LA MARQUE DU RELIGIEUX DANS LA PRODUCTION SOCIOPOLITIQUE
Il est de tradition de choisir pour la presse ou par la presse l’événement qui a marqué l’année qui vient de s’écouler.
Il est de tradition de choisir pour la presse ou par la presse l’événement qui a marqué l’année qui vient de s’écouler. Cela est toujours un exercice difficile pour moi, car je lis le déroulement de l’année à partir des différentes réalisations marquantes dans plusieurs domaines de la vie sociale, politique, économique, culturelle, intellectuelle et scientifique. Dans chacun de ces domaines, il est possible de sélectionner un fait déterminant qui a fait avancer le monde ou qui porte le potentiel de faire progresser substantiellement le monde. Une préoccupation dans la lecture des événements doit être de tenir compte de leurs impacts au présent mais aussi et surtout pour le futur. Les événements importants sont pour moi ceux qui interpellent le futur, ceux qui s’inscrivent dans la prospective et le durable.
LE MONDE SCIENTIFIQUE
Je suis très à l’écoute de ce qui se passe dans le monde scientifique. Je suis un lecteur assidu de Science et de Nature Je suis à l’affût des découvertes scientifiques et deux me semblent dignes de mention. Ainsi en astronomie, le résultat significatif, en avril 2019, de la collaboration scientifique entre 200 différents chercheurs dans le monde et sur 4 continents qui ont réussi à photographier la première image d’un trou noir. Cette rencontre d’expertises est importante, la technologie sophistiquée déployée également mais surtout c’est la première observation directe de ce mystérieux phénomène des trous noirs. Une telle percée scientifique a été saluée par la revue Science comme « The 2019 breakthrough of the year » car elle viendrait confirmer la théorie de la relativité de Einstein et elle ouvre, diton, sur des développements importants en astrophysique des hautes énergies. Une autre avancée scientifique renvoie à l’exploit de l’équipe du Dr Kamel Kalili de l’école de médecine de Temple en collaboration avec celle de Pittsburg qui ont réussi l’élimination du VIH du corps de souris infectées. Cette découverte est importante et amène des espoirs pour guérir l’infection de VIH chez l’humain.
LE DEFI DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CLIMAT
Dans un autre domaine, la Suédoise Greta Thunberg a marqué les esprits par sa détermination et sa force de mobilisation pour la préservation de l’environnement et du climat. Le magazine Times en a fait la personnalité de l’année et ainsi la plus jeune personnalité de l’année choisie par ce prestigieux magazine Le Président Obama a salué ce choix en tweetant « No one is too small to have an impact and change the world». Par ce modèle d’engagement, Greta Thunberg indique bien que demain appartient aux jeunes et il est impératif que leurs implications d’aujourd’hui contribuent à façonner le futur, surtout dans un domaine aussi déterminant que l’avenir de l’environnement et du climat.
AU SENEGAL, LE RELIGIEUX, LES LEADERS RELIGIEUX ET LA PRODUCTION SOCIO POLITIQUE DU DISCOURS PUBLIC
Le Sénégal a vécu plusieurs événements importants. Cependant la place du discours religieux et des acteurs religieux dans l’espace public a été frappante. Bien sûr que ce phénomène n’est pas inédit au Sénégal mais cette année est particulièrement marquée par une prégnance et impact particuliers DU RELIGIEUX qui méritent une plus grande analyse. On ne parlera pas « d’un contrôle islamique» du discours public. C’est bien loin d’être cela. Cependant le discours religieux, les leaders religieux ou des acteurs religieux de la société civile se sont distingués comme les grands régulateurs sociaux et même politiques. Mais également comme des voix de vigilance contre de possibles dérives contre des valeurs religieuses ou culturelles de l’islam, dérives qui, selon eux, seraient téléguidées par des lobbyistes externes avec des alliés internes.
Le Quotidien national le Soleil a produit la semaine dernière un texte très intéressant sur les événements reliés au religieux en 2019. Bien sûr, on cite l’ inauguration de la superbe Mosquée Massalikoun Jinan et le leadership fédérateur du Grand Khalif Serigne Mountakha, les polémiques autour du voile islamique et de l’école Ste Jeanne d’Arc, la tension autour de l’encadrement pédagogique et le traitement des enfants dans les daraas , les interrogations récentes sur la présence à Mbour de missionnaires Tabligh pakistanais .
Et même un geste comme la restitution par la France au Sénégal d’une première œuvre patrimoniale s’est inscrite dans l’intertexte religieux à travers le sabre ou l’un des sabres d’un chef religieux et militaire : Cheikh Oumar Foutiyou Tall . Mentionnons également les polémiques après la publication des premiers tomes de l’Histoire Générale du Sénégal alors que des familles religieuses ont contesté le contenu. Ainsi la marque du religieux dans la production du discours public a été un élément omniprésent dans les débats de 2019 au Sénégal.
Pr Khadiyatoulah Fall, professeur à l’université du Québec à Chicoutimi, Canada