LE SÉNÉGAL NE MÉRITE PAS UNE ASSEMBLÉE NATIONALE QUI PRODUIT DES LOIS DE MAUVAISE QUALITÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - Les lois organiques doivent faire l’objet d’une préparation rigoureuse par les pouvoirs exécutif et législatif et d’un contrôle exigeant par le Conseil constitutionnel. La loi organique du 28 octobre 2019 en est très loin
A propos du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale régi par une « loi ordinaire organique »
« La qualité de la production normative constitue un enjeu de bonne gouvernance politique et économique » [1]
« Le règlement (de l’Assemblée) a une très grande importance pratique…A mauvais règlement, mauvais travail. Avec un bon règlement, on a des chances d’avoir un bon travail »[2]
De la loi n° 61-62 du 28 septembre 1961 relative au Règlement intérieur de l’Assemblée nationale à la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 (modifiant et complétant le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale), en passant par la loi n° 78-21 du 28 avril 1978 (abrogeant et remplaçant la loi n° 63-63 du 17 juillet 1963), l’Assemblée nationale a toujours été régie par un Règlement intérieur sous forme de loi ordinaire. Avec la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 5 avril 2016, l’article 62 de la Constitution prévoit que le Règlement intérieur de l’institution parlementaire est déterminé par une loi organique.
Après avoir attendu en vain la promulgation d’une loi organique portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale pour refonder ses dispositions du premier au dernier article en application de la loi constitutionnelle précitée, nous avons constaté avec étonnement la publication en octobre 2019 d’une loi organique qui modifie et complète la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002, modifiée, alors que, conformément à l’article 62 la Constitution, ladite loi aurait dû être abrogée et remplacée par une loi organique. En effet :
- Le 11 octobre 2019, l’Assemblée nationale a adopté une « loi organique sous le numéro 14/2019 modifiant et complétant la loi organique n° 2002-20 du 15 mai 2002, modifiée, portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ».
Même si nous reconnaissons que depuis quelques années, le gouvernement s’est montré plus soucieux de la qualité rédactionnelle des textes normatifs[3], force est de constater que la manière dont la proposition de loi organique numéro 14/2019 a été préparée au sein de la Commission des Lois démontre que l’Assemblée nationale ne semble pas partager la même préoccupation que le pouvoir exécutif.
On remarquera la démarche cavalière du législateur qui, sans aucun fondement juridique, qualifie la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 de loi organique alors que celle-ci est en réalité une loi ordinaire au regard de l’intitulé du texte publié au Journal Officiel n° 6053 du 29 juin 2002. Il est étonnant de constater que les députés n’aient à aucun moment de la discussion du projet de texte en cause relevé cette anomalie.
- En sa séance du 23 octobre 2019, le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2/C/2019, a déclaré conforme à la Constitution les dispositions de « la loi organique adoptée le 11 octobre 2019 sous le numéro 14/2019, modifiant et complétant la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002, modifiée, portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale » tout en considérant paradoxalement, dans la même décision, la loi du 15 mai 2002 comme une loi ordinaire.
- Le 28 octobre 2019, le président de la République a promulgué la « loi organique n° 2019-14 modifiant et complétant la loi organique n° 2002-20 du 15 mai 2002, modifiée, portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ».
Contrairement à la décision constitutionnelle du 23 octobre 2019, la loi promulguée fait mention dans son intitulé d’une loi organique ayant le même numéro et la même date que la loi ordinaire n° 2002-20 du 15 mai 2002.
Enfin, il faut regretter que les services compétents du gouvernement soient amenés à soumettre au président de la République la promulgation de la loi n° 2019-14 du 28 octobre 2019 sans faire droit aux observations substantielles et de forme contenues dans la décision n° 2/C/2019 du 23 octobre 2019 du Conseil constitutionnel.
La présente étude technique s’intéresse, en premier lieu, à quelques réflexions juridiques sur la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002, et ce, dans l’objectif de démontrer que cette loi n’est pas une loi organique. Deuxièmement, l’étude exposera quelques lacunes et imperfections issues de l’examen critique de la loi organique du 28 octobre 2019 précitée avant de conclure sur la nature juridique du Règlement intérieur actuellement en vigueur.
Quelques réflexions juridiques sur la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002
L’absence de concordance entre l’intitulé et le dispositif de la loi
L’intitulé est ainsi formulé : « Loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 modifiant et complétant le Règlement intérieur ». Tel que rédigé, l’intitulé ne permet pas de connaitre la référence de la loi qui porte le Règlement intérieur à modifier et à compléter. C’est la lecture de l’exposé des motifs et de l’article unique du dispositif de la loi et l’analyse de la décision n° 1-C-2002 du 14 mai 2002 du Conseil constitutionnel (Considérant 4 et Article premier) qui renseignent que le texte de loi à modifier et à compléter est la loi n° 78-21 du 28 avril 1978.
Il devrait être rappelé aux députés, auteurs des propositions de loi, que l’intitulé des lois « doit indiquer, de manière aussi claire, précise et concise que possible, l’objet essentiel du texte »[4].
De prime abord, on peut dire que l’objet principal de la loi du 15 mai 2002 était de modifier et compléter la loi du 28 avril 1978 portant Règlement intérieur.
Une question se pose alors : faut-il considérer que modifier et compléter les dispositions de la loi du 28 avril 1978 portant Règlement intérieur implique l’abrogation et le remplacement dudit Règlement de 1978 ? À cette interrogation, la réponse est sans équivoque. Dans une stricte démarche juridique, l’abrogation de la loi de 1978 doit être expresse dans le nouveau texte de 2002. Mieux, il va de soi que lorsqu’une loi est modifiée et complétée, la version originelle ne disparait pas puisque ses dispositions non modifiées demeurent en vigueur. Dans notre espèce, et s’en limitant à son intitulé, il reste clair que c’est la loi n° 78-21 du 28 avril 1978 (modifiée et complétée par la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002) qui demeurait la loi intérieure de l’Assemblée nationale.
Toutefois, il faut relever l’absence de concordance de terminologies entre l’intitulé affiché et le dispositif de la loi de 2002. En effet, l’article unique de la loi de 2002 stipule : « La loi n° 78-21 du 28 avril 1978 … est complétée et remplacée par les dispositions suivantes ». Avec une telle formulation qui recoupe la technique de « l’abrogation assortie d’un remplacement [5]», nous sommes d’avis que l’intention du législateur était de remplacer le Règlement intérieur de 1978 dans son ensemble par la loi n° 2002-20. Nous sommes également d’avis qu’en recourant à « la technique normative dite de « l’abrogation balai » [6] au niveau de l’article 123 du nouveau Règlement intérieur de 2002, le législateur a abrogé toutes les dispositions contenues dans la loi n° 78-21 du 28 avril 1978.
L’intitulé des lois étant dépourvu de valeur normative et n’ayant aucune incidence sur la légalité des dispositions de la loi concernée [7], c’est le dispositif qui prime. En conséquence, il faut convenir que la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 a abrogé et remplacé la loi n° 78-21 du 28 avril 1978.
La loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 publiée au JO n° 6053 du 29 juin 2002 est une loi ordinaire
Premièrement, la formule décisoire solennelle qui fait référence à l’adoption du Règlement intérieur de 2002 par l’Assemblée nationale et à sa promulgation par le président de République mentionne « la loi dont la teneur suit » au lieu de « la loi organique dont la teneur suit ».
Deuxièmement, la formule finale de la loi promulguée est : « La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat » et non pas « La présente loi organique sera exécutée comme loi de l’Etat ».
Troisièmement, la décision n° 1-C-2002 du 14 mai 2002 du Conseil constitutionnel mentionne la loi (Considérant 1, 3 et 4 et article premier) et non la loi organique.
L’Assemblée nationale n’a aucune compétence constitutionnelle pour surclasser rétroactivement de fait et dans l’appellation une loi ordinaire pour en faire une loi organique.
Par les termes « La loi organique portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale détermine… », employés au premier alinéa de l’article 62 de la Constitution, il faut exclusivement considérer les dispositions législatives adoptées dans les domaines réservés aux lois organiques.
Tirer de la rédaction de cet article constitutionnel l’argument selon lequel la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 est devenue rétroactivement une loi organique nous parait non-fondé en droit.
En clair, « l’attribution de la qualité de loi organique au Règlement intérieur de l’Assemblée nationale » ne signifie nullement la mutation catégorielle de la loi ordinaire n° 2002-20 du 15 mai 2002 en loi organique avec le même numéro et la même date.
Le Conseil constitutionnel confirme le caractère ordinaire de la loi du 15 mai 2002
Tout d’abord, comme précisé plus haut, au niveau des Considérants 1, 3 et 4 et de l’article premier de la décision n° 1-C-2002 du 14 mai 2002 du juge constitutionnel, il est fait référence à la loi et non à la loi organique.
Ensuite, on observe que le troisième visa, le Considérant 1 et l’article premier de la décision n° 2/C/2019 du 23 octobre 2019 du Conseil constitutionnel visent « la loi n° 2002-20 » et non « la loi organique n° 2002-20 ».
En règle générale, les décisions du Conseil constitutionnel sont importantes pour ce qu’elles disent mais dans ce cas précis la rédaction de cette décision est importante pour ce qu’elle ne dit pas. En effet, s’il avait considéré la loi n° 2002-20 de loi organique, le juge constitutionnel l’aurait expressément qualifié comme telle. En s’abstenant de la qualifier, il est clair que pour le Conseil constitutionnel ladite loi n’a pas le caractère de loi organique mais simplement « le caractère de loi » pour ainsi dire de loi ordinaire.
Il n’est pas sans intérêt de souligner, en comparaison avec une autre décision, que le Conseil constitutionnel n’a pas adopté la même position lorsqu’il mentionnait dans sa décision du 9 mai 2018 numéro 1/C/2018 (Considérant 1) l’expression « la loi organique portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale » sans toutefois préciser le numéro et la date de la loi organique visée.
Les lacunes et imperfections de la loi organique n° 2019-14
L’analyse critique de la loi organique adoptée par les députés en octobre 2019 et l’étude minutieuse de la décision de conformité du Conseil constitutionnel en date du 23 octobre 2019 auraient dû amener le pouvoir exécutif à appeler l’attention de l’Assemblée nationale sur les lacunes et imperfections ci-dessous (la liste n’est pas exhaustive) :
1°/ Le législateur organique a oublié de rattacher les nouveaux articles 97, 98 et 99 à un chapitre donné
L’article 4 de la loi organique de 2019 a ajouté au Règlement intérieur les articles 41 bis, 78 bis, 80 bis, 97 (nouveau), 98 (nouveau) et 99 (nouveau). Si pour les articles 41 bis, 78 bis et 80 bis, les chapitres de rattachement sont identifiés tel n’est pas le cas pour les articles 97 (nouveau), 98 (nouveau) et 99 (nouveau) qui traitent de l’évaluation des politiques publiques.
En l’absence de précision sur le chapitre destiné à recevoir ces trois nouveaux articles, le juge constitutionnel déclare, dans sa décision précitée, que « (les dispositions nouvelles) sont directement rattachées au chapitre XXI « Résolutions, questions » qui traite d’un objet différent » (Cf. Considérant 23 de la décision du 23 octobre 2919). Ce raisonnement est critiquable parce que l’évaluation des politiques publiques n’a pas de lien direct avec le chapitre XXI.
2°/ Le législateur organique a oublié de modifier la numérotation des chapitres 25 à 30 à la suite de la suppression des chapitres 22 à 24
L’article 3 de la loi organique a supprimé les chapitres XXII, XXIII et XXIV du titre 3 qui regroupaient les anciens articles 97, 98 et 99. Conséquemment à cette suppression, les numéros des chapitres XXV, XXVI, XXVII, XXVIII, XXIX et XXX devraient être modifiés.
3°/ L’article 34 alinéa 2 devrait être formulé
En dehors du changement de dénomination de la Commission des Finances et du Contrôle budgétaire, le deuxième alinéa de l’article 34 tel que modifié ne fait pas ressortir les autres changements intervenus. En effet, la deuxième phrase de l’alinéa 2 de l’article 34 dans sa version antérieure disposait : « La Commission de Comptabilité et de Contrôle et la Commission des Délégations comprennent chacune vingt membres ». La suppression de cette phrase conduit à revoir l’articulation du nouvel alinéa 2 de l’article 34 avec l’article 25 qui prévoit que les membres de la Commission des Délégations sont au nombre de vingt et l’article 30 qui fixe à vingt les membres de la Commission de Comptabilité et de Contrôle.
4°/ Le dernier alinéa de l’article 78 est à supprimer à la suite de la création de l’article 78 bis
Le denier alinéa de l’article 78 dispose : « Les lois de finances sont votées dans les conditions prévues par la loi organique relative aux lois de finances ». Avec la création de l’article 78 bis qui traite du vote des lois de finances, le maintien de cette disposition ne se justifie pas au niveau de l’article 78.
5°/ L’article 78 bis présente des lacunes
- Il est muet sur le vote des plafonds d’autorisations d’emplois rémunérés par l’Etat
- À l’alinéa 4, les mots « de trésorerie » sont omis après l’expression « de ressources et de charges »
6°/ La contradiction apparente entre l’article 80 bis et l’article 60 alinéa 5 du Règlement intérieur
L’article 80 bis consacre les dispositions relatives aux conditions de recevabilité des amendements aux lois de finances. Il reprend de façon littérale l’article 58 de la loi organique relative aux lois de finances de 2011. Nous notons que sa rédaction semble contrarier le principe du droit d’amendement posé à l’article 60 alinéa 5 du Règlement intérieur. En effet, la compensation entre ressources n’est pas autorisée par l’article 80 bis alors que l’article 60 alinéa 5 admet des propositions ou amendements assortis de propositions de recettes compensatrices.
7°/ La formulation de l’article 97 (nouveau) respecte-t-elle la lettre de l’article 59 de la Constitution ?
En vertu de l’article 59 de la Constitution, « (l’Assemblée nationale) vote seule la loi, contrôle l’action du Gouvernement et évalue les politiques publiques ». Au regard de cette disposition qui confère une compétence à l’Assemblée en matière d’évaluation des politiques publiques, la création du Comité d’Évaluation des Politiques publiques ne devrait pas être une faculté soumise à la volonté (bonne ou mauvaise) du bureau de l’Assemblée ni avoir un caractère temporaire comme indiqué à l’article 99 (nouveau). Plus qu’une faculté, la création de ce comité avec un caractère permanent est une exigence tirée de l’article 59 de la Constitution. Dès lors, la formule rédactionnelle « Il peut être institué …un Comité d’Évaluation des Politiques publiques» ne nous parait pas adéquate et devrait être remplacée par l’expression : « Il est institué un Comité d’Évaluation des Politiques publiques ... ».
8°/ La cohérence interne des deux phrases de l’alinéa 1er de l’article 98 (nouveau) est à vérifier
La première phrase de l’alinéa premier de l’article 98 (nouveau) évoque un comité chargé de réaliser des travaux d’évaluation portant sur les politiques publiques tandis que la seconde phrase du même alinéa fait référence à des comités dont la mise en place est déterminée par une instruction générale du Bureau.
9°/ Les dispositions transitoires de l’article 5 ne sont rattachées à aucun article du Règlement intérieur
En réalité, les dispositions prévues à l’article 5 sont des dispositions provisoires à ne pas confondre avec des dispositions transitoires.
10°/ Enfin, la loi organique de 2019 ne détermine pas l’organisation des services administratifs et les attributions du secrétaire général administratif
Or, l’article 62 de la Constitution dispose : « La loi organique portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale détermine :
- (… )
- l’organisation des services administratifs placés sous l’autorité du Président de l’Assemblée nationale assisté d’un secrétaire général administratif ».
- Considérations finales : Un Règlement intérieur régi par une « loi ordinaire organique »
Adopter une loi organique en 2019 en vue de modifier et de compléter la loi n° 2002-20 équivaut à reconnaitre que cette dernière est toujours en vigueur. Dans cette hypothèse, comment cette loi ordinaire pourrait coexister avec une norme supérieure (la loi organique de 2019) qui a seulement pour objet de la modifier et de la compléter ?
À ce titre, il faut regretter le manque d’audace du juge constitutionnel qui n’est pas allé loin dans sa décision du 23 octobre 2019. En effet, en exerçant le contrôle de conformité avec la Constitution d’une loi organique qui ne fait que modifier et compléter une loi ordinaire de 2002, le Conseil constitutionnel aurait dû saisir l’occasion pour exiger plus de rigueur du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif et être plus sévère en appelant leur attention sur l’obligation de disposer d’une loi organique qui détermine du premier jusqu’au dernier article le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale conformément à l’article 62 de la Constitution.
En l’absence de l’anomalie évoquée plus haut, peut-on affirmer, en conclusion, que le Règlement intérieur en vigueur est conforme à l’article 62 de la Constitution ?
À l’évidence non parce que malgré l’intitulé de la loi n° 2019-14 du 28 octobre 2019, le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale est actuellement régi par des dispositions relevant du domaine législatif ordinaire (loi de 2002) et par des dispositions relevant du domaine législatif organique (loi organique de 2019).
En effet, dans sa version consolidée, le Règlement intérieur comprend 123 articles dont 103 issus de la loi ordinaire du 15 mai 2002, modifiée et 20 articles (modifiés et remplacés, abrogés et remplacés et ajoutés) issus de la loi organique n° 2019-14 du 28 octobre 2019 à savoir les articles premier nouveau ; 5 ; 18 ; 19 ; 24 nouveau ; 34 ; 36 ;41 ; 44 ; 41 bis ; 60 ; 61 ; 78 bis ; 80 bis ; 90 ; 97 (nouveau) ; 98 (nouveau) ; 99 (nouveau) ; 102 et 115.
On est tenté de dire qu’on est en présence d’un Règlement intérieur porté par une « loi ordinaire organique » ; une loi sui generis inconnue des catégories répertoriées du droit constitutionnel.
En conclusion, parce qu’elles complètent ou précisent les dispositions de la Constitution, les lois organiques doivent faire l’objet d’une préparation minutieuse et rigoureuse par les pouvoirs exécutif et législatif et d’un contrôle exigeant par le Conseil constitutionnel. On est très loin de cette rigueur et de ce formalisme substantiel avec la loi organique du 28 octobre 2019. Et il n’y a aucun complexe ni aucune honte à admettre les lacunes et imperfections du Règlement intérieur actuellement en vigueur et à les corriger en recourant à une procédure permettant de restituer à toutes les dispositions du Règlement intérieur leur caractère législatif organique.
Mamadou Abdoulaye Sow est Inspecteur principal du Trésor à la retraite
[1] Papa Assane Touré, « La légistique. Techniques de conception et de rédaction des lois et des actes administratifs : une tradition de gouvernance normative », L’Harmattan, 2018, p. 13.
[2] Joseph Barthélemy et Paul Duez, « Traité de droit constitutionnel », Éditions Panthéon-Assas, 2004, p. 521
[3] En ce sens, Abdou Latif Coulibaly, « De l’art de mal légiférer au paradigme du mieux légiférer : contribution à la recherche d’une nouvelle gouvernance normative au Sénégal » in A Sall et I.M Fall (sous la dir), Mélanges en l’honneur de Babacar Kanté. Actualité du droit public et de la science politique en Afrique, L’Harmattan, 2017, pp. 661-676.
[4] Guide pour l’élaboration des textes législatifs et règlementaires », La Documentation française, 2005, p. 164.
[5] Une expression empruntée à Papa Assane Touré précité, p. 245.
[6] Ibidem, p. 245.
[7] Si l’on transpose aux lois la solution dégagée dans l’arrêt du Conseil d’Etat français n° 386436 du 07 octobre 2015.