LÉGÈRETÉ ET INCOHÉRENCE AU SOMMET DU FOOT AFRICAIN
L’inconcevable faiblesse de l’administration de la CAF appelle des mesures d’assainissement et l’arrivée à sa tête d’un homme fort capable de rallier tous ceux qui veulent vraiment œuvrer pour le développement du football africain
Tous les arguments qui expliquaient et justifiaient l’organisation de la CAN en juillet préférablement au mois de janvier viennent d’être balayés par une série de motifs qui dénotent surtout l’incohérence et la légèreté de ceux qui sont chargés de conduire le football africain.
Que l’Egypte, dernière organisatrice de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), en juillet 2019, et le Cameroun, en principe le prochain, aient des caractéristiques climatiques très différentes, d’accord. Que se pose un problème de territorialité, soit ! Mais rien de nouveau sous le soleil. Ces arguments existent depuis 1957, année de la première édition de la CAN.
Par ailleurs, le football français – principal fournisseur à l’époque des joueurs africains évoluant en Europe –, et son homologue africain avaient en bonne intelligence retenu le début de l’année, c’est-à-dire le mois de janvier, pour le déroulement de la plus grande compétition africaine qui, jusque-là, se tenait en mars. Cela permettait aux uns et aux autres de préserver leurs intérêts.
Changement de cap avec l’arrivée d’un nouveau président à la tête de la Confédération africaine de football (CAF). Ahmad Ahmad, le nouvel élu, a pris soin de bien se mettre en scène et de changer l’orchestration. Sans doute s’est-il dit que l’Afrique, qui aura désormais vingt-quatre équipes qualifiées – tant pis pour les infrastructures inexistantes sur le continent –, gagnerait à organiser sa phase finale en été. Chaque nation pourrait ainsi faire appel à ses professionnels, ce qui est la promesse d’un jeu de qualité.
L’Afrique doit encore se soumettre
Pour justifier son spectaculaire revirement, il s’appuie sur un maître mot : la flexibilité. Revenir en hiver, clame-t-il, c’est être flexible. En vérité, c’est taire le fait que depuis l’installation de Mme Fatma Samoura au siège du Caire, installation décidée autoritairement par la FIFA, la direction de la CAF est dépendante de la volonté de la fédération internationale et de son président Gianni Infantino, ce dernier étant très impliqué dans l’élection d’Ahmad. Leurs « recommandations » sont tout naturellement devenues des ordres.
Et la CAF, dont les caisses sont vides et dans le besoin de renflouement continu, est désormais contrainte et forcée d’obéir au doigt et à l’œil à ce que l’institution mondiale lui dicte. Or, on sait que la FIFA a mis sur pied une nouvelle compétition prévue précisément en juin, le Mondial des clubs, qui va accueillir vingt-quatre adversaires et non plus huit comme c’était le cas jusqu’ici. Pas question donc de télescopage entre la CAN et cette compétition new look.
Une fois de plus, c’est l’Afrique qui doit se soumettre. Tout comme l’ensemble du comité exécutif devant son président, qui collectionne les bévues comme d’autres les petits soldats de plomb. Un comité exécutif composé pour l’essentiel d’esprits timorés, enclins à la flatterie, surtout zélés pour plaider une révision à la hausse des indemnités financières multipliées par deux depuis l’avènement du dirigeant malgache. L’inconcevable faiblesse de l’administration de la CAF appelle des mesures d’assainissement et l’arrivée à sa tête d’un homme fort, d’un vrai caractère disons-le, d’un patron capable de rallier tous ceux qui veulent vraiment œuvrer pour le développement du football africain.
Pape Diouf a été président de l’Olympique de Marseille de 2005 à 2009.