LA VIOLENCE SE TROMPE DE COLÈRE
La laïcité et le vivre-ensemble, dont nous fûmes le pays modèle sont mis à mal. Affrontements lors des matchs de football de Navétanes, saccages dans l’arène des combats de lutte… Quand sortirons-nous le carton rouge ?
Ces dernières années, le phénomène s’est amplifié. Sur les réseaux sociaux, c’est le grand bazar des rumeurs qui ne font qu'agiter des tensions et pousser certains à la violence.
À l’origine de ces fléaux qui menacent notre société démocratique, une minorité significative qui considère que le monde est guidé et contrôlé par des forces secrètes.
Chez nous en Afrique, c’est la persistance de discours erronés ou malveillants comme le pillage organisé ou les leaders africains manipulés… Dans un monde surinformé, comment expliquer une telle crédulité qui témoigne d’une défiance systématique à l’égard des institutions de la démocratie et conduit à la confiscation du débat public ?
Comment croire par exemple, sans être aveugle ou manipulateur, que les dirigeants africains seraient à la solde de la France qui porterait au pouvoir des présidents afin de pouvoir les contrôler plus aisément ?
Il n’est pas seulement absurde de penser cela, c’est aussi dangereux. Les sociétés démocratiques reposent sur un certain nombre d’évidences et de valeurs partagées, sur un minimum de confiance envers les institutions et dès lors qu’on décrit nos dirigeants comme des malfaiteurs, le dialogue démocratique s’avère impossible.
En proie à la désinformation et au complotisme, notamment antivaccinal, l’Afrique de l’Ouest, a besoin de rambardes de sécurité, pour se protéger de l’insécurité, du terrorisme, mais aussi d’une flambée de violence inédite au sein même de ses démocraties.
Chez nous au Sénégal, la laïcité et le vivre-ensemble, dont nous fûmes le pays modèle sont mis à mal par une explosion de haine, orchestrée par une certaine opposition au régime dont le seul calcul, à défaut de solutions politiques, est de semer la terreur en répandant de fausses informations sur notre développement et nos dirigeants. Que leurs sympathisants se posent la question de savoir si là, du coup, ce n’est pas un pays avec un riche potentiel en ressources naturelles qu’ils convoitent !
Qu’ils ouvrent encore les yeux et constatent que le Sénégal n’a jamais été aussi enviable et envié pour sa stabilité sociale et ses réalisations, sa gouvernance, sa gestion du Covid, son développement économique, sa projection de croissance, sa diplomatie hors pair, son leadership en Afrique et son rayonnement dans le monde.
Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons plus supporter cette violence, face à laquelle il faut opposer une tolérance zéro. Il en va de notre survie et de notre modèle de société. Les réseaux sociaux en cela jouent un rôle déterminant et les moins de 35 ans, les moins diplômés et les catégories sociales les plus défavorisées demeurent ainsi les plus perméables aux théories du complot.
Au chapitre de la haine ordinaire, nous voyons aussi les violences dans les stades ces derniers temps se multiplier. Pour rappel, cette semaine un jeune âgé de 20 ans, est décédé à Rufisque, dans des échauffourées survenues dans un stade. Affrontements lors des matchs de football de « Navétanes », saccages dans l’arène des combats de lutte… Quand sortirons-nous le carton rouge ? Nous ne pouvons plus accepter cela car il ne s’agit pas seulement d’une fête gâchée, mais bien d’une vie perdue pour un penalty.
Jamais je n’avais connu ce sentiment dans mon pays. On sent une certaine effervescence, un certain nombre de crispations au sein de la société. La spirale de violence doit immédiatement cesser. L’agression physique des personnes est intolérable et inacceptable. Seules des sanctions assez fortes feront un rempart contre les dérives et violences multiformes.
Je veux mettre au premier plan de cette lutte, l’élimination de la violence à l’égard des femmes qui reste l’une des violations des droits humains les plus répandues. Combattre toutes les formes de violences faites aux femmes doit être une priorité absolue et un thème clairement inscrit dans la campagne électorale en cours. Au Sénégal, 78% des femmes ont subi des violences domestiques dans leur vie (Rapport UE).
À un mois et demi des élections locales, les grandes confréries musulmanes essaient de faire retomber les tensions de plus en plus vives entre l’opposition et le pouvoir. Nous devons tous les y aider, si nous ne voulons pas qu’un jour les complotistes sèment le trouble dans nos démocraties et que les plus jusqu'au-boutistes d’entre eux fassent trembler l'Afrique.