« ETRE MILLIONNAIRE, C’EST AVOIR DES BIENS QUI VALENT PLUSIEURS MILLIONS… »
Votre rubrique « Histoire d’argent », reçoit le journaliste Issa Sall, ancien du défunt hebdomadaire «Nouvel Horizon, aujourd’hui disparu. Issa Sall est membre et porte-parole de la Commission électorale nationale autonome (CENA)
Votre rubrique « Histoire d’argent », reçoit le journaliste Issa Sall, ancien du défunt hebdomadaire «Nouvel Horizon, aujourd’hui disparu. Issa Sall est membre et porte-parole de la Commission électorale nationale autonome (CENA).
L’INFO : Ton premier contact avec l'argent dans les années 60
Issa SALL : L’agent n’a jamais été une préoccupation pour moi. Mon père nous payait le ticket le dimanche pour les matchs de foot. Nous avions aussi droit au cinéma au moins un samedi par mois. Pour la presse, mon père en achetait régulièrement : Jeune Afrique, Bingo, et le quotidien national. Il m’est arrivé, élève avec mes petits sous, d’en acheter moi-même quand je trouvais un titre intéressant alors que mon père n’en avait pas ramené.
Pour les pièces de monnaie de ma jeunesse
Fifteen, en fait, c’est une pièce d’un franc CFA. Avec 1 franc, même en ces périodes où la pièce circulait beaucoup plus que maintenant, on ne pouvait acheter quoi que ce soit. En revanche, elle servait pour faire la monnaie. Avec le Double, c’est-à-dire la pièce de 2 francs, oui, on pouvait se payer un bonbon, un chewing gum. « Dadji qaam» s’appelait le machin qui vous collait les deux mâchoires. Le boutiquier était maure, parce que le boutiquier guinéen n’existait pas en ces temps-là. Avec dërëm ou la pièce de 5 francs, on se payait un morceau de pain, le cinquième d’une baguette qui coûtait 25 francs. Avec 10 F, on s’offrait du pain tartiné de chocolat fortement dilué à l’huile d’arachide. Un fataya aussi, (sorte de galette très mince et craquante avec un peu de poisson et de la sauce tomate. Si tu ne peux pas t’en payer à la récréation, quel drame ? Mais un copain pouvait toujours vous donner un petit morceau et tu pouvais en profiter pour lécher la sauce. Je ne me rappelle plus le prix du paquet de cigarettes, mais avec 5 francs, on pouvait s’en payer une ou 3 cigarettes à 10 F. Avec la baguette de pain à 25F, un morceau de pain à10f et une boite de lait concentré sucré à 15F, c’était le bonheur. Un mets réputé en ces temps-là. 100 F, c’était la fortune. On s’achetait une boîte de conserve (pâté d’abats, sardines). Le ticket de ciné était à 50 F pour 2 films. Il fallait sortir autant ou le double pour un match de football du championnat.
Ta première grosse somme dans la vie ?
Mon premier revenu est une indemnité perçue lors d’un stage dans une banque (BIAO, ex CBAO) alors que je venais de passer ma première année en fac de droit : 60.000F pour deux mois de présence.
Et quand tu es devenu millionnaire?
A priori, je dis que je ne compte jamais. Je ne sais pas ce que j’ai à la banque. Quand je dépense, je ne compte pas non plus. Mais j’achète utile la plupart du temps. Ce doit être à plus de 30 ans que j’ai eu des revenus au-delà du million. Je collaborais avec Africa International, les NEAS et Le Cafard libéré. Et je faisais un peu de tout ailleurs. Une fois, j'ai été payé presque en même temps. Je dois avoir été un millionnaire instantané. Une journée et j’ai retrouvé la précarité. Il faut comprendre que être millionnaire, c’est avoir des biens qui valent plusieurs millions et non posséder en numéraires la somme.
As-tu été victime d'un pickpocket ? Pour quel montant ? Comment as-tu réagi : tu as sifflé, tu as insulté?
Pour me piquer mon argent, il faut m’escroquer et non m’arracher mes biens ou le subtiliser. Un pickpocket n’a aucune chance. Un vrai faux malheureux, oui
Folie dépensière de ta vie que tu regrettes : voiture, chaussure, chemise, chaussettes, montre…
En principe, je ne regrette jamais mes décisions, bonnes ou mauvaises. Je n’ai jamais regretté une seule dépense. J’assume de commettre des bêtises ou des bonnes actions. J’abhorre la contrition.