KHALIFA SALL, UN RIVAL ENCOMBRANT !
Le procès qui va s’ouvrir le 14 Décembre 2017 contre l’honorable député-maire Khalifa Ababacar Sall, dépasse de loin sa personne et remet en question l’avenir du modèle démocratique sénégalais - Le pouvoir actuel piétine toutes les règles de droit
Le procès qui va s’ouvrir le 14 Décembre 2017 contre l’honorable député-maire Khalifa Ababacar Sall, dépasse de loin sa personne et remet en question l’avenir du modèle démocratique sénégalais. En fait, il ne constitue que la suite logique d’une gouvernance prétendument sobre et vertueuse, mais qui dès le départ a tourné le dos aux valeurs citoyennes, démocratiques et républicaines inscrites dans les recommandations de la CNRI.
Il est, de fait, établi que l’instrumentalisation de certains secteurs de la Justice et l’emprise du Président de la République sur les corps de contrôle, ouvre la voie au caractère sélectif des poursuites judiciaires se traduisant par la latitude qu’a le Chef de l’Exécutif, de mettre certains dossiers sous le coude ou d’en transmettre d’autres au procureur de la République. Et pourtant, aux tous débuts, le Président de la République semblait animé d’une réelle volonté de vouloir mettre en œuvre la reddition des comptes, qui était une exigence substantielle du processus ayant conduit à la deuxième Alternance de mars 2012.
Mais très vite, il apparut, que les politiciens de l’APR obsédés par l’obtention d’un second mandat pour leur mentor, au lieu de créer les conditions politiques de la redevabilité des gestionnaires du précédent régime libéral, cherchaient surtout à "achever" leurs adversaires politiques, qu’ils avaient réussi à évincer du pouvoir.
C’est ainsi qu’ils introduisirent subrepticement le concept insidieux de "recouvrement par cautionnement" ayant eu l’effet pervers d’accorder une impunité de fait aux politiciens véreux prêts à transhumer vers les prairies "marron". Ce faisant, le pouvoir actuel a annihilé les vertus pédagogiques et la valeur d’exemple attachées à la traque des biens mal acquis, qui se terminera dans une opacité catastrophique, par une grâce des plus mystérieuses ayant abouti à l’exil de Karim Wade vers le Qatar.
Au total, le processus de reddition des comptes aura perdu de sa crédibilité conduisant paradoxalement et malheureusement à la réhabilitation des forces défaites lors des dernières élections présidentielles de 2012, comme l’a montré le score électoral flatteur et inespéré de la coalition autour du PDS aux dernières élections législatives du 30 juillet 2017.
Après le fiasco de la traque des biens mal acquis, qui a tout de même permis au président Sall d’exiler un potentiel rival aux présidentielles de 2019, une autre menace planait sur la réélection hypothétique du président de l’APR en 2019, à savoir la candidature éventuelle du maire de Dakar, que le cabinet noir de la Présidence de la République s’évertue à étouffer, à travers une cabale des plus rocambolesques.
En effet, usant de trafic d’influence à travers les prises de position arbitraires et politiciennes de ses principaux ténors (y compris de ses Gardes de Sceaux successifs), le pouvoir actuel viole le secret de l’Instruction, piétine toutes les règles de droit, opposant une fin de non-recevoir systématique à tous les recours des avocats de la défense, allant jusqu’à refuser à Khalifa Sall, le bénéfice de son immunité parlementaire.
Mais le plus dramatique dans cette histoire, c’est moins le sort tragique d’un ex-prince héritier ou d’un député-maire aspirant aux plus hautes fonctions de la République, tous victimes de "petits meurtres en famille" au sein de l’élite politique sénégalaise, que la crise politique et institutionnelle qu’elle révèle.
En effet, la conjuration contre tous les potentiels candidats de l’Opposition aux prochaines présidentielles se déroule au moment où l’Opposition décrie les violations répétitives des dispositions du code électoral par le régime de Benno Bokk Yakaar, comme on a pu le constater lors des dernières législatives marquées par de nombreux dysfonctionnements. On a, en effet, assisté à une distribution scandaleusement sélective des cartes électorales, favorisant les bastions électoraux de l’APR et de ses alliés (souvent localisés en zone rurale), au détriment des fiefs de l’Opposition prédominant à Dakar, Touba et dans les autres grandes villes.
C’est parce qu’ils soupçonnent le président-candidat de chercher à évincer certains de ses concurrents les plus sérieux, que les segments les plus représentatifs de l’Opposition boudent le pseudo-dialogue politique initié par le pouvoir, tout en exigeant la libération, sans condition, de l’otage Khalifa Sall.
Tant que les conditions d’une concurrence saine et loyale ne seront pas assurées à tous les candidats aux prochaines élections présidentielles, le camp présidentiel, qui se targue d’un bilan élogieux, ne pourra pas faire la preuve de sa représentativité et courra le risque de perdre le peu de légitimité, qui lui reste.