COMMENT GÉRER LES RISQUES SANITAIRES DU MAGAL
Des recherches sur la surveillance syndromique menées auprès des pèlerins au cours des dernières années ont démontré que les infections des voies respiratoires sont parmi les causes les plus fréquentes de consultations lors de l’événement

Le Grand Magal de Touba (capitale religieuse de la confrérie mouride, située à 200 km à l’est de Dakar, dans le centre du Sénégal) aura lieu début octobre. Cet événement religieux annuel a rassemblé, ces dernières années, plus de 4 millions de pèlerins musulmans à Touba.
Le Sénégal, comme de nombreux pays d’Afrique et d’ailleurs dans le monde, est actuellement confronté à la pandémie de Covid-19. Selon le Center for Systems Science and Engineering de l’Université John Hopkins, plus de 14 839 cas ont été signalés au Sénégal au 30 septembre, avec 310 décès.
Données épidémiologiques du Grand Magal de Touba
Des recherches épidémiologiques sur les risques sanitaires initiées bien avant la crise actuelle de la Covid-19, menées sur le Magal de Touba par une équipe de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) de Dakar et l’IHU-Méditerranée Infection de Marseille dirigé par Cheikh Sokhna mettent en évidence les caractéristiques sanitaires de ce type de rassemblement.
Ces recherches ont pour objectif final de faire des recommandations aux autorités sanitaires et religieuses de la région de Diourbel pour une meilleure prise en charge des maladies infectieuses transmissibles en termes de diagnostic et de traitement, mais aussi de mettre en place des stratégies préventives pendant le Magal. Elles visent aussi à améliorer l’offre de santé et, à terme, à prévenir l’éventuelle mondialisation de maladies transmissibles.
Ces recherches sur la surveillance syndromique menées auprès des pèlerins du Grand Magal au cours des dernières années ont démontré que les infections des voies respiratoires sont parmi les causes les plus fréquentes de consultations dans les structures de soins lors de l’événement.
Une étude prospective de cohorte a montré que la prévalence des symptômes d’infection des voies respiratoires était de 42 % chez les pèlerins. Cette prévalence était 5 fois plus élevée chez les pèlerins suite à leur participation au Grand Magal comparée aux non participants du Magal.
La survenue d’une épidémie de dengue à Touba au cours du Grand Magal 2018 a augmenté le risque de propagation à d’autres régions du Sénégal du fait du retour de pèlerins mourides vers leur lieu de résidence où les moustiques Aedes – vecteur principal de la dengue – sont présents.
Les coronavirus courants étaient les virus les plus fréquemment acquis. Plusieurs rassemblements de masse ont été récemment annulés, notamment le pèlerinage de la Omra en Arabie saoudite et les Jeux olympiques au Japon. Le Hajj de cette année était limité à 1 000 participants résidant en Arabie saoudite. L’événement rassemble généralement plus de dix millions de participants de plus de 180 pays.
Des conditions favorables à la propagation
Les conditions habituelles de transport, dans des véhicules bondés (aussi bien dans les gares routières que sur les routes fortement embouteillées menant vers Touba), de même que l’extrême promiscuité qu’elles créent, à l’aller comme au retour du Magal, risquent de constituer un facteur important de propagation du virus (voir photos).
La grande majorité d’entre eux sont hébergés à Touba et aux alentours, dans des maisons familiales ou des maisons de guides spirituels (marabouts) où ils dorment tous ensemble dans les mêmes chambres. Pour le déjeuner et le dîner, les Sénégalais se rassemblent traditionnellement étroitement autour d’un seul grand plat. De plus, lors de l’événement, les rues autour de la Grande Mosquée et du marché général présentent une densité de population extrêmement élevée (voir photos). Toutes ces conditions sont susceptibles de favoriser la transmission d’agents pathogènes respiratoires chez les pèlerins.