DAKAR, ÇA L'AFFICHE MAL
Toujours avides de taxes, les mairies des communes ont donné leur agrément à une multitude de réseaux d’annonceurs. L’agglomération s’enlaidit d’environ un panneau d’affichage tous les 100 mètres, une prolifération qui défigure le paysage urbain

En juin 2015, le querelleur maire de Mermoz-Sacré-Cœur, Barthélémy Dias, devant le non-paiement de taxes municipales dues à sa commune par les régies publicitaires, fait tout bonnement procéder à la démolition de leurs panneaux. En juillet 2016, la chambre administrative de la Cour suprême – saisie par les sociétés Régipub, Regidak et Cauris Com – annule la délibération du conseil municipal de Sacré-Cœur fixant les taux et les modalités d’assiette applicables à la publicité, ainsi que les redevances sur le mobilier urbain.
Mais le forcing de l’édile avait déjà consacré la mainmise des municipalités sur l’affichage urbain. Les régies n’ont eu d’autre choix que de s’y plier. Les 19 communes de la capitale, héritant cette prérogative de la mairie centrale qui la délivrait jusqu’alors avec parcimonie, ont généreusement et abusivement distribué des autorisations d’affichage.
Une invasion
Depuis, c’est (encore plus) le souk sur les artères dakaroises. Toujours avides de collecter davantage de taxes, les mairies des communes ont donné leur agrément à une multitude de réseaux d’annonceurs, professionnels ou pas, pour ne pas dire à tout le monde : agences de pub, business schools privées, industriels, afficheurs informels… Résultat : l’agglomération s’enlaidit d’environ un panneau d’affichage tous les 100 mètres (au mieux), une prolifération qui défigure le paysage urbain.
Médias de proximité transformés en marteaux-pilons totalitaires, ces cohortes de panneaux publicitaires visent la ménagère de moins de 50 ans. En tête des produits promus, le khessal (produit de dépigmentation cutanée) et les bouillons cubes. Contre les premiers, il y a eu une levée de boucliers avec la campagne ñul kukk (« noire d’ébène », en wolof ), qui, à son tour, a dégainé ses panneaux – et a fait long feu.