quoi une telle consultation pouvait-elle bien avoir servi ? Un alibi ? Un truc, un machin ? Je me répète et je m'en excuse mais à quoi une telle disposition pouvait-elle bien rimer dans ce cas ? En fait un Président qui ferait ce que suggère Madame Amsatou Sow Sidibé serait passible, dès sa sortie de poursuites devant la haute cour de justice pour forfaiture ou haute trahison. Sans aucun doute possible !
Hegel qui était un très grand philosophe et raciste à tous crins par ailleurs disait de nous que nous étions de purs sauvages et étrangers à toute idée de transcendance : des animaux bornés à l'immédiateté et à la simple survie. Sarkozy était venu nous insulter ici en empruntant à Hegel et nombre d'entre nous en avaient été choqués. C'est vrai qu'il avait manqué de tact, de politesse, de savoir-vivre, de diplomatie, etc. Mais entre nous, entre frères utérins, on se doit quand même de nous dire la vérité : oui, comme disent les toucouleurs "maman est une sorcière (Neene ko sukuna !)".
Nous sommes malades de nos élites. Lorsqu'une dame de l'extraordinaire qualité de Madame Amsatou Sow Sidibé en vient à proférer une énormité telle que celle dont nous parlons, que reste-t-il ? Vraiment pas grand-chose. Former les jeunes, remplir les têtes de nos futurs dirigeants, voilà ce que c'était et c'est encore son travail, où va-t-on avec ça ? Tout le monde peut, sans peine le deviner et c'est avec une grande terreur que l'on peut observer que la lutte dans ce pays a pris le pas sur l'esprit et le paraître sur l'être. Le fond des choses n'intéresse plus personne, seule la forme importe car elle est visible, elle !
Senghor nous appelait à un changement de mentalités pendant 20 ans. En vain ! Nous n'en sommes pas sortis et d'ailleurs, en sortirons-nous jamais ? J'en doute ! L'adage dit qu'"au pays des aveugles les borgnes sont rois" ! Au Sénégal, si nous sommes bien dans un pays d'aveugles, il y a que, malheureusement, les borgnes y sont tricards ! C'est-à-dire interdits de séjour…